Comment la vie et les erreurs d’Edward VIII ont influencé les choix du prince Charles <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Histoire
Edward VIII, duc de Windsor, avec son épouse la duchesse Wallis de Windsor, à la gare Victoria de Londres, le 13 novembre 1956.
Edward VIII, duc de Windsor, avec son épouse la duchesse Wallis de Windsor, à la gare Victoria de Londres, le 13 novembre 1956.
©AFP

Bonnes feuilles

Philip Kyle a publié « Charles III » aux éditions Perrin. Charles est l'héritier direct de la couronne britannique à avoir attendu le plus longtemps son accession au trône. Aujourd'hui roi, qui est Charles III ? Comment sa vie publique et privée l'a-t-elle préparée à assumer la fonction de chef d'État du Royaume-Uni et de 14 autres pays, ainsi que de celle de chef du Commonwealth ? Extrait 1/2.

Philip Kyle

Philip Kyle

Philip Kyle est né en 1983 de parents britanniques émigrés en France. Éduqué en France et au Royaume-Uni, il est parfaitement bilingue. Pendant près de trois ans, il travailla pour la Fondation du Prince Charles, The Prince's Trust, où il s'occupait des relations avec la presse. Depuis, il a travaillé au service communication de la BBC, puis a dirigé celui de la chaîne d'information internationale Euronews. Avec Charles III, Philip Kyle signe sa première biographie.

Voir la bio »

Le prince Edward avait été un prince de Galles charismatique et populaire. Dans sa jeunesse, il était accueilli à l’étranger, comme dans son pays, avec enthousiasme. Il développa une fibre sociale assez marquée, se préoccupant notamment de la situation des mineurs au pays de Galles et de celle des chômeurs pendant la Grande Dépression. Il fut également un bon gestionnaire du duché de Cornouailles, où il initia des projets d’agriculture fondés sur les principes de la coopérative. Ses engagements irritaient la classe politique et sa vie privée inquiétait. Son statut, son charme et sa beauté physique firent dire à l’icône de la mode Diana Vreeland que toutes les femmes de sa génération étaient amoureuses de lui. Habitué des lieux à la mode de la vie nocturne londonienne, il multipliait les conquêtes féminines et ne voulait pas entendre parler de mariage, au grand dam de ses parents.

Puis, un jour de 1930, il rencontra l’Américaine Wallis Simpson qui avait été une première fois divorcée, et qui était alors encore l’épouse d’Ernest Simpson. La liaison entre Edward et Wallis inquiéta non seulement ses parents, mais également de plus en plus les responsables politiques du pays à mesure que la santé du roi George  V déclinait. De sorte qu’en janvier 1936, le directeur de cabinet du prince et le secrétaire privé du roi se liguèrent pour rédiger une sorte d’ultimatum confié au Premier ministre, Stanley Baldwin, et au leader de l’opposition, Ramsay MacDonald, qui, à leur tour, le remirent au prince. En substance, la note lui intimait de se ressaisir et d’incarner les valeurs traditionnelles afin de ne pas frustrer la confiance du peuple et de ne pas mettre en péril la Couronne et l’Empire. Le prince dut faire face à des dirigeants politiques et à des courtisans qui avaient alors une vision étriquée de la monarchie. Il était en avance sur son temps et il en fit les frais.

Quelques jours plus tard, à la fin du mois de janvier, George V mourut et Edward monta sur le trône. Il ne régna que onze mois et n’eut même pas le temps d’être couronné. Le 11 décembre 1936, il abdiqua en faveur de son frère, lorsque le gouvernement refusa qu’il épouse Wallis, désormais divorcée. Six mois plus tard, leurs noces furent célébrées au château de Candé, au sud de Tours. Aucun des membres de la famille royale n’était présent. Les désormais duc et duchesse de Windsor vécurent un temps en France, avant qu’Edward ne se vît confier la charge de gouverneur général des Bahamas pendant la Seconde Guerre mondiale. Il tenta ensuite d’obtenir un poste diplomatique, sans succès. S’ensuivit pour le couple une vie contrainte d’oisiveté à Paris qui perdura jusqu’à leur mort.

Comme son grand-oncle, Charles avait très tôt développé une empathie pour les milieux populaires qui allait se confirmer dans ses engagements futurs, notamment en faveur des jeunes défavorisés et des quartiers déshérités. Comme Edward, il lui arriva d’irriter le gouvernement et les courtisans par son action, et il fit craindre des bouleversements constitutionnels en raison des tumultes de sa vie privée. Il ne possédait toutefois pas la même assurance que son auguste aîné et sut courber l’échine lorsque le devoir l’exigea.

Toujours est-il qu’en en apprenant plus sur l’« oncle David », Charles fut sensible à sa situation. Magnanime, il avança : « Alors qu’il prend de l’âge, il doit avoir très envie de revenir, et il semble insensé de poursuivre la querelle… au-delà de cela, il serait intéressant de voir comment elle est… il vaut la peine d’apprendre à connaître son bon côté. » Il concéda toutefois qu’il était plus facile pour lui de s’exprimer ainsi, n’ayant pas été témoin des événements de 1936 et des tensions qui s’ensuivirent. Sa grand-mère la reine Elizabeth avait la rancune particulièrement tenace, et lorsque Charles l’approcha pour évoquer une possible réconciliation, elle lui offrit une fin de non-recevoir.

Le prince de Galles n’en fut pas pour autant découragé, et il correspondit un temps avec le duc. Alors qu’il était de passage à Paris en ce mois d’octobre  1970, il décida même de le voir –  une visite historique marquant la première rencontre entre deux princes de Galles qui n’étaient pas père et fils. L’entrevue fut facilitée par sir Christopher Soames, gendre de Winston Churchill, qui était à l’époque ambassadeur du Royaume-Uni à Paris. En arrivant à la villa Windsor, Charles fut surpris d’interrompre une fête. La duchesse de Windsor recevait des convives américains, « les plus épouvantables qu’[il ait] jamais rencontrés », dira Charles avec emphase.

Il fut alors conduit auprès de l’ex-roi, âgé de soixante-seize ans, dont la santé déclinait. Si le duc avait un œil fermé en raison d’une récente opération de la cataracte, était courbé et se servait d’une canne, Charles le trouva « en très grande forme », écrivant plus tard dans son journal intime qu’il était « d’une humeur très loquace et faisait de larges gestes en permanence, tout en tenant un énorme cigare ». Lors de leur entretien, qui dura environ quarante-cinq minutes, Edward lui parla de son enfance et des relations difficiles qu’il entretenait avec ses parents, et de l’aversion qui en résulta pour les traditions et les personnes âgées. Au cours de la conversation, Charles lui demanda s’il souhaitait revenir au Royaume-Uni. Le vieil oncle répondit qu’il aimerait y passer les dernières années  de sa vie, mais avec prudence et sans doute une pointe d’amertume il fit remarquer que personne ne le reconnaîtrait.

Extrait du livre de Philip Kyle, « Charles III », publié aux éditions Perrin

Liens vers la boutique : cliquez ICI et ICI

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !