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Covid-19 : l’emploi trinque mais le dollar résiste
©OZAN KOSE / AFP

Impact du coronavirus

Jean-Paul Betbeze revient sur les effets de la crise du coronavirus sur l'économie et sur les marchés financiers. Face à la crise pétrolière et économique, les banques centrales multiplient les mesures et les annonces.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Il peut sembler morbide de suivre ainsi, par la finance et pas à pas, l’avancée de la pandémie. Mais c’est sans doute le meilleur moyen pour la contrôler et voir le moment où sa vitesse aura suffisamment ralenti pour que les autorités prennent le risque du déconfinement, avec toujours les précautions de distance. Et que l’on en mesure les effets. D’un strict point de vue économique, l’effet de cette pandémie est énorme : 30 millions d’emplois perdus en 6 semaines aux seuls États-Unis, des récessions partout dans les pays développés (États-Unis, zone euro, France…) et des déclenchements d’urgence au FMI pour nombre de pays émergents (Argentine, Egypte, Liban déjà, Afrique du Sud peut-être bientôt). L’addition entre la crise sanitaire, la crise économique et financière et, dans certains pays, la crise pétrolière, est explosive. Pour éviter une conflagration, les déficits budgétaires et les banques centrales sont à la manœuvre, achetant des tombereaux de bons du trésor, des obligations privées, parfois des actions comme au Japon ou en Suisse.

COVID-19 : le suivi de la pandémie

L’épicentre de la pandémie se trouve aux Etats-Unis, avec bientôt 1,2 millions de cas et 70 000 décès, plus que pour la guerre du Vietnam. On peut comparer ses vitesses de propagation en fonction des stratégies adoptées, le développement des tests et noter le nombre de décès remarquement faible en Allemagne. Tout cela devra être étudié.

Mais la préoccupation économique est double : le prix en PIB perdu qu’implique le confinement (- 5,8% en France au premier trimestre) et le risque de résurgence, lié au déconfinement. Pour le moment, les marchés, si l’on prend les cours boursiers, se disent (peut-être) que le pire est passé et qu’ils voient des « gagnants ».

Les marchés boursiers se redressent en Asie, dans les nouvelles technologies, la France à la traine

Le Nasdaq a pratiquement recouvré son niveau de janvier, évidemment grâce aux GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft). Ces valeurs ont gagné plus de 15% en moyenne sur l’année et le confinement, avec les livraisons à domicile, ne leur ont pas porté tort. Shanghai se redresse, avec le retour des salariés dans les entreprises, mais le frein là-bas vient des commandes d’Amérique et d’Europe, faibles. Le CAC est à la traine, avec moins de croissance et des perspectives moroses. L’incertitude pèse.


Pétrole surtout et matières premières : la plongée. L’Or toujours en avant.

Trop de pétrole, pas assez de baisses de la production ! C’est toujours l’idée des marchés, face à la chute de la demande (arrêt des usines, des transports, des voyages, des avions…) sachant que tous les lieux de stockages sont pleins. Pour les marchés, les signes de crise financière des pays pétroliers : déficits budgétaires, baisses ou tensions sur le change… (Arabie Saoudite ou Russie) n’importent pas. Il faut toujours produire moins car la demande va encore baisser un trimestre au moins, surtout l’on ne sait rien des nouveaux comportements de consommation.

En même temps, les prix des matières premières agricoles baissent. Le riz, en hausse avec des limites à l’export en Asie, semble se calmer. Dans ce contexte, avec une demande limitée du fait des baisses de revenus liées au chômage et aux inquiétudes, la crainte d’une inflation alimentaire paraît très peu vraisemblable.

Bons du Trésor : les actions de la Fed et de la BCE sont toujours efficaces, le cas italien inquiète

Pas de limite à la Fed (Banque Centrale Américaine) : lors de sa conférence de presse le 29 avril, son Président rappelle que son premier mandat est « la stabilité financière », autrement dit d’éviter l’effondrement du système américain, banques et bourses. Ainsi, le bilan de la Fed atteint aujourd’hui 30% du PIB américain, preuve si l’en est que ses achats de bons du trésor, des titres hypothécaires qui financent les logements, les commerces et centres commerciaux, plus son soutien accru aux banques « classiques » ne vont pas cesser. La Fed va aussi acheter des obligations risquées (high yield ETF), particulièrement secouées… puisque le financement de l’économie américaine repose pour 2/3 sur les marchés !

Pas de limite à la BCE (Banque Centrale Européenne) non plus : la pandémie force à aller plus loin, puisque le financement de la zone euro est le symétrique des États-Unis, avec 2/3 du financement venant des banques et 1/3 des marchés. Les conditions de refinancement de banques ne peuvent donc que baisser, pour les aider. Les taux sont à -1% désormais, pour des montants croissants. Ainsi, voilà que la BCE achète, sur le marché, des obligations publiques (surtout) et privées, au rythme de 115 milliards par mois jusqu’à la fin de l’année 2020, sans doute aussi (qui sait ?) pour aider les banques espagnoles et italiennes et leurs trésors nationaux. Son bilan égale désormais 40% du PIB de la zone. Et ce n’est pas fini : l’Italie a de gros besoins : -4,7% de croissance, un déficit qui va vers 10% du PIB, pas d’inflation… L’Allemagne est « le bon élève », avec un rendement du bon du trésor nominal à -0,6% et la France tire assez bien son épingle du jeu : rendement nominal à -0,1% et inflation à 0,4%. Ceci ne peut durer qu’autant que la BCE poursuit ses achats, sans doute hors des « limites prévues ». Mais la situation actuelle n’a pas été prévue !

Le dollar encore et toujours superstar

Le dollar est toujours le gagnant mondial, le yen montant un peu grâce à l’engagement de la Banque Centrale Japonaise de pratiquement « tout acheter » : obligations publiques, privées et même actions pour le soutenir ! Le franc suisse se stabilise, la Banque Nationale Suisse faisant, elle, tout, pour qu’il ne monte pas en vendant du franc contre du dollar et contre de l’euro !

L’euro, dans ce contexte, n’a pas à se plaindre puisqu’il ne cherche évidemment pas à monter par rapport au dollar. En revanche, on voit les interrogations sur la livre, les inquiétudes sur le rouble et surtout sur le réal. Avec en plus la crise du rand sud-africain, les BRICS sont très exposés.

Les marchés déglutissent les mauvaises nouvelles et s’attendent à un très mauvais deuxième trimestre. Ils regardent désormais la fin de l’année, les conditions du déconfinement, sachant que les Grandes Banques Centrales seront toujours là et que le FMI sera très sollicité.

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