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Ce qui se cache derrière les (non) cravates : quand la France Insoumise flirte dangereusement avec la remise en cause de la légitimité de tout ce qui n'est pas elle
©AFP

Menace sur la République

Les nouveaux députés de la France insoumise ont fait parler d'eux hier en refusant de porter une cravate à l'Assemblée nationale. Mais au delà de ce fait qui peut paraître anecdotique, est-ce que la remise en cause constante des institutions et du gouvernementfont peut-être de la France insoumise un parti politique plus dangereux que le Front national ?

Gilles-William Goldnadel

Gilles-William Goldnadel

Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Il a notamment écrit en 2024 "Journal de guerre : C'est l'Occident qu'on assassine" (éditions Fayard) et en 2021 "Manuel de résistance au fascisme d'extrême-gauche" (Les Nouvelles éditions de Passy). 

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Atlantico : Par le geste symbolique du refus de porter une cravate, par ses déclarations indiquant qu'Emmanuel Macron n'aurait pas la légitimité pour porter la loi Travail, sa volonté d'apparaître comme le représentant réel du peuple, en quoi Jean Luc Mélenchon et la France Insoumise font monter d'un cran le niveau de contestation ? En comparant avec le Front national, le procès en illégitimité formulé par la France Insoumise, et le rejet des institutions qu'il suppose, ne marque-t-il pas une nouvelle forme d'opposition ? 

Gilles-William Goldnadel : S'il s'agissait que du problème de la cravate il n'y aurait pas de raisons de s'inquiéter mais il y a une véritable dérive des insoumis déjà depuis pas mal de temps. La plus importante est la menace d'avoir recours à la rue, le troisième tour électoral si jamais Macron allait jusqu'au bout de ce qu'il considère comme une provocation sur le terrain du contrat de travail. Déjà cette menace de la rue est symbolique du fait que le jeu démocratique, pour eux, est purement "ludique". Il y a également, de manière beaucoup plus grave à mes yeux, le communautarisme dans lequel Jean-Luc Mélenchon et ses amis sont en train de sombrer. Il fut un temps pendant la campagne présidentielle où Mélenchon avait l'air d'être sur le même terrain souverainiste et patriotique que Marine Le Pen, mais dans le cadre de sa campagne législative, notamment à Marseille il a eu recours à toutes les ficelles communautaristes. Ce ne sont pas les avatars de l'affaire Obono où Jean-Luc Mélenchon a volé au secours de cette alliée directe du Parti des Indigènes de la République qui est un parti racialiste qui vont démentir mon inquiétude.

Les contestations de la victoire de Manuel Valls ne sont pas non plus de nature à me rassurer sur ces dérives des "Insoumis". On voit bien que la détestation de M. Valls c'est la détestation d'un défenseur de la laïcité, quelqu'un qui n'hésite pas à pointer l'immense problème de l'antisémitisme islamiste dans les quartiers, quelqu'un qui est un défenseur de l'autorité de l'Etat nation. On voit bien pourquoi il est détesté. 

J'étais déjà dubitatif quant au rapport entre la démocratie et celui qui se considère comme dépositaire des droits de Robespierre et Chavez réunis mais là cette nouvelle dérive communautariste à la fois m'inquiète et m'étonne.

Concernant le Front national, s'il faisait les mêmes appels à la rue que ceux de Jean-Luc Mélenchon, on parlerait de nazisme, de danger de nazisme. Or là, M. Mélenchon s'enhardit précisément parce qu'il bénéficie d'une large indulgence d'une partie des médias. D'abord parce qu'il n'est pas à droite mais à gauche mais aussi parce que la radicalité de la gauche continue de fasciner une grande partie des médias… Tout cela explique l'enhardissement du leader de la France insoumise. Si ses dernières foucades s'étaient heurtés à une large contestation des médias, Jean-Luc Mélenchon qui sait être souple et faire le gentil lorsqu'il l'estime nécessaire se serait largement adoucit. 

Quels sont les risques d'une telle stratégie alors même que Jean Luc Mélenchon a frôlé les 20% à l'élection présidentielle ? 

De manière générale le pouvoir politique aujourd'hui est très fragile et lorsque vous jouer à la fois radicalement sur la corde sociale et communautaire, tout peut arriver, même le pire.

Quels sont les moyens dont disposent le gouvernement, et les autres partis d'opposition pour faire face à cette nouvelle forme de contestation, attaquant directement les institutions ? 

Le moyen c'est la légitimité populaire, le moyen c'est l'autorité de la loi, l'autorité des forces de l'ordre… Et surtout quelqu'un qui n'est pas d'accord politiquement avec Emmanuel Macron sera solidaire du gouvernement en place en tant que légitimiste si jamais les extrémistes voulaient faire parler la violence. Il n'y a pas de doutes là-dessus. 

La réponse sera légale, culturelle, intellectuelle, il ne dépend que du corps social dans son ensemble de ne pas être les victimes de la démagogie tribunitienne de celui qui aujourd'hui très largement installe l'extrémisme et la radicalité la plus dangereuse en France.

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