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Ce que la marque France représente pour les étrangers
©Reuters

Bonne pub ou pas ?

Arnaud Montebourg continue son opération de promotion du "made in France" qui sera l'un des ses principaux objectifs pour 2014. Encore faut-il que la fabrication en France soit perçue dans le monde comme un atout.

Eric Fournier

Eric Fournier

Éric Fournier est président et directeur associé du cabinet GMV Conseil. 

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Atlantico :  Alors que le ministre du Redressement productif en fait un enjeux majeur de promotion, que représente aux yeux des consommateurs mondiaux le fait pour un produit d'être fabriqué en France ? Hormis le luxe, d'autres produits jouissent d'une image marketing positive grâce au "made in France" ? 

Éric Fournier : C’est une question qui me surprend. Je rappelle en effet qu’il y a encore quatre ou cinq ans, la France était le troisième exportateur mondial. Contrairement à l’idée véhiculée, nous sommes dans un pays exportateur même si le classement à légèrement baissé ces dernières années. Et même si le luxe a son importance, ce sont les biens industriels qui représentent le gros des exportations. Alors bien sûr, ce ne sont pas des biens micro-industriels comme le font les Allemands qui vendent beaucoup de machines-outils que malheureusement nous ne faisons pas. Mais la France, ne l’oublions pas, est par exemple le premier exportateur de fusées avec Arianespace qui n’est pas une invention européenne…

Ensuite, concernant l’impact du « made in France », il faut savoir qu’il n’y a que deux pays qui ont vraiment communiqué sur l’origine nationale de leur production à l’exportation : le Japon et les Etats-Unis. Les marques européennes, elles, se sont le plus souvent détachées de leurs origines nationales. On n’est pas en France dans la même logique des marques japonaises par exemple qui communiquent sur la qualité des process du « made in Japan ». Il n'est donc pas choquant que le « made in France » évoque encore peu de choses aux consommateurs internationaux car c’est un filon que l’on a pour l’instant peu exploité.   

Là où le « made in France » a peut-être réellement un sens, c’est dans le secteur agricole et agro-alimentaire, où les standards de qualité sont reconnus. La production agricole nationale, quand bien même les Français la critiquent en lui reprochant une certaine uniformisation par rapport au potentiel que la France peut avoir, est reconnue hors de nos frontières et nourrit une bonne partie de l’Europe.

Y a-t-il des effets contre-productif à l'idée que le premier secteur qui vient souvent à l'esprit des consommateurs étrangers quand on parle de la France soit le luxe ? Cela brouille-t-il l'image du "made in France" pour les productions qui n'ont aucun rapport avec ce secteur ?

Le secteur du luxe ne joue pas sur le « made in France » mais sur la notoriété de ses marques qui connotent justement la France. Je ne suis pas sûr d’ailleurs que l’Oréal, Garnier, Lancôme, Dior ou Chanel soient tous faits « made in France ». Et, à mon sens, la manière dont ils connotent la France n’impacte pas le reste de la production française. 

Est-ce que le fait que les pouvoirs publics vantent la qualité des produits nationaux a réellement un impact sur leur perception à l'étranger ? Cette action de communication politique a-t-elle une chance de générer un gain positif sur les marchés internationaux ?  

Le discours du « made in France » est bel et bien un message politique. Contrairement au gouvernement précédent, les dirigeants actuels veulent montrer qu’ils œuvrent pour la défense de l’outil de production français, et s’en servent comme une démarche politique. Ils ont parfaitement senti la chose et je pense que, politiquement, c’est un très bon coup. La droite doit se mordre les doigts de ne pas l’avoir fait…

De plus, doit-on considérer que ce message politique est réellement à destination de l’étranger ? Je pense plutôt que c’est un message, certes formulé pour l’étranger, mais surtout fait pour orienter le consommateur national, au moins dans un premier temps.

Quant au gain à attendre, je dirais que l’Allemagne fait cela depuis des années, sans états d’âme, et Angela Merkel est le premier promoteur de la production allemande à l’export. Ils ont certes quinze ou vingt d’avance avec une logique plus ordonnée que les Français. Mais, il n’y pas de raison qu’il n’y ait pas de résultats car – je le redis – la France ne part pas de zéro ! Beaucoup de marques françaises sont déjà très connue et c’est souvent en France que les productions françaises sont les plus critiquées !   

Quelles sont, selon vous, les pistes d'amélioration pour que la valeur ajoutée du "made in France" soit renforcée hors de nos frontières ? Que manque-t-il à la production industrielle française pour qu'elle jouisse réellement de la bonne image de, par exemple, la production allemande ? 

La vraie marge de progression n’est pas sur les entreprises du Cac40, elle se joue au niveau des PME. Il est là le problème du « made in France », il n’est pas chez Total ou chez Michelin. La production industrielle des PME pourrait donc jouir d’une meilleure image en relocalisant la production pour profiter du sentiment d’excellence que renvoie à l’étranger la main-d’œuvre française, y compris chez les décideurs. Que je sache en effet, l’investissement étranger en France n’a quasiment pas bougé ces dernières années et il reste massif. L’environnement fiscal ou monétaire que l’on avance parfois comme un repoussoir reste un débat qui n’a rien à voir à la question de la production. Et si on regarde encore une fois en Allemagne, on voit que ce pays joue clairement la carte de la cohérence entre le produit et ceux qui le fabriquent. Et je rappelle enfin qu’à l’époque du débat vif entre Arnaud Montebourg et le PDG de Titan, la presse anglo-saxonne – qui n’est pas en général très favorable à la France – a souligné que que la productivité de l’usine d’Amiens était supérieure à ses usines américaines, ce qui a en partie fait taire la polémique C’est bien le signe que la France a des atouts reconnus à l'étranger et qu'elle doit valoriser. 

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