Ce que le métro new-yorkais nous confirme sur la façon dont voyagent les bactéries<!-- --> | Atlantico.fr
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Le métro de New York
Le métro de New York
©Reuters

Elles sont partout !

Une équipe de scientifiques a recensé 637 espèces de bactéries dans le métro new yorkais, pour la plupart inoffensives. Des fragments associés à l’anthrax et à la peste bubonique ont été trouvés, mais pas de quoi infecter les personnes à proximité.

Vincent  Cattoir

Vincent Cattoir

VINCENT CATTOIR est professeur des universités, praticien hospitalier et chef de service au CHU de Caen.

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Michaël Dubow

Michaël Dubow

Michaël Dubow est enseignant chercheur à l’Université Paris-Sud 11. Il est membre de l’équipe "génomique et Biodiversité microbienne des biofilms".

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Atlantico : Comment les bactéries voyagent-elles ?

Michaël Dubow : Ce qui ressort de cette étude, c’est que les bactéries sont partout, et le métro n’est pas plus représentatif que le reste du monde. Le travail réalisé est particulièrement intéressant dans la démarche, mais en l’absence de traitement des données pour le moment, il est difficile d’en dire plus. L’avenir nous dira ce que cette cartographie des bactéries peut nous apporter.

Les bactéries viennent de l’air, de la surface, des hommes, des chiens, des plantes, etc. Le métro étant un système ouvert, tout ce qui y entre dépose par la même occasion des bactéries. La peste et l’anthrax sont en nous dans la mesure où nous vivons dans un monde ouvert : l’anthrax qui se trouve par exemple dans le sable du Sahara peut être transporté ailleurs, très loin, sous le simple effet du vent. C’est pourquoi une infinité de bactéries se retrouve disséminée à la surface du globe.

Mais de là à ce qu’elles influent sur l’homme, je réponds par la négative. Pour qu’elles soient pathogènes, il faut qu’elles soient présentes en forte concentration.

Il existe donc tune mondialisation des bactéries, soit pour des raisons naturelles, soit sous l’effet de l’homme ?

Michaël Dubow : Oui, tant qu’on ne parle pas de mondialisation de la saleté. Nos ancêtre ont vécu dans des cavernes, nous évoluons tous dans des conditions que nous considérons comme "sales", mais ce n’est pas un problème en soi. Le monde est fait de bactéries, et nous nous en accommodons très bien. Même les monuments qui se décolorent sont responsables de la présence de bactéries dans l’air.

La multiplication des voyages humains et leur brassage dans des lieux comme le métro de New York accélère le déplacement de bactéries, mais les principaux transporteurs restent les vents et les marées.

Les transports en commun sont-ils sales ?

Vincent Cattoir : oui, on ne peut pas dire qu'ils soient propres ! La règle est simple, plus il y a de monde, plus c'est sale, donc les transports en commun sont logiquement plus sales que les taxis parce qu'ils véhiculent bien plus de voyageurs. De plus, par rapport au monde extérieur, ce sont des lieux confinés, clos et chauds, donc potentiellement  favorables à la prolifération et à la survie des bactéries. A priori, si vous vous déplacez en extérieur, les bactéries ont moins de chances de survivre et donc de contaminer les passants. 

Pour revenir sur l'études menée dans le métro new-yorkais, les scientifiques ont en fait recherché des traces d'ADN, provenant de bactéries pas nécessairement vivantes. L'études montre quelles bactéries ont été présentes, mais pas si elles sont toujours viables et donc potentiellement pathogènes

Les bactéries représentent-elles un danger pour la santé ?

Il y a des bactéries bénéfiques, et notre corps comprenddes milliers de milliards d’entre elles qui ont un rôle de défense de l’hôte. On découvre notamment que les bactériesconstituant la flore résidente (appelée désormais microbiote) intestinale sont des remparts naturels contre certaines maladies. Classiquement, on distingue les bactéries pathogènes obligatoires qui sont responsables d’infections chez tout sujet, et les bactéries pathogènes opportunistes qui sont responsables d’infections chez les patients fragilisés, notamment ceux dont le système immunitaire est affaibli. Ces personnes sont donc plus susceptibles d’être infectées.

A noter que certaines bactéries sont plus dangereuses que d’autres car responsables d’infections mortelles, et peuvent se transmettre facilement par voie aérienne. C’est notamment le cas de Mycobacterium tuberculosis agent de la tuberculose (maladie encore présente de nos jours) ou de Yersinia pestis responsable de la peste (maladie « historique »). On peut imaginer que dans un métro si un voyageur tuberculeuxtousse sans se protéger (et surtout sans protéger son environnement proche), la bactérie peut se transmettre à son(es) voisin(s).

En revanche, les virus eux se diffusent très largement via les lieux d'interactions sociales comme les écoles, et aussi les transports. C'est pour ça que des règles d'hygiène élémentaires, comme se laver les mains après avoir pris les transports, doivent rester systématiques.

Peut-on imaginer débarrasser les transports en commun des bactéries dangereuses, ou bien doit-on porter un masque sur la bouche ou disposer d’un gel désinfectant dans son sac ?

Le nettoyage simple par aspirateur est absolument inefficace pour éradiquer les bactéries, puisque pour s'en débarrasser, il faut utiliser un produit qui va la tuer ! Dans les hôpitaux, pour éviter la transmission des bactéries, il y a une décontamination du matériel, des sols… mais également un traitement de l’air au niveau des pièces les plus à risque (ex. blocs opératoires). Dans les transports, c'est bien sûr impossible ! Donc chacun est responsable de sa « décontamination » personnelle en quelque sorte, et le gel nettoyant peut être un outil pratique pour répondre à ce souci de propreté, notamment pour la transmission manuportée de certaines bactéries. Par exemple, les asiatiques portent parfois des masques pour se protéger (et protéger leurs concitoyens) des virus transmis par voie respiratoires, et c'est assez efficace compte-tenu de leurs problématiques environnementales et démographiques. Cependant, il ne faut pas dramatiser :  même si le métro n’est un endroit propre, ce n’est pas non plus un bouillon de culture.

L'hygiène systématique est-elle dépassée, et pourrait-on voir bientôt des chirurgiens opérer sans masques de protection ?

Les mesures d'hygiènes sont essentielles, surtout en milieu hospitalier où l'on est en face de personnes affaiblies et donc plus susceptibles d’être infectées. Mais on peut dire que le corps humain (en comprenant bien évidemment les bactéries qui le composent) s'adapte à son environnement extérieur direct. Ainsi, on peut imaginer quun utilisateur quotidien des transports en commun a moins de risques de tomber malade dans le métro que quelqu'un qui prend le métro pour la première fois. A l’inverse, les citadins peuvent développer d’autres types de pathologies lorsqu’ils se retrouvent en milieu rural car exposés à d’autres stimuli extérieurs. Cependant, des études démontrant ces faits manquent.

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