Conspirateur du futur<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Conspirateur du futur
©

Bonnes nouvelles !

Atlantico publie quelques extraits de l'avant-propos du nouveau livre de Michel Godet "Bonnes Nouvelles des Conspirateurs du futur" qui sort demain 3 mars. L'économiste anti-conformiste propose une vision optimiste du futur de la France, à travers 14 petites histoires vraies de "conspirateurs du futur", des "hommes et des femmes de terrain qui au-delà de toute attente et souvent dans des conditions difficiles, ont su rebondir à partir d'eux-mêmes et d'initiatives innovantes et ambitieuses".

Michel Godet

Michel Godet

Michel Godet est économiste, professeur et membre de l'Académie des technologies.

Il est l'auteur de Le Courage du bon sens (Odile Jacob, 2009), Bonnes nouvelles des conspirateurs du futur (Odile Jacob, mars 2011), de La France des bonnes nouvelles (Odile Jacob, septembre 2012) et de Libérez l'emploi pour sauver les retraites (Odile Jacob, janvier 2014) Il anime également le site laprospective.fr.

Voir la bio »

(...)

Le pessimisme vis-à-vis de l’avenir, tout comme le rejet de l’économie de marché, font tous deux partie de l’exception française et ne datent pas de la crise de 2008-2010 (la plus sévère que l’on ait eue depuis 1929 !), mais remontent à plusieurs décennies. Cela fait vingt ans que, dans les enquêtes européennes, la moitié des Français déclarent avoir peur de tomber dans l’exclusion. Déjà, avant 1940, le général de Gaulle relevait : « Les Français sont des apôtres du déclin et des nostalgiques de la décadence. »

(...)

La croissance mondiale de la production et des échanges n’a jamais été aussi forte qu’entre 2002 et 2007. On a pu parler de nouvelle « Belle Époque » et, depuis la fin du XXe siècle, on peut avancer que nous avons connu une période de croissance et de développement (en Chine notamment, mais pas seulement) sans précédent dans l’histoire de l’humanité.

En 2011, la croissance est revenue à l’échelle mondiale, elle reprendra aussi en Europe, mais probablement de façon plus molle et inégale entre les pays en raison du vieillissement, de la saturation des marchés et des déficits publics à résorber pour retrouver une croissance plus saine. La mutation des rapports de force entre puissances est plus profonde que la crise financière. Comme l’a bien montré Hervé Juvin, c’est à un gigantesque « renversement du monde » que l’on assiste, où la Chine retrouve la place de première puissance économique mondiale qui était la sienne jusqu’au XVIIè siècle, où le prix du marché ne sera plus le dogme régissant tous les équilibres, où, finalement, le vieux monde doit se rendre compte qu’il n’est plus le modèle dominant[1].

(…)

Cependant, l’optimisme vis-à-vis de l’avenir reste justifié. Les Français oublient de mesurer le chemin parcouru au cours des dernières décennies, alors que le mot « crise » n’a cessé d’occuper les médias. Le niveau de vie par habitant a augmenté de 50 % depuis 1980 : les logements sans confort, qui représentaient plus du quart du parc total, comptent aujourd’hui pour moins de 4% du parc, la surface moyenne par personne (plus de 40 mètres carrés aujourd’hui) a presque doublé et nous avons gagné cinq années d’espérance de vie ! Si les contemporains de la guerre de 1914 revenaient parmi nous, ils nous diraient : « Vous pleurez la bouche pleine », car l’espérance de vie a augmenté de quarante-quatre ans depuis 1900 et le niveau de vie a décuplé !

J’invite ceux qui doutent du progrès et ne réduisent pas, à juste titre, le développement humain au seul indicateur du PIB par habitant, à méditer cette bonne nouvelle : en vingt ans, la qualité de vie des populations s’est améliorée à travers le monde si l’on tient compte aussi de l’espérance de vie et du taux d’alphabétisation[2].

 (…)

Bonnes Nouvelles n’est pas une fiction, mais d’abord un recueil de faits et d’actes d’hommes et de femmes de terrain qui, au-delà de toute attente et souvent dans des conditions difficiles, voire sans issue apparente, ont su ne pas se décourager et rebondir à partir d’un projet innovant et ambitieux. C’est parce qu’ils se sont battus qu’ils ont gagné. Il leur a fallu pour cela le temps long d’une – voire de deux – génération pour que la réalité dépasse le rêve. C’est malheureusement ce temps-là qui fait défaut aux politiques et encore plus aux médias soumis à l’impérialisme de l’immédiat et de l’éphémère. La réalité du terrain dépasse souvent la fiction des rêves et des projets qu’ils suscitent.

 (…)

Dans toutes ces histoires de projets réussis, on va retrouver des hommes imprégnés de valeurs essentielles comme la ténacité, la confiance, le travail et le plaisir des liens solidaires. Ces conspirateurs du futur ne se connaissent pas, mais ils vont, je l’espère, se reconnaître et donner aux autres l’envie de suivre leur exemple…….

 (…)

Toutes ces histoires ont en commun de témoigner d’hommes et de femmes qui ont su entreprendre et réussir leurs projets au-delà de toute vraisemblance et dans des conditions d’harmonie sociale où la force des valeurs et des liens familiaux (il y a souvent des fratries qui s’entraident) a permis de soulever des montagnes d’obstacles. La France d’en haut est souvent empêtrée dans ses rigidités et se plaint de la disparition de l’ascenseur social. Elle impose les charges excessives d’une société de l’assistance bureaucratique et des fonctions publiques territoriales pléthoriques[3]. Les entreprises doivent ainsi courir dans la compétition internationale avec des semelles de plomb. La France qui se reflète dans les médias va mal. Pendant ce temps-là, certains parmi les moins biens lotis se construisent des escaliers et accomplissent des miracles de développement. Il ne faudrait pas grand-chose pour enlever les bâtons qui entravent les roues de ceux qui ont des idées et prennent des initiatives. Il faudrait construire des ponts plutôt que des murs administratifs. Mais, pour cela, il faudrait aussi que ceux qui nous gouvernent retrouvent le sens de l’intérêt général et de l’altruisme qui consiste à servir avant de se servir.

Extraits de Bonnes Nouvelles des Conspirateurs du futur(Odile Jacob, 3 mars 2011) de Michel Godet

(les caractères en gras ont été ajoutés par Atlantico)



[1] Hervé Juvin, Le Renversement du monde, Paris, Gallimard, 2010.

[2]Cf. Le Monde du 5 novembre 2011 : « Vingt ans après la publication du premier rapport sur le développement humain (IDH), le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a publié jeudi l’édition 2010 qui fait le bilan de deux décennies de politique de développement et qui introduit de nouveaux indices de mesure, comme l’indice d’inégalité de genre… Le rapport démontre que la population aujourd’hui est en meilleure santé, plus riche et mieux éduquée qu’auparavant. Alors que toutes les tendances ne sont pas positives, il existe plus de pays qui ont amélioré la vie des populations, même dans des conditions difficiles. »

[3] La France compte en 2010 un million de fonctionnaires de plus qu’en 1980. À l’époque, elle n’était pourtant pas sous administrée. Cette augmentation est due pour l’essentiel à l’inflation des recrutements dans la fonction publique territoriale dont un récent livre de Zoé Shepard, Absolument dé-bor-dée ! (Albin Michel, 2010) a montré le gaspillage et l’utilité toute relative. Dans le même temps, la justice, la santé et la police manquent certainement d’effectifs opérationnels, surtout depuis la mise en place des 35 heures dont on n’a pas fini de payer les conséquences désastreuses pour la compétitivité du pays et le bon fonctionnement de ses services au public. La fonction publique territoriale a encore augmenté de 67 000 emplois en 2010 ! La vocation des services publics n’est pas de faire le bonheur de ses agents, mais d’assurer un service au public. Les sureffectifs et la mauvaise gestion engendrent des taux d’absentéisme régulièrement épinglés par la Cour des comptes : 22 jours par an en moyenne pour les collectivités territoriales ( contre 17 en 2001) et jusqu’à  26 jours dans la fonction publique hospitalière. Tant que l’on confondra service public avec statut public des agents qui le rendent, il y a peu de chances d’améliorer le système.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !