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Ces solutions locales qui ont déjà fait leurs preuves pour en finir avec le chômage
©Reuters

Sous nos yeux

Les armes de la lutte contre le chômage ne se trouvent pas toutes entre les mains du gouvernement national. Bon nombre de mesures qui marchent ont été mises en place, peut-être juste à côté de chez vous. Rencontre avec Michel Godet, qui anime le Grand Prix des bonnes nouvelles du territoire, qui vise à promouvoir des solutions abordables, souples et pleines d'enseignements dans la lutte contre le sous-emploi

Michel Godet

Michel Godet

Michel Godet est économiste, professeur et membre de l'Académie des technologies.

Il est l'auteur de Le Courage du bon sens (Odile Jacob, 2009), Bonnes nouvelles des conspirateurs du futur (Odile Jacob, mars 2011), de La France des bonnes nouvelles (Odile Jacob, septembre 2012) et de Libérez l'emploi pour sauver les retraites (Odile Jacob, janvier 2014) Il anime également le site laprospective.fr.

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Atlantico : L'édition 2014 du Grand Prix des bonnes nouvelles du territoire recueille actuellement des projets à travers tout l'Hexagone jusqu'au 15 avril pour promouvoir des solutions innovantes de réinsertion dans l'emploi. Quels sont vos critères de sélection pour retenir les initiatives les plus porteuses ?

Michel Godet : Le caractère réussi du projet en premier lieu, mais aussi le caractère impertinent par rapport aux critères de succès habituel, l'idée étant de bousculer les idées reçues en faisant la promotion d'initiatives parties de rien. Nous souhaitons démontrer par l'exemple qu'il n'y a pas de fatalité sociale et économique tant que les hommes restent porteurs de projets. Le troisième critère important est le caractère duplicable, afin de prouver que ce qui est réussi par les uns peut-être réussi par les autres. Si l'on faisait déjà connaître dans toute la France ce qui marche dans ses territoires, sans compter évidemment ce qui se fait à l'étranger, on pourrait provoquer les envies et repartir vers des logiques vertueuses. On peut citer à titre d'exemple le pays de Vitré (Ille-et-Vilaine) qui compte seulement 6 % de chômeurs alors que l'emploi industriel (le plus impacté par la crise) représente 42 % de l'emploi total. Cela est tout simplement lié aux hommes, aux acteurs politiques et économiques de la région. Il est intéressant de voir, comme nous le rappelait déjà La Fontaine ("Aide-toi, le Ciel t'aidera") qu'il est toujours possible de résister en partant de soi-même, ce qu'on appelle le développement endogène, face à des problèmes extérieurs.

Nous espérons proposer à travers ce Grand Prix une logique alternative au jacobinisme classique qui nous fait tout attendre de l’État pour améliorer nos conditions socio-professionnelles. Beaucoup de projets fonctionnent en France, mais ce qui vient d'en haut fonctionne rarement. Nos élites ayant tendance à regarder la France avec des jumelles, il n'est pas étonnant de les voir mal avisées lorsqu'elles tentent d'influer positivement sur la vie économique.

Pourriez vous citer quelques initiatives locales réussies et reproductibles à l'avenir ?

On peut évoquer cet animateur de rue qui décide de monter une entreprise d'insertion pour aider concrètement des jeunes marginalisés à s'insérer dans le marché du travail. Aujourd'hui l'initiative fonctionne dans 21 départements et aide chaque année 1 000 personnes déclarées inemployables par Pôle emploi, à retourner dans l'emploi, justement. Cela nécessite une écoute et un accompagnement spécifique, mais débouche généralement sur un métier 6 à 9 mois plus tard dans des secteurs variés comme les emplois verts, la restauration, les déménagements... Une prise en charge d'un an coûte 6 000 euros à la collectivité mais finit par rapporter deux fois plus en charges au bout d'un an dans l'emploi. Dans une veine similaire le groupe "Id'ées" créé en Côte-d'Or favorise l'insertion de personnes en marge du marché du travail à travers des solutions de proximité innovantes. Son dirigeant, Pierre Choux, se bat hélas contre la bureaucratie et ses logiques depuis 20 ans, notamment à cause d'autres entités qui profitent de l'argent de la formation professionnelle, et qui voient d'un mauvais œil des projets moins onéreux et plus efficaces émerger. Sur un terme assez long, 20 ans encore une fois, on a vu des initiatives dans la Sarthe permettre de diminuer par trois les arrêts maladies en faisant de la médecine préventive et en promouvant des modes de vie sains.

Nous voulons pourtant prouver que là ou l'administration peut échouer, il est possible de faire mieux et autrement en dépensant moins cher. Les crèches en sont un bon exemple, puisqu'une structure issue du privé coûte deux fois moins cher qu'une structure publique.

Comment réussir à développer ces projets du local au national ?

Notre but est de démultiplier ces belles histoires en les faisant connaître à la hauteur de leur mérite. Il s'agit en quelque sorte de créer une "bonne contagion" des pratiques qui fonctionnent, afin que ces projets locaux prennent masse sur l'ensemble du territoire. Ce n'est pas toujours facile malgré tout, les médias n'ayant pas pour tradition de s'intéresser aux bonnes nouvelles. C'est pour cela que nous nous appuyons sur des cercles comme Reporters d'espoir pour rendre compte d'une réalité de terrain qui dépasse souvent la fiction des idées.

Le principal obstacle reste toutefois la bureaucratie, dans un pays où le Code du Travail comporte plus de 4 000 articles et où l'on crée des Commissions normatives pour mener des travaux de simplification de l'administration... Je continue néanmoins de faire confiance à l'expérimentation, que je considère comme une remise en cause légale des réglementations en vigueur. Lorsque la remise en cause est féconde, les réglementations finissent par évoluer.

Vous avez évoqué la logique jacobine et centralisatrice qui anime l'esprit français. Comment le pays peut-il adopter le réflexe de la société civile, souvent relégué au second plan de notre vie citoyenne et politique ?

Je crois justement que ce réflexe est en train de se manifester de plus en plus actuellement. Les abstentionnistes, les votes blancs ainsi qu'une bonne partie du vote Front National ne sont que les stigmates d'une forte volonté de changement et d'une perte de confiance dans ce qui représente le pouvoir de nos élus.

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