Ces pays qui souffrent de la contraction du cours du pétrole et pourquoi c’est un risque pour nous<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Le prix du baril de pétrole flirte avec les 80 dollars.
Le prix du baril de pétrole flirte avec les 80 dollars.
©Reuters

Retentissement global

Le prix du baril de pétrole flirte avec les 80 dollars. Une situation qui pourrait perturber les économies des pays de l'OPEP, où le pétrole et les ressources fossiles représentent 90% des exportations. Et dans une économie globalisée, ces perturbations peuvent potentiellement générer un écho mondial.

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec est un spécialiste de l’énergie et en particulier du pétrole et professeur à l’Ecole du Pétrole et des Moteurs, où il a dirigé le Centre Economie et Gestion. 

Il a publié plusieurs ouvrages et de nombreux articles sur des sujets touchant à l’économie et à la géopolitique de l’énergie et en particulier Exploitation et Gestion du Raffinage (français et anglais), Recherche et Production du Pétrole et du Gaz (français et anglais en 2011), l’Energie à Quel Prix ? (2006) et Géopolitique de l’Energie (français 2009, anglais 2011).

Voir la bio »

Atlantico : Le cours du pétrole n'en finit pas de baisser. Si les consommateurs ne vont pas s'en plaindre, il n'en va pas de même pour les producteurs. Quels sont les pays qui, à cause de leur forte dépendance vis-à-vis de leurs exportations, en pâtissent le plus ?

Jean-Pierre Favennec : Tous les pays de l'OPEP (Arabie Saoudite, Iran, Irak, Koweït, Emirats Arabes Unis, Qatar, Venezuela, Equateur, Algérie, Libye, Nigeria, Angola) dépendent très largement du pétrole (et du gaz pour le Qatar, l'Algérie et le Nigeria) pour leurs recettes. Pétrole et gaz représentent plus de 90 % des exportations. Et la situation de la Russie n'est pas très différente.

Un critère clé est le prix du baril nécessaire à chaque pays pour équilibrer son budget. Il est voisin de, voire supérieur à $ 100 par baril pour la plupart des pays, sauf dans les pays avec une faible population (Koweït, Qatar, Emirats). Mais si la plupart des pays ont désormais besoin d'un prix élevé pour faire face aux contraintes budgétaires, certains pays comme les Etats du Golfe ou l'Algérie ont pu accumuler au cours des années 2000 et en particulier de 2010 à 2013 des réserves financières importantes, qui pourraient leur permettre de faire face à une baisse des prix de quelques mois, alors que la situation sera immédiatement plus difficile pour des pays comme l'Iran ou le Venezuela. La production Iranienne - et les exportations - ont baissé à cause des sanctions. La production Vénézuélienne est stagnante du fait du manque d'investissements. L'argent du pétrole va au budget de l'Etat, pas au développement de la production.

Quelles sont les raisons de cette contraction, et celle-ci devrait-elle durer ?

La baisse du prix du pétrole est directement liée d’une part au ralentissement de l’économie mondiale, qui se traduit par une plus faible augmentation que prévue de la demande de pétrole, et d’autre part à la très forte augmentation de la production de pétrole de schistes aux Etats-Unis. Les Etats-Unis sont désormais le plus important producteur de pétrole dans le monde (plus de 11 millions de barils par jour contre un peu plus de 10 pour la Russie et entre 9 et 10 pour l’Arabie Saoudite).

Certains considèrent qu’une baisse des prix en dessous de 60 ou 70 dollars par baril affecterait et réduirait significativement la production de pétrole de schistes qui est "chère". Cependant un prix bas n’affectera que marginalement cette production car si les coûts sont élevés, une bonne part des coûts consiste en frais fixes qu’il faut payer quelque soit le prix du brut. En outre les progrès technologiques sont constants et font baisser le coût de production. L’impact sera limité.

A terme il est cependant clair que cette baisse des prix va contribuer à geler les projets de développement de nombre de nouveaux gisements (sables asphaltiques au Canada par exemple). Assez rapidement le marché va se tendre et les prix remonteront.

A partir de quel seuil les finances de pays producteurs comme la Russie, l'Iran ou l'Arabie saoudite seront-elles particulièrement touchées, et avec quelles conséquences au plan interne ?

Comme déjà indiqué, ces pays ont besoin d’un prix voisin de $ 100 par baril pour équilibrer leur budget. Mais il est probable que l’Iran surtout, la Russie sans doute souffrent très vite d’une baisse des prix alors que l’Arabie Saoudite dispose de réserves financières qui lui permettent de faire face pendant plusieurs mois à cette baisse

Cela fait six mois que les prix baissent. Si la contraction des prix du pétrole persiste pendant plusieurs années, quelles pourraient être les répercussions au niveau géopolitique ? Des régions entières pourraient-elles être déstabilisées, et de quelle manière ?

Il est peu probable que la baisse des prix dure plusieurs années. Seule une baisse massive de la demande de pétrole, conséquence par exemple de la mise en place de politiques très restrictives d’utilisation des énergies fossiles, pourrait créer les conditions d’une baisse massive et durable. C’est très peu probable.

Cependant une poursuite pendant plusieurs mois de la baisse actuelle pourrait déstabiliser les pays producteurs les plus peuplés qui parfois achètent la paix sociale grâce à l’argent du pétrole

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !