Covid 19 : les destructions d’emplois seront d’autant plus sévères qu‘elles ne seront pas compensées par des créations d’emplois nouveaux<!-- --> | Atlantico.fr
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Les créations d'emplois ne compensent pas les destructions d’emplois liées aux confinements successifs.
Les créations d'emplois ne compensent pas les destructions d’emplois liées aux confinements successifs.
©PHILIPPE DESMAZES / AFP

Atlantico Business

Par manque de visibilité, le moral des chefs d'entreprise se dégrade à nouveau en mars. Et l'appareil de production français a continué de détruire des emplois en ce début d'année 2021. Parmi les secteurs les plus touchés : la banque et l'assurance arrivent en tête tandis que le digital se révèle comme un secteur moteur pour l’emploi.

Aude Kersulec

Aude Kersulec

Aude Kersulec est diplômée de l' ESSEC, spécialiste de la banque et des questions monétaires. Elle est chroniqueuse économique sur BFMTV Business.

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Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les créations d’emplois, nombreuses dans le digital depuis le debut de la pandémie, ne compensent pas les destructions d’emplois liées aux confinements successifs et aux incertitudes de la conjoncture.

La reprise économique n’est pas la même partout. Alors qu’aux Etats-Unis, le mois de mars était salué comme le meilleur mois depuis le début de la crise en matière de créations d’emplois (+1 million), l’Europe, et en particulier la France, n’avancent pas encore au même rythme. La dernière note de conjoncture Insee portant sur le premier trimestre marque un retard de l’activité par rapport à ce qu’on pouvait prévoir, compte tenu des perspectives de la crise sanitaire. Et c’est surtout l’emploi qui fait les frais des effets du Covid.

C’est très simple, alors qu’au début de l’année, le monde des affaires pensait pouvoir se redresser grâce aux effets des campagnes de vaccination annoncées, le mois de mars a changé de climat. Le secteur privé français s’est refroidi et a perdu 4 300 emplois, selon les résultats du Rapport National sur l’Emploi d’ADP.

Ce rapport mesure chaque mois la croissance de l’emploi salarié en France, hors agriculture. Il est réalisé à partir de statistiques d’effectifs déclarés chez les clients d’ADP, leader mondial de gestion du capital humain qui gère chaque mois plus de 3 millions de fiches de paie en France. Ce sont aussi ces rapports que l’on retrouve aux Etats-Unis et qui fournissent une indication du marché du travail américain ; qui recréé déjà des emplois dans les loisirs et la restauration.

En revanche, l’économie française continue de détruire des postes. Le solde net des emplois est négatif puisqu’il s’enfonce de 4000 pour le mois de mars 2021. Alors il y a du mieux, on est loin des chiffres de 2020, où au début de la crise, les suppressions d’emplois avaient régulièrement dépassé les 15 000 (-18 500 en avril 2020, -29 000 en mai 2020 et -15 000 en juin 2020) et encore une fois pendant l’automne et le deuxième confinement (-10 700 en novembre et -8 500 en décembre), mais cela indique que la tendance ne s’est pas encore inversée. Contrairement à ce qu’on espérait. L’économie française est toujours plus occupée à détruire des emplois et préserver les existants ; que d’en créer de nouveaux.

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Tous les secteurs ne sont pas logés à la même enseigne, et les services sont les plus touchés.

Plus précisément :

Les services financiers, bancaires et de l’assurance ont payé la plus grande part en perdant 2 113 emplois en mars, après une croissance de 44 postes en février. La France possède le plus important secteur bancaire en Europe continentale et un ralentissement est probable les mois prochains. Avec un recul des demandes de crédits, une augmentation des taux et des liquidations de petites et moyennes entreprises et un recul possible pour des produits d’assurance à long-terme. La banque est assaillie de toute part par de nouveaux concurrents, des Fintech, néo banques, qui sont plus innovants dans leurs services proposés et plus agiles au niveau des coûts. Cela devrait maintenant peser durablement sur le secteur.

A cause des nouvelles restrictions prises en mars, (télétravail, couvre-feu et confinement), le commerce de détail et de gros perd 566 emplois en mars, après en avoir regagné 178 en février. Le commerce se portait bien avant la crise et affichait des prévisions de création d’emploi positives. Dans la situation actuelle, il est difficile de prévoir le moment du redémarrage de la création d’emplois dans le secteur, mais tous les commerces n’ont pas pu faire appel au mécanisme de chômage partiel, qui demande une avance de trésorerie, d’où des licenciements sur cette période.

L’hôtellerie, la restauration, le tourisme et l’évènementiel sont évidemment les secteurs les plus sinistrés depuis mars de l’année dernière. Ceci dit, ce sont aussi les secteurs qui sont parmi les aidés Entre le fonds de solidarite qui répond aux défaillances d’activité et l’allocation de chômage partiel, les entreprises, les emplois et le pouvoir d’achat ont été préservés. Ce sont aussi les secteurs qui traditionnellement offrent beaucoup de petits boulots qui ont disparu avec des entreprises fragiles qui tenaient debout, grâce parfois au travail au noir. Difficile pour l’Etat d’aider officiellement des petits restaurants qui travaillaient au cash et payaient leur personnel de la même façon. Ces entreprises sont forcément à terre et leurs emplois ont disparu. Ceci explique aussi une partie du malaise des étudiants qui vivaient aussi de ces petits boulots.

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Enfin, les services professionnels, qui comprennent l'administration, les services aux entreprises perdent 661 postes en mars après en avoir gagné 548 en février.

Le secteur digital sort de cette galère comme le grand gagnant de l’année de confinements et de restrictions de vie. Depuis 10 ans, c’est déjà un des secteurs qui créé sans interruptions des emplois mais pendant la crise, selon Pole Emploi, l’emploi y a progressé deux fois et demi plus vite qu’avant, avec des professions comme les cadres informaticiens dont les recrutements ont bondi en 2020, avec des emplois majoritairement en CDI.

L’industrie se positionne aussi assez bien. L’emploi dans le secteur de l’industrie manufacturière continue de progresser, avec 469 emplois supplémentaires en mars après avoir déjà créé 1 091 postes en février. L’industrie agroalimentaire est celle qui a continué le plus de fonctionner pendant la crise, ce qui explique qu’au niveau géographique, certaines régions, dans l’Ouest et le centre, se démarquent grâce à leur forte activité et faibles suppressions d’emplois, quand d’autres régions, dépendantes du tourisme, sont encore dans le gros de la crise (Alpes, Côte d’Azur et Corse).

Le problème qui freine l’activité, donc les embauches, c’est l’incertitude qui domine la conjoncture à venir. Et cette incertitude est alimentée par un discours politique qui ne paraît pas très cohérent. Les indications sur le rythme des vaccinations, la stratégie de protection à mettre en place et les agendas de déconfinement, tout cela est encore très flou. Or, le chef d’entreprise pour se remettre en route, pour investir, embaucher et faire des projets, a besoin de visibilité.

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