Ce que les vagues de chaleur extrêmes qui frappent l’Inde nous apprennent sur les limites de survie du corps humain<!-- --> | Atlantico.fr
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Une femme et des enfants se rafraichissent avec l'eau d'un robinet public lors d'une chaude journée. Allahabad, Inde, le 28 avril 2022
Une femme et des enfants se rafraichissent avec l'eau d'un robinet public lors d'une chaude journée. Allahabad, Inde, le 28 avril 2022
©AFP/SANJAY KANOJIA

Conséquences lourdes

En Inde, le mois de mars fut le plus chaud en 122 ans. En avril, le thermomètre est monté jusqu'à 46 degrés à New Delhi, avec des température de 35 degrés la nuit. De telles chaleurs, lorsqu'elles s'installent dans la durée, peuvent avoir de lourdes conséquences pour le corps humain

Sarah Safieddine

Sarah Safieddine

Sarah Safieddine est chargée de recherche au CNRS, travaillant à LATMOS/Sorbonne Université. Ses recherches portent sur l'étude de la composition de l'atmosphère et du transport des polluants à l'échelle mondiale et locale, ainsi que sur leurs effets sur la santé et le climat.

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Atlantico : En proie à une vague de chaleur exceptionnelle, les Indiens tentent tant bien que mal d’éviter les coups de chaleur. Alors que le mois de mars fut le plus chaud en 122 ans, le thermomètre est monté jusqu’à 46 degrés à New Delhi, avec des températures de 35 degrés la nuit. Quel est l’effet de telles chaleurs sur le corps humain ? 

Sarah Safieddine : La problématique se situe au niveau de la durée de ces fortes chaleurs. Le corps est généralement habitué à se reposer pendant la nuit. À titre d’exemple, pendant la vague de chaleur de 2003 en France, le taux de mortalité était élevé dans les EHPAD car les températures étaient presque aussi fortes la nuit que le jour. Dans ce cas, le corps est soumis à un stress important. Il sera en hyperthermie et les organes ne fonctionneront plus normalement. Le corps humain est censé dissiper la température via la transpiration. S’il ne peut pas le faire, il y a une augmentation de la température corporelle et donc un dysfonctionnement des organes. 

Que se passe-t-il lorsque de telles chaleurs durent plusieurs jours, voire plusieurs semaines ? Le corps s’adapte-t-il ou au contraire commence t-il à fatiguer ?

Malheureusement, le corps humain a besoin de milliers d’années pour s’adapter et le changement climatique va beaucoup plus vite que cette capacité d’adaptation. Les changements que nous observons aujourd’hui sont beaucoup trop importants et le corps ne peut pas suivre. Si la température mondiale augmente de 1,5 degrés, comme ce que prévoient les Accords de Paris, le climat londonien pourrait être comparable à celui de Barcelone. Les individus qui habitent dans des régions chaudes ne seront peut-être pas capables de survivre à ces augmentations. 

Certains estiment que les températures atteintes en Inde sont les limites tolérables pour le corps humain, qu'en savons nous vraiment ?

Tout dépend. 46 degrés, ce n’est pas une température record sur le globe. Dans de nombreuses régions du monde, des individus vivent sous ces températures. Le réel problème est la combinaison entre la température et l’humidité. En revanche, si la température est de 46 degrés et que l’humidité est de 80%, la situation est critique. On estime que cette « température de degré humide » est dangereuse quand elle dépasse les 32/33 degrés, ce qui ne s’est pas produit en Inde. Si ça avait été le cas, l’équilibre thermique entre la peau et l’extérieur risque de ne pas être maintenu. Le corps ne peut plus éliminer la chaleur, ce qui peut être fatal. 

Comment calculer la température humide et que change-t-elle pour l’organisme ?

Ce concept de température humide est à la mode depuis quelques années. Plusieurs définitions et manières de la calculer existent. En revanche, ces formules peuvent donner des différences allant jusqu'à deux degrés, ce qui est très conséquent. À titre d’exemple, une température de 32 degrés humides est supportable, puisque c’est ce qui a été calculé en Inde, alors qu’une température de 34 degrés humides est synonyme de décès pour de nombreux individus. La formule la plus adaptée est assez complexe et comprend plusieurs facteurs, comme l’humidité, la pression atmosphérique, la chaleur « classique »… Ce qui est sûr, c’est que l’humidité est le facteur le plus important pour déterminer le confort thermique, celui « ressenti » par les individus. Pour être claire, une température de 35 degrés avec un taux d’humidité faible n’est pas très gênant, alors que 35 degrés avec un taux d’humidité de 80% est franchement pénible. Pour donner un exemple concret, quand la température est de 40 degrés avec une humidité de 50%, ce qui est peu, la température humide approchera les 30 degrés, ce qui est franchement inconfortable. En Inde, mais partout sur le globe, le stress thermique est donc plus important sur les côtes ou les rivières, puisque le taux d’humidité est plus important.

Crédits : Sarah Safieddine – LATMOS/CNRS/Sorbonne Université.

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