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Emmanuel Macron lors du lancement de l'"Accélérateur PME" à la Banque publique d'investissement (BPI), le 5 mars 2015.
Emmanuel Macron lors du lancement de l'"Accélérateur PME" à la Banque publique d'investissement (BPI), le 5 mars 2015.
©ÉRIC PIERMONT / AFP

Actionnariat salarié

La France compte beaucoup de PME mais contrairement à l’Allemagne, elles sont moins nombreuses. Améliorer le modèle des SCOP en s’inspirant du dispositif de l’ESOP serait un excellent moyen de renforcer notre tissu économique.

Clément Perrin

Clément Perrin

Clément Perrin est directeur adjoint du Millénaire. 

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Pierre-Henri Picard

Pierre-Henri Picard

Pierre-Henri Picard est secrétaire général adjoint du Millénaire, think-tank gaulliste spécialisé en politiques publiques.

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Présentée comme un « accélérateur de tendances », la pandémie n’a finalement que très peu changé la donne en termes de partage de la valeur au sein des entreprises. Le « nouveau monde » tant vanté durant les confinements successifs tarde à émerger. Un écueil qui doit pourtant être contourné rapidement au regard des défis à venir concernant la transmission de PME, et ce, alors que de nombreux dispositifs d’actionnariat salarié existent.

Régulièrement défini comme étant le meilleur modèle économique pour associer les salariés au partage de la valeur et à la gouvernance de leur entreprise, le « shared capitalism » est une composante importante de l’histoire économique des Etats-Unis, qui figurent parmi les pionniers en la matière. En France, si la loi PACTE a permis de replacer ce sujet dans les débats au Parlement, force est de constater cependant que les dispositifs visant un partage plus équitable au sein des entreprises restent encore confidentiels au sein de notre tissu de PME.

Élargir l’actionnariat salarié

Dès 1967 pourtant, le Général de Gaulle énonçait qu’il fallait que, « dans les entreprises, la participation directe du personnel au résultat, au capital et aux responsabilités devienne une des données de base de l’économie française ».

Un demi-siècle plus tard, l’actionnariat salarié apparaît comme un dispositif bien développé en France. A la faveur de plusieurs lois encourageant sa mise en place et son approfondissement, il concerne aujourd’hui 3 millions d’actionnaires-salariés. Un chiffre qui ne doit néanmoins pas faire oublier que seules 4 % des PME ont mis en œuvre ce mécanisme, contre 74 % pour les entreprises cotées.

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Aussi, avec le départ à la retraite de nombreux patrons de PME – grossièrement, la génération des baby-boomers -, se pose la question du devenir du tissu des petites et moyennes entreprises françaises. Pour rappel, près d'une PME sur trois ne survit pas au départ du dirigeant-actionnaire principal. On rappellera d’ailleurs ici qu’une étude menée par l'Observatoire national de l'entrepreneuriat familial pointait en 2019, que près de 89 % des entreprises sondées n'avaient pas de plan de transmission ou de succession formalisé.

Méconnues, les sociétés coopératives de production (SCOP) offrent pourtant un modèle inspirant en termes de cession. Avec une gouvernance démocratique et collective, les salariés sont associés majoritaires de la société et possèdent donc au minimum 51 % du capital social. Pourtant ce modèle est encore majoritairement perçu comme adapté aux sauvetages in extremis, et donc à rebours d’une succession saine visant la pérennité de l’entreprise. Un comble quand on sait que ce mécanisme se rapproche le plus du système américain des « Employee Stock Ownership Plan » (ESOP) qui vise, entre autres, à faciliter la transmission d’une entreprise de dirigeants vieillissants à leurs employés. Outil important de financement bancaire des PME aux Etats-Unis, ce système est construit comme une forme d’épargne retraite sur du très long terme, les employés recevant des droits sur les actions de l’entreprise année après année.

Quelles solutions en tirer pour la France ?

En France, si les SCOP permettent aux salariés d’être des associés majoritaires et de mutualiser équitablement les risques et les grandes décisions stratégiques, leur statut juridique ne garantit en revanche aucun mécanisme avancé de financement pour faciliter la reprise d’une entreprise. D’ailleurs, aujourd’hui, 65 % des SCOP sont créées ex-nihilo, et seulement 9 % sont des reprises par les employés d’entreprises en difficulté. Leur poids est par ailleurs loin d’être comparable : on dénombre moins de 3 500 SCOP en France, contre plus de 10 000 entreprises ESOP aux Etats-Unis.

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Le dispositif n'est donc pas encore à une échelle suffisante pour faire face au double défi de l'actionnariat salarié dans les PME, et de la transmission d’une entreprise à ses salariés.

Si le passage de témoin de sa propre entreprise est toujours un moment délicat dans la vie d’un dirigeant d’entreprise, cela vaut également pour les salariés (nouveau style de management, nouvelles méthodes de travail etc.). Une simplification de la réglementation du passage de PME à SCOP apparaît donc nécessaire afin d’assurer un accompagnement avec un discours évolutif sur les valeurs coopératives. Le financement de cette opération se doit également d’évoluer en le facilitant via la création de holdings de salariés en vue d'une reprise par LBO de leur propre entreprise, qu'elle soit en bonne santé ou en difficulté. Sous certaines conditions, des fonds publics pourraient par ailleurs être alloués pour aider les salariés à rassembler la somme nécessaire à l'amorçage du LBO.

La France compte beaucoup de PME, y compris familiales, mais contrairement à l’Allemagne, elles sont moins nombreuses, plus petites et concentrées sur des marchés locaux. Améliorer le modèle des SCOP en s’inspirant du dispositif de l’ESOP serait un excellent moyen de renforcer notre tissu économique composé de PME afin de les tourner vers l’international, et en leur garantissant une pérennité dans le temps avec une transmission assurée. Au regard des défis de transmission qui se posent, le sujet mérite d’être posé durant la présidentielle. Surtout lorsque l’on sait que les PME représentent 99,8 % des entreprises en France.

Pierre-Henri Picard, secrétaire générale adjoint du Millénaire, think-tank gaulliste spécialisé en politiques publiques

Clément Perrin, directeur adjoint du Millénaire

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