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Eric Zemmour, sur le plateau de BFMTV, lors de son débat avec Jean-Luc Mélenchon, le leader de La France Insoumise.
Eric Zemmour, sur le plateau de BFMTV, lors de son débat avec Jean-Luc Mélenchon, le leader de La France Insoumise.
©BERTRAND GUAY / PISCINE / AFP

Institut Ethique et Politique Montalembert

A près de six mois de l’élection présidentielle, deux constats viennent troubler la campagne électorale : le surgissement d’Eric Zemmour et l’effondrement d’Anne Hidalgo. A son tour, l’Institut Ethique et Politique Montalembert propose son analyse politique.

Ludovic Trolle

Ludovic Trolle

Ludovic Trolle est président de l'IEPM (Institut Ethique et Politique Montalembert).

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À un peu plus de six mois de l’élection présidentielle, deux phénomènes majeurs viennent troubler la pré-campagne: le surgissement d’Éric Zemmour et l’effondrement d’Anne Hidalgo.

Un syndrome ou un symptôme pour les uns, une fabrication médiatique pour les autres, le phénomène Eric ZEMMOUR semble à l’évidence décrire quelque chose de plus complexe que cela.

On sait qu’une élection, c’est l’histoire d’une rencontre entre un candidat, un projet et un peuple qui se mobilise. Et ce qui se passe autour d’Éric ZEMMOUR doit nous interpeller car c’est la possible convergence des trois, pourquoi ?  

Ceux qui réfléchissent un tant soit peu s’accordent sur le fait que le monde, notre monde à nous, c’est-à-dire l’Occident, est au plus mal et que les crises qui le secouent ne cessent de se multiplier tout en s’aggravant et la pandémie n’est que la dernière démonstration. Une sourde angoisse nous étreint ; de fil en aiguille nous succombons facilement au reflex de « l’autruche », ce qui apaise quelque peu nos douloureuses interrogations, tout au moins passagèrement. Certains, d’une nature moins affaissée, c’est-à-dire plus entière, entrent même en dissidence, persuadés qu’ils ont à faire œuvre utile, c’est le cas de l’essayiste, polémiste et chroniqueur Éric ZEMMOUR. On voudrait bien qu’une renaissance politique soit en marche, mais il ne se passe rien, sinon le morne défilement de jours gris tendant à s’assombrir. Sommes-nous donc désormais condamnés à la résignation, nous si intelligents, si perspicaces, si modernes ? Et le temps continue à s’écouler. Chaque jour qui passe, nous révèle de nouveaux scandales, de nouvelles indignités, un retour à la barbarie, une démocratie altérée, nous rapprochant d’une horreur dont nous commençons plus ou moins consciemment à distinguer les contours.

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Du polémiste au candidat

L’insécurité, qu’elle soit physique, matérielle, morale ou culturelle, est devenue une réalité car c’est maintenant une expérience que vivent la plupart des français dans l’espace publique, à l’école, dans l’entreprise, dans tous les rapports…  Cette marche vers la catastrophe est-elle due à la fatalité du nihilisme ? N’y-a-t-il donc rien à faire pour conjurer le sort funeste qui nous attend ? Dans les contingences actuelles, en nous appuyant sur nos schémas de réflexion et sur les modes d’analyse que nous possédons, la réponse semble négative. Il n’y a pas de solution, aucune alternative ; nous aurons bientôt droit aux grandes tribulations ?

Comme rien ne semble être pris en compte depuis 30 ans et qu’aucune autorité politique ne semble vouloir agir car enfermée dans son idéologie, il est devenu nécessaire pour les acteurs de terrain notamment ceux confrontés aux enjeux majeurs de sécurité (militaires, policiers, magistrats, etc…) d’alerter l’opinion publique. Ce qui manque clairement ce ne sont pas uniquement des moyens mais une véritable volonté politique de transformation. 

L’absence de volonté politique face à l’insécurité globale, c’est ce que nous pouvons présenter comme l’expérience du délitement et c’est précisément ce sur quoi Eric ZEMMOUR pointe le doigt. Il excelle, dans ses écrits et chroniques, à mettre en lumière ce problème.

Une alternative à l’idéologie dominante

Si on observe bien la situation politique, tous les candidats, tous les partis politiques s’accordent sur une chose, leur appartenance consciente ou inconsciente à l’idéologie dominante. Selon leur degré, ils sont chacun les différentes facettes d’une même pierre. La gauche rouge ou verte, le centre orange ou encore la droite bleu clair ou foncé, témoigne du même opportunisme politique, une compromission avec cette forme de relativisme qui voudrait que tout se vaut, tout se construit (et se déconstruit) et rien ne dure. Une politique liquide, une idée de progrès porté par un individualisme généralisé. En cela Emmanuel MACRON est bien le candidat qui en serait la synthèse.

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Et de gauche et de droite, il n’y a plus de différence, le «wokisme» ou se mélangent toutes les couleurs politiques comme la « cancel culture », totalement assumés par certain et qui est propagés par les autres malgré ce qu’il veulent nous faire croire. Toute la classe politique en France, en Europe et partout en occident participe à la logique de dissolution.

Tous les leaders politiques ont fait du mot « courage » un argument de communication politique. Le courage est devenu une espèce d’idole médiatique, tout le monde s’en réclame avec des discours du type : « moi j’ose la rupture », « moi, je dis ce que les autres n’osent pas dire », etc. Malheureusement, dans les faits, la plupart des hommes politiques ces trente dernières années n’ont rien su démontrer. Ce sont des personnages sans convictions qui ont vidé la notion de courage de sa substance. La politique, c’est le règne du contentement de soi, dans lequel plaire et divertir sont devenus le plus sûr moyen de ne pas assumer le pouvoir.

Tout le monde parle de redressement, de relance ! Tous les présidents depuis 30 ans en ont parlé et aujourd’hui tous les candidats à l’élection présidentielle ne manqueront pas de reprendre ce discours. Y a-t-il quelqu’un qui va vraiment engager une démarche qui permettra de passer de l’intention à l’action car l’état de la situation, aujourd’hui, l’exige.

Face aux dangers qui menacent notre société, on ne peut plus nommer ses ennemis car pas d’amalgames…Il n’y a plus de courage politique. Et comme le dit si bien Christine KELLY : « Recul de l’autorité, recul de la justice, recul du débat, recul de la tolérance. Mais la nature a horreur du vide ». Et Eric ZEMMOUR a su le remplir …

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Misère du « fact-checking »

Il faut bien reconnaitre que seul Eric ZEMMOUR, dans la campagne qui démarre, semble porter une voix discordante, en rupture avec cette idéologie dominante et ses différents lobbies qui la soutiennent. Il incarne une forme d’alternative politique avec un courage évident et c’est bien cela qui séduit une partie des français.

Les français dans l’attente : un peuple prêt à se mobiliser

Après ce dernier confinement, les difficultés auxquelles nous devons faire face, qu’elles soient personnelles (précarité, perte d’emploi, maladie, fragilité humaine, trouble existentiel, mal provoqué ou subi) ou collectives (crise économique, malaise social, confusion politique, incertitude internationale, perte de libertés) sont si imposantes que nous pourrions finir par nous résigner à ne plus rien attendre. A continuer à nous abstenir dans le vote.

Pourtant, jamais comme en ces circonstances, les mots de DANTE – qui nous reviennent en tête- ne se sont révélés aussi évidents : « Chacun confusément conçoit un bien ou l’âme se repose et le désire ; et chacun s’efforce à l’atteindre ». Mais quelle loyauté chacun de nous doit avoir pour reconnaitre cette attente et ce désir de bien !

Et ce qui rend cette reconnaissance plus difficile, c’est cette clameur sociale que les français ont trop longtemps concouru à engendrer par leur passivité complice.

En fait, « tout est unanime à nous passer sous silence, moitié comme une honte peut-être, moitié comme une indicible espérance » (RILKE).

Chacun de nous sait très bien dans quelle mesure il contribue à cette situation inconfortable.

Qui l’emporte ? Notre côté qui attend ou celui qui se contente ?

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Pourquoi continuons-nous à attendre même dans les situations les plus désespérées ?

Pourquoi aucun échec personnel ou aucune crise historique n’ont-ils réussi à supprimer de chaque fibre de l’être humain cette lueur, même inconsciente, d’une attente ? Pourquoi cette attente se révèle encore profondément en chaque français ? Même si le cœur est réduit, bouleversé et pris en otage, il ne cesse de désirer ce bien commun auquel il aspire. Et dans le contexte électoral pour la prochaine présidentielle de nombreux abstentionnistes se surprennent à rechercher à nouveau un candidat qui saura les mobiliser.

C’est ce que Eric ZEMMOUR a compris. Il a perçu chez les français, qu’il rencontre depuis 20 ans, cette attente et il a écrit son dernier livre : « La France n’a pas dit son dernier mot » pour les inviter aujourd’hui à une forme de renaissance politique. C’est ce qui se joue dans son tour de France actuel avec « La croisée des chemins », il ne fait pas que de dédicacer un livre, il est parti à la rencontre des français pour répondre à leurs questions et à leurs attentes, qui légitimement en retour s’interrogent et se convainquent de la possibilité, aujourd’hui, d’une candidature d’Éric ZEMMOUR. Beaucoup font une erreur fondamentale : ils sont persuadés qu’il surfe sur la peur mais c’est tout le contraire : il donne de l’espoir à des millions de gens…Il est clairement passé de la posture d’observateur chroniqueur à celle d’acteur politique. Il n’est pas encore candidat, il gère pour l’instant sa trajectoire avec beaucoup d’intelligence, le moment où il lancera sa candidature sera une étape déterminante qu’il ne doit pas manquer, beaucoup d’autres l’ont négligé.

L’élection présidentielle est donc loin d’être jouée. Cette campagne reste très ouverte et mérite qu’on s’y intéresse. 

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