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Cette énorme source d’économies à laquelle la Cour des comptes ne pense jamais : s’autodissoudre, puisque personne ne suit ses recommandations
©Reuters

Libérons les énergies

Ce mercredi 10 février, la Cour des Comptes a rendu son rapport annuel. Comme régulièrement, elle souligne plus d'un exemple de mauvaise gestion et met en avant plusieurs idées pour lutter contre les dépenses malavisées... Sans jamais penser à une auto-dissolution.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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La Cour des Comptes a rendu hier son rapport annuel, qui est à la fois son exercice obligé et le marronnier toujours efficace de la presse. Les amateurs de littérature économique y liront avec plaisir quelques chapitres bien ciblés qui sont autant d'assassinats en règle visant des institutions publiques avec lesquelles chacun est plus ou moins familier. Mais, comme chaque année, la même question se pose: à quoi servent les rapports de la Cour des Comptes? 

La Cour des Comptes, ou l'insoutenable légèreté de l'Etat

On ne trahit pas de secret en révélant que, en dehors de son pouvoir disciplinaire (qui lui permet de prendre de lourdes sanctions contre les comptables publics), la Cour des Comptes influence la vie administrative avec le même impact qu'une mouche autour d'un coche. Dans les services, quand tombe la fameuse lettre de la Cour des Comptes posant des questions, quand arrive le jeune conseiller flanqué de ses vérificateurs, les fonctionnaires qui se savent dans le collimateur toussent, tapent des doigts sur leur buvard, et attendent patiemment que l'exercice se termine.

Que risquent-ils au fond? Une fugace mise sur la touche dans le pire des cas. Mais, quand l'un d'eux tombe, un collègue sort de l'ombre à sa place, et la technostructure reprend ses droits. Depuis que la Cour des Comptes dénonce la gabegie des administrations et des institutions publiques, celle-ci ne cesse de s'accroître, de proliférer, aussi rapidement que la dette publique. Avec malice, les observateurs pourraient d'ailleurs analyser la corrélation mathématique entre les remarques de la Cour et l'endettement de l'Etat.

A ce jeu, Didier Migaud mérite d'ailleurs une médaille. Jamais la République n'avait connu un Premier Président aussi mordant, aussi attaché à l'orthodoxie budgétaire, et aussi impuissant face à la dégradation des comptes publics. Depuis son arrivée rue Cambon, en 2010, la dette publique a augmenté de 50%, soit plus de 700 milliards d'euros. Si Didier Migaud n'en est pas le responsable, il ne peut en tout cas s'attribuer le mérite d'avoir endigué le phénomène!

Ce sombre constat montre bien, à lui seul, l'inutilité profonde de la Cour des Comptes, qui ressemble plus à une danseuse impertinente de la République qu'à une instance de contrôle efficace de la dépense publique. 

Une France sans la Cour des Comptes ?

D'une certaine façon, le véritable exercice vertueux pour Didier Migaud consisterait à sortir de ce rôle de complice ou de caution d'un système dépensier dont il est le bouffon officiel, en demandant la dissolution de la Cour qu'il préside. Après tout, celle-ci coûte plus de 200 millions d'euros chaque année, et il est à parier que sa disparition aurait un double impact positif sur les finances publiques.

Le premier impact positif serait de permettre la réallocation immédiate de 200 millions d'euros dans des politiques publiques utiles. Peut-être même le gouvernement pourrait-il faire le choix d'intégrer cette suppression à la baisse des dépenses qu'il prétend réussir et dont on se demande parfois quelle sera la taille de souris qui accouchera de cette montagne politique. 

Le deuxième impact, bien plus profond et durable, serait d'obliger les administrations publiques à faire leur la maîtrise des dépenses publiques. Selon un principe éternel de déresponsabilisation, l'existence d'une Cour des Comptes joue en effet un rôle très ambigu dans la culture de la modération. Comme il existe un opérateur en charge de la maîtrise des dépenses (en l'espèce ce grand service d'audit qu'est la Cour), les autres services de l'Etat considèrent qu'ils n'ont guère à se préoccuper du sujet. 

Un bon exemple de cette incurie est donné par la gestion des enseignants. Durant l'été 2013, la Cour avait formulé des recommandations très précises sur l'amélioration de cette fonction sensible qui touche tout de même un million de fonctionnaires. Le rapport, au demeurant prudent mais bien fait, est resté lettre morte et... le secrétaire général du ministère de l'époque, qui avait rangé précieusement le document de la Cour sous une armoire branlante, afin d'éviter qu'elle s'effondrât, est devenu, depuis cette époque, magistrat... à la Cour des Comptes. 

Pour un peu, les fiscalistes parleraient ici d'une fraude carrousel.

Il n'en demeure pas moins que l'existence de la Cour n'a guère contribué à la culture de la rationalité dans les services publics et que sa suppression aurait au moins le mérite d'acter cet étrange phénomène...

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