Comment adapter la Charte des langues régionales sans creuser davantage les fractures de la société française <!-- --> | Atlantico.fr
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L’État français s'apprête à ratifier la Charte européennes des langues régionales.
L’État français s'apprête à ratifier la Charte européennes des langues régionales.
©Reuters

Do you speak breton ?

Quinze ans après l'avoir signée, l’État français s'apprête à ratifier la Charte européennes des langues régionales. Un changement qui amène à réviser la Constitution, qui dispose que "la langue de la République est le français".

Vincent  Laborderie

Vincent Laborderie

Vincent Laborderie est chercheur à l'Université Catholique de Louvain, ses recherches sont particulièrement concentrées sur les conditions de reconnaissance d'un État, les processus menant à l'indépendance et l'évolution du fédéralisme belge. 

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Atlantico : Quinze ans après avoir signé la Charte européenne des langues régionales, sa ratification est débattue à l'Assemblée nationale. Toutefois, cette mise en œuvre requiert une adaptation de la constitution qui stipule aujourd'hui en son article 2 "la langue de la République est le français". Y a-t-il réellement au sein de la société française une demande sur cette question des langues régionales ? Si oui, comment l'interpréter ?

Vincent Laborderie : Il y a effectivement une demande, même si celle-ci ne provient pas d'une majorité de la population. Elle vient de régions où la langue est encore vivante (Alsace, Pays Basque, Bretagne par exemple) ou de groupes plus restreint de militants motivés. Il ne faut pas oublier par ailleurs les langues de territoires d'outre-mer. Il s'agit le plus souvent d'afficher une culture particulière. Mais dans l'immense majorité des cas, cette culture n'est pas vécue comme étant en contradiction avec la culture française.

Alors que la société française semble de plus en plus fracturée, est-ce vraiment le moment de ratifier la charte ? Le fait de l'adapter ne va-t-il pas creuser davantage les fractures de la société française ?

Je ne le pense pas. Les fractures que connait la société française ne concernent pas les fractures régionales, ou qui pourraient correspondre aux langues régionales. Il s'agit davantage de fractures entre catégories sociales ou de fractures politiques. Les fractures géographiques qui existent sont davantage entre territoires urbains, péri-urbains, et campagnes. Les fractures entre les régions sont très loin d'être les plus importantes.

La pratique – qui plus est constitutionnelle – des langues régionales ne risque-t-elle pas de développer le communautarisme ?

Le risque est faible car ces langues sont toujours parlées en plus du Français. Même si la pratique de ces langues progresse (ce qui est loin d'être sûr), je ne pense pas que l'on voie émerger des communautés qui parleraient uniquement une langue régionale ou qui refuserait de parler Français.

Alors que les enfants ont de plus en plus de problèmes avec le français, ne serait-il pas plus pertinent de se concentrer sur leur langue nationale que de leur apprendre une deuxième langue régionale et prendre ainsi le risque qu'ils ne maîtrisent parfaitement aucune des deux langues ?

Toutes les études montrent qu'apprendre deux langues à la fois n'est pas source de problème d'apprentissage pour la langue principale. Le problème peut cependant se poser pour un enfant dont le français n'est pas la langue maternelle et qui apprendrait donc deux langues "étrangères" à la fois. Dans tous les autres cas c'est plutôt bénéfique : l'enfant apprend à jongler entre deux langues et a ensuite plus de facilités pour en apprendre d'autres. Il n'y a pas ce blocage initial à apprendre une autre langue qu'ont certains Français. Surtout, certaines langues régionales (alsacien, occitan, flamand) sont assez proches de langues de pays voisins. Il est donc assez facile ensuite d'apprendre cette langue.

Propos recueillis par Marianne Murat

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