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Ces indicateurs qui montrent que la politique d’Emmanuel Macron produit de moins bons résultats que ce que connaît le reste de la zone euro
©MICHEL EULER / POOL / AFP

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Ce 26 mars, l'INSEE publiait un chiffre de la croissance 2018 mesuré à 1.6%, alors que la croissance en zone euro atteignait 1.8% sur la même période. D'autres chiffres indiquent également notre retard.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Ce 26 mars, l'INSEE publiait un chiffre de la croissance 2018 mesuré à 1.6%, alors que la croissance en zone euro atteignait 1.8% sur la même période. De la même façon, la réduction du chômage (baisse de 0.4 point de janvier 2018 à janvier 2019 selon Eurostat contre une baisse de 0.8 point dans la zone euro), le chiffre relatif au déficit (2.5%), les créations d'emplois, ou le déficit commercial sont également moins bien orientés que pour le reste de la zone euro. Comment expliquer cette contre-performance française dans un environnement qui a permis de meilleurs résultats dans d'autres pays de la zone euro ? 

Philippe Crevel : La France est à la traine de la croissance de l’économie européenne depuis 2014. En étant moins industrielle et moins exportatrice que ses partenaires directs que sont l’Allemagne ou le Benelux, elle a moins été portée par la reprise des échanges après la grande récession de 2008/2009 et par après celle de 2012/2013 au sein de la zone euro. Par ailleurs, la France ne s’est engagée dans une politique d’assainissement de ses comptes publics tardivement. Enfin, François Hollande n’a opté pour une politique favorable à l’offre qu’à compter de 2014. La situation des entreprises s’était fortement dégradée du fait de l’augmentation des prélèvements avant que le CICE et le pacte de responsabilité soient mis en place. La France est toujours pénalisée par un fort taux de chômage qui pèse sur la demande intérieure. Ce chômage qui est, en grande partie, de nature structurelle est la conséquence d’une inadéquation entre offre et demande de travail. Il est la conséquence d’un positionnement trop bas de gamme de l’outil de production. Il est aussi la conséquence d’un système d’Etat providence qui récompense insuffisamment le travail. A l’exception de vouloir taper sur les cadres qui en profite le moins, le gouvernement n’entend pas remettre en cause le système de l’Etat providence. Il organise en silence son downsizing. Assez bizarrement, la France s’américanise mais en ne prenant que les mauvais travers de notre allié. Ainsi, tout en ayant un niveau de prélèvements destructeurs, le système de protection sociale obéît de plus en plus à la logique de l’assistance et de moins en moins à celle de l’assurance.

La France a un mode de développement qui repose sur les aides sociales, qui jouent le rôle d’amortisseur en période de crise mais qui sont des boulets en période de reprise. Avec des dépenses publiques représentant 56 % du PIB et des prélèvements obligatoires s’élevant à 45 % du PIB, la France est un pays qui prend difficilement les vents de la croissance. Ses partenaires sont plus réactifs et moins handicapés par le poids des dépenses publiques. La France ressemble plus à l’Italie qu’à l’Allemagne même si son potentiel économique est supérieur à la première.

Dans quelle mesure cette situation peut-elle commencer à reposer sur les épaules du gouvernement ? Quelles ont été les erreurs commises ?

Le temps de l’économie et celui de la politique sont difficilement conciliables. Demander des comptes au gouvernement sur une année est difficile. La restauration de la croissance, la baisse du chômage exigent du temps, de la constance et de l’opiniâtreté. La question est de savoir si la direction prise est la bonne. Si fin 2017, une volonté de rupture était manifeste, en 2018, la gestion au fil de l’eau a repris ses droits. Certes, le déficit public a été réduit mais faiblement, 0,1 point. Le niveau de déficit de la France est supérieur de 1,7 point à la moyenne de la zone euro. La dette publique est restée stable à plus de 98 % du PIB quand celle de l’Allemagne revenait autour de 60 % du PIB. Le Gouvernement fait preuve d’une très grande prudence en matière de dépenses publiques. Si en matière de prélèvements, il a eu la main lourde, en revanche, en matière de structures publiques, le stop a prévalu sur le go. La réduction des effectifs, la restructuration des administrations publiques, la simplification des cartes administratives françaises ont été renvoyées à plus tard. Avec la crise des gilets jaunes, il n’est pas certain que ces projets ressortent des cartons. Concernant la fiscalité, le Gouvernement a privilégié le jeu de bonneteau. Il a repris à son compte la réforme de la retenue à la source préparée par François Hollande. La refonte des finances locales reste toujours à l’arrêt. Beaucoup de mois ont été perdus en 2017 et 2018. Le nouveau pouvoir a semblé ivre de sa victoire et n’a pas vu que le calendrier des jours défilait rapidement. Un quinquennat c’est court surtout s’il se termine au bout de deux ans. A la décharge du pouvoir, le pays souffre cruellement d’un manque de consensus. Une large majorité de la population veut plus de social, de protection, de sécurité. Une large majorité également qui se recoupe avec la première veut moins d’impôts, de taxes, etc. Du fait de la destruction des corps intermédiaires, le Président se retrouve assez nu face aux tensions internes du pays. Il n’y a pas ou peu de soupapes de sécurité lui permettant d’avancer masqué. De ce fait, la politique du pays se résume de plus en plus à une série de clashs médiatiques débouchant sur peu de changements. 

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