Covid-19 : les mesures qu'il faudrait mettre en place pour limiter la propagation des nouveaux variants<!-- --> | Atlantico.fr
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Un centre de dépistage du Covid-19, à Manchester.
Un centre de dépistage du Covid-19, à Manchester.
©li SCARFF / AFP

Vade-mecum

Les mesures gouvernementales annoncées le 22 avril 2021 par le Premier ministre, notamment pour limiter l’émergence de nouveaux variants en France, risquent d'être insuffisantes.

Jean-Yves Le Goff

Jean-Yves Le Goff

Chirurgien digestif laparoscopique, pionnier mondial de la chirurgie laparoscopique et bariatrique, ancien chef de clinique-assistant et ancien interne des hôpitaux de Paris. Fondateur et Ancien Responsable de l’unité de chirurgie cœlioscopique à l’hôpital Bichat (1988-1997) Spécialiste de la chirurgie de l’obésité (legofftechnique), il exerce depuis 1997 à la Clinique du Trocadéro (Paris 16ème) et à l’Hôpital Privé de Seine Saint-Denis (Le Blanc Mesnil) depuis 2009. 

 

Sociétés savantes/Mandats/autres activité de représentation et d’organisation :  

- Membre de la Société française de la Chirurgie de l’Obésité

- Membre fondateur de la Fondation pour le développement de la chirurgie laparoscopique (FDCL) : 40 pionniers français et belges à l’origine de la chirurgie digestive Laparoscopique.1992 

-  Membre fondateur de l’European Association for Endoscopic Surgery and other Interventional Techniques (EAES). (1990)

-  Membre fondateur de la Société française de Chirurgie Endoscopique (SFCE). (1994) 

- Ancien Secrétaire Général Adjoint du Collège des Chirurgiens Français, Syndicat des chirurgiens Français (1990-1995)

- Ancien Président du Syndicat des Chefs de Clinique Assistants des Hôpitaux de Paris (1988-1990)

-  Ancien Secrétaire Général National des Chefs de Clinique des Villes de Faculté Assistants des Hôpitaux (1988 -1990)

- Organisateur du Congrès des Internes et Chefs de Clinique à Strasbourg. (1988)  : « L’Europe de la santé à l’horizon du grand marché européen de 1992 »

 

Voir la bio »

Étude des mesures gouvernementales annoncées le 22 avril 2021 lors de la conférence de presse du Premier Ministre, notamment pour limiter l’émergence de nouveaux variants et ce qu’il faudrait absolument faire pour être le plus efficace possible (partie 2)

Retrouvez la première partie de l'analyse du Dr Le Goff : Vaccins anti-Covid : quelle efficacité face aux nouveaux variants ?

Nécessité du séquençage génomique

Qu’il s’agisse du variant brésilien P.1 ou de tout autre variant préoccupant (Variant Of Concern) ou d’intérêt (Variant Of Interest), une chose est sûre : leur émergence au cours de ces derniers mois souligne plus encore l’importance de conduire une surveillance génomique, seul moyen de les identifier précocement.

Force est de constater (contrairement aux assertions du ministre de la Santé) que la France ne brille pas par ses capacités de séquençage génomique des souches circulantes de SARS-CoV-2. Elle est loin derrière le Royaume-Uni, les États-Unis, l’Australie, les Pays-Bas, l’Espagne, l’Inde, la Chine, la Belgique, le Danemark, le Canada, le Portugal et l’Islande, lorsqu’on considère le nombre de séquences déposées dans les bases de données génomiques. En effet, séquencer le variant britannique très largement majoritaire n’a que très peu d’intérêt.

C’est grâce à une véritable surveillance de séquençage qu’un grand foyer épidémique (cluster) a récemment été découvert au Canada en Colombie-Britannique par des virologues de l’hôpital Saint-Paul de Vancouver. Près de 900 infections au variant P.1 ont été détectées dans cette province, dont 200 dans la station de ski de Whistler. ((lien vers Article Atlantico Jean-Yves Le Goff du 24.04.21)

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Malheureusement, après des débuts encourageants début 2020 en France, le séquençage s’est arrêté presque aussi net : de tout l’été, il n’y a eu quasiment aucune contribution française à la base de données de GISAID (coalition internationale de chercheurs favorisant le partage des données). Aujourd’hui, plus de 500 000 génomes ont été partagés au niveau mondial. La France en a procuré à peu près 5 000 ; le Royaume-Uni, quarante fois plus, soit 200 000.

En effet, séquencer le variant britannique très largement majoritaire n’a que très peu d’intérêt et constitue une perte financière importante :40 000 séquençages depuis février selon le ministre de la Santé.

On ne fait que différencier le variant anglais des variants brésiliens et sud-africains (très préoccupants) qui sont englobés sans être séparés, rendant impossible une lecture, une analyse rapide et fine de l’émergence d’un des 2 mutants.

Ainsi le variant indien qui fait des ravages terribles en Inde, n’est pas pour l’instant discriminé sauf dans des laboratoires d’exception, rendant donc impossible toute cinétique fine de son augmentation et sa prépondérance dans l’épidémie.

De même les autres variants : breton, celui dit « Henri Mondor », l’Ecossais, le Californien, etc. ne sont pas du tout analysés de routine. Il est donc impossible de connaitre leurs virulences.

On ne peut savoir ainsi en France réellement ce qui se passe quant à l’émergence rapide d’un variant.

On est ainsi très en retard par rapport à beaucoup d’autres pays européens pour le séquençage.

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Ceci serait dû aux blocages du séquençage initié par les labos privés Cerballiance, Eurofins, etc. par des structures publiques (type Pasteur Paris et Centre National de Reference des virus infectieux du CHU de Lyon etc…), pour de possibles rivalités d’influences et pécuniaires et ceci au détriment de l’intérêt de la Nation pour juguler au mieux l’épidémie !

En exigeant un accord, un partenariat public privé, ceci pourrait permettre de faire ainsi 15 à 20 000 séquençages par semaine : ce qui serait d’un intérêt fondamental pour suivre au mieux l’épidémie, pour anticiper les actions et aussi en particulier pour tous les voyageurs arrivant en France des zones à risques en quatorzaine avec séquençage si PCR positive à J2 et J12.

Envisageons maintenant le problème des frontières hors UE, intra UE ainsi que la suspension des vols et la venue de ces passagers en provenance de ces zones à risques avec variant brésilien, sud-africain, indien et autres variants dangereux, identifiés au mieux par des séquençages performants et rapides.

Pour le variant Brésilien

Le variant brésilien B1 isolé dans trente-six pays :

À ce jour, outre le Brésil et le Japon, le variant P.1 a été isolé dans 34 autres pays (par ordre décroissant du nombre de séquences génétiques rapportées) : Italie, États-Unis, Belgique, Pays-Bas, Allemagne, France, Royaume-Uni, Espagne, Suisse, Portugal, Irlande, Japon, Suède, Turquie, Mexique, Australie, Nouvelle-Zélande, Jordanie, Luxembourg, Norvège, Roumanie, Singapour, Costa Rica, Aruba (Antilles néerlandaises), Iles Féroé, Corée du Sud, Slovénie, Saint-Martin (Caraïbes). En Amérique du Sud, il a été isolé au Chili, au Pérou, en Colombie, au Paraguay, en Équateur, en Guyane française et au Suriname. La semaine du 6 avril 2021, en Guyane, le variant brésilien représentait 76 % des prélèvements criblés et/ou séquencés (le variant anglais était, lui, présent à hauteur de 11 %).

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Il faut donc imposer une quarantaine de quatorze jours pour tous les passagers des vols non suspendus, dans des hôtels dédiés qui sont vides à Orly, Roissy et autres aéroports internationaux français et à leurs frais pour les étrangers, et pris en charge par la collectivité pour les Français, binationaux. Avec interdiction de sortie, surveillance très importante, amendes très dissuasives si mesures non respectées et expulsions pour les étrangers à leurs frais. Avec mise en place de PCR à J2 et J12, en raison de contaminations tardives (voir vol New Delhi - Hong Kong détaillé ci-après).

La quatorzaine ne prenant fin que si deux PCR sont négatives.

Il est paradoxal que les Français ne puissent aller d’une région à une autre (10 km),

avec couvre-feu et que des passagers hors UE ou intra UE puissent venir sur le territoire avec une déclaration sur l’honneur de confinement qui ne sera évidemment pas toujours respectée.

Il faut rétablir un certain contrôle aux frontières tant qu’il n’existe pas une même harmonisation des règles entre les pays de l’UE.

Alors que les vols sont suspendus entre la France avec le Brésil depuis le 13 avril, ce qui est très tardif et insuffisant, signalons que le Portugal les avait arrêtés depuis la mi-janvier 2021 !!

Des passagers venant de ces zones à risque peuvent venir en France du Brésil en passant par les Pays-Bas et la Belgique !

De même pour les PCR, d’arrivée sur le territoire, il faut exiger qu’elles soient couplées à des QR Code pour limiter les fraudes.

Les variants brésilien et sud-africain, jamais séparés dans le séquençage en France, sont toutefois majoritaires dans trois départements d'outre-mer proches de leurs pays d'origine. En Guyane qui a 760 km de frontières avec le Brésil ,84,9 % des cas sont dus à l'un des deux variants, 83,3 % à Mayotte et 65 % à La Réunion. Dans ces trois départements, ainsi qu'en Moselle 27% des cas

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Pour ces départements français, l’utilisation des eaux usées pour apprécier la concentration virale et sa cinétique, ainsi que les tests salivaires sont d’une grande utilité.

En ce qui concerne le variant Indien B.1.617, le fameux « double mutant », sa propagation à l'international semble déjà actée. Plusieurs cas ont déjà été recensés au Royaume-Uni, à Singapour, en Australie et aux États-Unis. Soulignons l’importance des mesures préventives et coercitives pour empêcher ce variant d’arriver sur le territoire français.

Il est inadmissible que très récemment que des étudiants indiens aient transité par Roissy venant d’Inde et rejoignant la Belgique en autocar avant d’être testés positifs à ce variant indien en Belgique.
Ils ont pu contaminer sur leur passage en France et en Belgique d’autant qu’un super contaminateur était présent dans le car.

Il faut donc appliquer les mêmes règles qu’annoncées, édictées ci-dessus. Signalons que la PCR de moins de 36 h est un progrès certain qui devrait être appliquée à tous les pays à risques.

Le coronavirus, la Covid-19, l’épidémie ne souffrent pas l’approximation, la non-rigueur, et l’à peu près, sinon les conséquences sont terribles.

Une quarantaine obligatoire à l’hôtel pour tous les passagers

  • Organisation de la logistique de la descente de l’avion à l’hôtel par les autorités en minimisant les risques de contamination ;

  • Aménagement spécifique des hôtels de quarantaine notamment pour s’assurer que la ventilation est suffisamment performante (mesures du CO2 en ppm et purificateurs d’air). Il y a eu des exemples de contaminations dans les hôtels de quarantaine en Océanie à cause de climatisation inadaptée ;

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  • Une durée minimale de 14 jours pour s’assurer de repérer toutes les contaminations, dont l’intérêt est confirmé par le vol New Delhi – Hong Kong ;

  • Un contrôle rigoureux de la quarantaine, si besoin en faisant garder les hôtels par les forces de l’ordre pour s’assurer que les passagers ne sortent pas de leur chambre ;

  • Une autorisation de sortie seulement après deux tests PCR négatifs ;

  • Un tracing numérique obligatoire via une application dédiée dans les 7 jours suivants pour suivre les contaminations résiduelles. Mais nous sommes encore trop laxistes par rapport à ce que font nos voisins européens comme le Royaume-Uni

Actuellement, il n’existe pas d’obligation d’aller dans un hôtel de quarantaine dédié alors que c’est l’option la plus sûre, car évitant un transport par définition risqué jusqu’au domicile, et plus facile à contrôler ;

La durée est seulement de 10 jours ce qui est beaucoup trop court comme le montre l’exemple de Hong-Kong (PCR positives à 12 jours !) ;

Le dispositif prévoit une restriction des horaires de sortie, ce qui est complètement absurde avec l’idée même de quarantaine. Quand on est positif, on doit s’isoler et ne jamais sortir avant la fin de la période de quarantaine !

Covid-19 : l’histoire du vol New Delhi Hong-Kong

47 passagers d’un vol pour Hong-Kong en provenance de New Delhi ont été testés positifs lors de leur quarantaine à l’hôtel, certains le douzième jour. Ils avaient tous un test négatif à l’embarquement. Des cas similaires ont été recensés en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Selon Christophe Daunique, pour ce vol, c’est la première fois qu’il y a autant de passagers contaminés à l’issue d’un seul vol. À titre de comparaison, un autre vol vers Hong-Kong en juin 2020 avait vu 27 passagers contaminés pour une capacité deux fois supérieure, soit au final un taux d’environ 7 %.

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Il est probable que quelques passagers n’aient pas été détectés, en raison des limites des tests PCR, et qu’ils sont à la source de contaminations dans l’avion.

Pendant le vol, des passagers ont pu être contaminés par d’autres passagers.

Théoriquement la cabine d’un avion est l’un des environnements les plus sûrs pour ne pas être contaminé pour deux raisons : Tout d’abord, l’air est constamment renouvelé avec un apport d’air extérieur et filtré, en moyenne toutes les deux à trois minutes donc les aérosols contaminants n’ont normalement pas le temps de s’accumuler dans l’habitacle.  Ensuite, le port obligatoire du masque doit normalement limiter également l’émission d’aérosols contaminants. En revanche, il y a un facteur de risque supplémentaire dans une cabine qui est la promiscuité.

Il se peut que l’aération de cet avion ne fût pas assez performante. Il est possible aussi que certains passagers porteurs du virus ont enlevé leur masque pendant un laps de temps trop long, pour se restaurer,

Hypothèse de contamination après vol en quarantaine

Les 22 passagers testés positifs lors du 12e jour de quarantaine laissent penser à Christophe Daunique que la majorité des contaminations n’a pas pu se faire lors du vol mais après celui-ci.

La contamination au sein de l’hôtel de quarantaine semble l’hypothèse la plus probable.

Au-delà de la quarantaine aux frontières, des efforts supplémentaires doivent être faits en amont pour sécuriser encore plus le transport aérien :

  • Sécurisation électronique de la délivrance des tests et des vaccins pour éviter les faux en papier qui pullulent.

  • Le gouvernement vient d’ailleurs d’annoncer une expérimentation allant en ce sens avec l’application TousAntiCovid ;

  • De plus il faut que les mouvements de voyageurs aériens soient davantage tracés et enregistrés afin notamment d’identifier les personnes passant par plusieurs pays, parfois pour échapper à des quarantaines obligatoires, et que les compagnies aériennes conservent les placements des passagers dans les avions pour retracer les contaminations, comme le souligne à juste titre Christophe Daunique

Les tests salivaires

Utilisation facile des tests salivaires à bas prix vendus aussi dans les grandes surfaces afin de multiplier ces tests plusieurs fois par semaine, ce qui va améliorer considérablement le dépistage.

De sensibilité légèrement moins forte que les tests PCR ou les auto-tests nasaux, leur répétition et le bas prix permettront un dépistage de masse.

Les lobbies à l’origine de l’interdiction de la vente en grandes surfaces doivent s’effacer devant l’intérêt général pour la Nation.

Rappelons que ces tests salivaires sont déjà utilisés de routine en Belgique et au Royaume Uni depuis août 2020 et juillet 2020 pour les Etats-Unis.

Par ailleurs la vaccination contre la COVID-19 doit être accélérée le plus possible en France.

Enfin terminons sur l’intérêt des vaccins à ARN messagers pour être efficaces contre les divers variants, Pfizer et Moderna ont déjà commencé d’ailleurs à intégrer une nouvelle génération de vaccins pour les variants sud-africain, brésilien depuis mars 2021 et peut-être indien.

Il faut que le gouvernement français et l’Europe fassent un forcing effréné pour obtenir ces vaccins de dernière génération auprès de Pfizer et Moderna, …, efficaces sur les différents variants et qui seront nécessaires le plus rapidement possible avant la fin de l’été.

Les mêmes erreurs commises pour l’obtention des vaccins de première génération ne doivent pas se répéter.

En conclusion, avec ces mésures beaucoup plus radicales et draconniennes, La France sera plus à même de lutter et de juguler l’épidémie du coronavirus, afin que l’économie française et une certaine normalité de vie repartent le plus vite possible.

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