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Cathos, cessez d’attendre un nouveau messie ! A l’échelon local, la politique peut encore être pratiquée comme un service
©Reuters

Bonnes feuilles

Dans une France sécularisée, devenue terre de mission, l'abbé Grosjean invite les catholiques, en particulier les jeunes générations, à repousser toute tentation de dilution ou de repli sur soi. Il les appelle à vivre un catholicisme décomplexé, assumé et engagé au service de la société. Extrait de "Catholiques, engageons-nous !" de l'abbé Pierre-Hervé Grosjean, aux éditions Artège 2/2

Pierre-Hervé Grosjean

Pierre-Hervé Grosjean

Pierre-Hervé Grosjean est prêtre du diocèse de Versailles, curé de la paroisse de Saint-Cyr-l'École. Il est aussi Secrétaire Général de la Commission Éthique & Politique de son diocèse. Il a fondé́ les universités d'été́ Acteurs d'Avenir. Il est l'auteur d'Aimer en vérité, paru chez Artège. Il est aussi un blogueur influent qu'il vous est possible de suivre ici. Son dernier ouvrage Catholiques engageons-nous ! est publié en avril 2016 (Artège).

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Le discrédit jeté sur la classe politique dans son ensemble n’est pas juste et les chrétiens ne peuvent l’alimenter. Si certaines grandes figures nationales ont scandalisé les Français par leur attitude, leurs reniements et leurs mensonges, on ne doit pas oublier tous ces élus locaux qui sont pour beaucoup de " bons et fidèles serviteurs». La politique locale est un vrai lieu de service que les chrétiens peuvent et doivent investir en force. Sur le terrain, on ne fait pas semblant : l’action porte du fruit, on touche à la vie concrète des personnes, on est à leur contact. C’est un engagement qui est à la portée de beaucoup et qui reste une belle façon de servir, aux côtés de nos frères et soeurs croyants ou non, en apprenant travailler ensemble pour un bien qui nous est commun. Autre intuition : cessons de rêver à une classe politique qui serait parfaite. Elle aussi est à l’image de notre société. Les cathos sont souvent très durs avec les politiques. Peu trouvent grâce à leurs yeux, car beaucoup ne semblent pas avoir des convictions très solides. Ce qui m’étonne, pour ma part, c’est qu’on perde encore du temps à s’en étonner ! Une fois que le constat de la fragilité des convictions de nos politiques est posé, que fait-on ?

Il y a trois solutions. La première est d’attendre le " Messie ". Or, il est déjà venu. Nous cesserons d’être déçus de nos politiques quand nous cesserons d’attendre d’eux la perfection qu’on ne peut attendre que du Messie lui-même ! À entendre certains, le candidat idéal qui pourrait mériter leur vote devrait pourtant en avoir toutes les qualités. Il devrait être le sauveur ! Ne nous trompons pas de sauveur… sous peine d’être éternellement déçus,après avoir idolâtré tel ou tel. Nos politiques sont des hommes et des femmes comme nous, bien pêcheurs. Ils ont toutes nos faiblesses. Et le milieu dans lequel ils évoluent n’est pas réputé pour les atténuer !

Arrêtons ce regard immature qui rêve d’un monde politique parfait, exempt de toutes les médiocrités humaines qu’on retrouve partout ailleurs. Cela ne veut pas dire qu’il faille renoncer à exiger une certaine exemplarité de nos élus. Mais ayons aussi un peu de bienveillance et de miséricorde pour ces hommes et ces femmes qui ont souvent beaucoup sacrifié pour exercer leurs fonctions– tant au niveau personnel que familial – et qui sont dans un environnement d’une violence impressionnante.Soyons simplement lucides et admettons qu’il leur faudrait un certain héroïsme pour se montrer toujours à la hauteur, surtout sans avoir toujours la foi ni des convictions ancrées profondément. Or il est rarement facile d’être un héros ! Restons exigeants avec eux, mais aussi encourageants.

Nous sommes très forts pour critiquer, pétitionner, dénoncer. Avons-nous déjà une seule fois écrit pour remercier notre député, quelle que soit sa couleur politique ? Pour l’encourager sur tel vote ? Pour le féliciter d’une prise de position courageuse ? Ne croyez pas que nos élus soient insensibles à tout cela. Ils passent leur temps à être vilipendés par la presse, ils sont en permanence sous pression, ils ne gèrent bien souvent que des rapports de force, ils sont confrontés à la colère ou au désespoir de leurs administrés… Des encouragements,des remerciements, des propositions de service ne laissent personne insensible. Nous n’imaginons pas le poids que nous pouvons ainsi avoir. Un député qui reçoit dix lettres pour l’encourager sur un sujet y sera attentif. Cela peut même devenir le sujet de sa semaine. Il en parlera à Paris lors de la réunion de son groupe parlementaire.

Voter à contre-courant, prendre la parole dans les médias pour défendre courageusement une position minoritaire, porter nos convictions sur la place publique : tout cela demande beaucoup de force, tant la pression médiatique peut être violente et le prix à payer très cher. Montrons à nos élus que nous restons certes exigeants avec eux, mais que nous savons aussi les encourager et les remercier quand ils se montrent à la hauteur de leur fonction. Ils seront d’autant plus solides s’ils se sentent portés et soutenus. Ne sommes-nous pas tous un peu comme cela ?

La deuxième solution est d’investir leur entourage. La faiblesse des convictions de beaucoup de responsables politiques de premier plan nous fait prendre conscience de l’importance du rôle de ceux qui les entourent. C’est bien souvent ceux-là qui vont exercer une influence majeure sur l’orientation du candidat, du ministre ou de l’élu. En grande partie, le vrai pouvoir se trouve là. Les cabinets ministériels, les attachés parlementaires, les équipes de campagne travaillent le fond, quand les têtes d’affiche n’en ont guère le temps. Il y a donc là un vrai lieu à investir, pour y servir. Loin des projecteurs, mais proche de ceux qui décident.

Encore une fois, il n’est pas question de faire du communautarisme. Nous n’y allons pas pour servir nos intérêts particuliers de catholiques. S’il y en avait, j’aimerais bien d’ailleurs savoir lesquels ! Nous y allons pour servir notre pays, en servant le bien commun, éclairés par l’anthropologie qui est la nôtre et les convictions qui nous animent. C’est là que se préparent les lois, là que se font les nominations, là qu’on fixe le cap pour les années qui viennent, là qu’on cherche des solutions aux difficultés de notre pays. C’est aussi là qu’on accompagne le ministre, le maire, le député, le candidat et qu’à défaut de le rêver parfait, on peut essayer de le convaincre du bienfait de telle ou telle proposition. Bien-sûr, dans cette situation, vous ne remporterez pas tous les arbitrages. Bien-sûr, vous devrez parfois avaler des couleuvres et frémir en entendant votre président de région, votre ministre,votre sénateur ou député,  votre maire défendre une idée loin de ce que vous aviez préconisé, ou dire parfois des énormités. Mais je suis toujours heureux de savoir que dans l’entourage de telle ou telle figure de premier plan il y a des chrétiens solides, construits, capables de penser et d’influer. Partout où se trouve un chrétien engagé, il y a la possibilité pour nos convictions de rayonner. Et je crois que cela se fera pour le bien de tous.

Extrait de Catholiques, engageons-nous ! de l'Abbé Pierre-Hervé Grosjean, aux éditions Artège, avril 2016. Pour acheter ce livre cliquez ici

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