Canicule : les maisons aussi en souffrent, voilà ce qu’il faut savoir <!-- --> | Atlantico.fr
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Un feu de forêt, non loin du village de Palneca en Corse? en août 2017? lorsque les températures avaient dépassé les 40 degrés.
Un feu de forêt, non loin du village de Palneca en Corse? en août 2017? lorsque les températures avaient dépassé les 40 degrés.
©PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Dommages collatéraux

Les périodes de canicules et les fortes chaleurs risquent-elles d'endommager nos maisons ? Comment les habitations subissent la montée des températures ?

France  Poulain

France Poulain

France Poulain est architecte et urbaniste de l'Etat. Elle travaille depuis la fin des années 1990 sur les questions relatives au camping, qu'il soit ancien ou moderne, individuel ou collectif, sur parcelles privées ou en terrains de camping, de loisir ou sous forme de précarité. Elle a publié de nombreux articles et ouvrages sur ce sujet dont l'Esprit du camping (Cheminements, 2005) ou bien encore Le camping aujourd'hui en France (Cheminements, 2010).

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Atlantico : Les périodes de canicules et leurs fortes chaleurs risquent-elles d'endommager nos maisons ?

France Poulain : Actuellement et ce pour la France métropolitaine, le terme de canicule est utilisé lorsque le thermomètre ne descend pas en dessous de 20 degrés la nuit durant plus de trois jours. Il est évident que nos constructions sont largement prévues pour résister à ce type de phénomène puisque le béton, la pierre naturelle ou la brique sont des matériaux qui résistent, par nature, à des températures bien plus extrêmes.
Il en est de même pour le terme de « fortes chaleurs » puisque celui-ci fait référence à des 35°, 40°, 45° voire même 50°. Mais la brique est cuite dans des fours à plus de 800 à 1000°, la pierre naturelle comme le silex ou le marbre sont liées à des mouvements de l'écorce terrestre qui leur ont fait connaître des épisodes climatiques plus extrêmes qu'être utilisées pour l'édification de constructions. D'ailleurs, seuls les vrais incendies peuvent conduire à ce que leurs qualités intrinsèques soient mises à mal avec des phénomènes de « claquement » ou de fracture.
Ainsi, les maisons qui sont faites de matériaux courants : bois, brique, béton, terre, pierre… ne risquent pas d'être dégradées par la canicule ou les fortes chaleurs. Pour autant, cela ne veut pas dire qu'aucun désordre ou dégât ne peut survenir sur nos constructions contemporaines par ces épisodes de chaleur extrême ; je pense notamment à des matériaux ou composés dérivés du bitume telles les bandes pour isoler les toitures terrasses ou le mastic, composé en partie d'élastomère ou de plastique, qui peuvent se déformer ou fondre sous l'action de la chaleur. Un mastic ancien entourant des vitres sur une fenêtre peut fondre et il sera nécessaire de le reposer une fois la chaleur retombée.
Ce n'est donc pas la construction dans sa structure qui se détériore mais certains éléments qui peuvent conduire à des désordres.

Si les fortes chaleurs n'abîment pas les maisons, comment celles-ci subissent-elles la canicule ? En d'autres termes qu'elles conséquences des températures très élevées peuvent-elles avoir sur nos habitations ? 

Nos maisons sont des constructions qui sont faites pour résister à des températures qui nous apparaissent comme élevées. Ainsi que je l'évoquais, il n'y a vraiment que les incendies, dont les températures peuvent atteindre plus de 1500° qui peuvent les dégrader définitivement.
Ce sont donc les habitants ou occupants qui subissent vraiment la canicule et qui peuvent avoir l'impression que le bâtiment n'y « résiste » pas. C'est parce que l'être humain va suffoquer, trouver que les matériaux sont chauds en touchant un mur extérieur par exemple même si celle-ci est fait de pierres naturelles (car la pierre stocke et renvoie la chaleur), qu'il va « projeter » sur son environnement son propre mal-être.
Ainsi, lorsque vous vous trouvez dans des maisons anciennes faites de murs épais ou des maisons contemporaines très isolées, vous pouvez avoir l'impression que le bâtiment « résiste » mieux à la chaleur. Mais ce n'est pas le bâtiment en terme de structure qui résiste, ce sont les personnes qui s'y trouvent qui bénéficient d'un environnement mieux préservé et peuvent donc mieux résister elles-mêmes aux fortes chaleurs. Il existe donc un raccourci langagier qui ferait que certaines constructions résistent mieux que d'autres mais qui ne correspond pas à une réalité physique pour le bâtiment lui-même.

Y-a-t-il des conseils à respecter pour protéger au mieux nos maisons sous les fortes chaleurs ?  Un intérieur frais, en plus de nous être agréable, est-il profitable au bâtiment ?

En fait, les matériaux qui peuvent être dégradés par les fortes chaleurs se trouvent le plus souvent à l'extérieur et reçoivent donc le soleil directement. Il est rare, à part l'exemple du mastic que je citais, qu'un matériau intérieur à l'habitation puisse être impacté par de fortes chaleurs. Les conséquences de la chaleur (excepté les incendies) ne sont pas les mêmes que pour l'eau par exemple. Une habitation peut souffrir de l'eau et être très dégradée, soit par l'humidité qui va favoriser le développement des champignons, soit par les inondations qui vont dégrader les composés de peinture, de plâtres, les éléments de bois… mais la même maison ne va pas souffrir de quelques jours ou semaines à 40 ou 50°.

Si la manière dont sont bâties nos maisons influe sur notre bien-être en terme de température ressentie, comment devons-nous les construire ou pouvons-nous les améliorer pour faire face aux prochains épisodes de fortes chaleurs ?

Il faut envisager nos maisons dans un environnement plus large, à savoir nos villes et nos territoires tels que nous les connaissons aujourd'hui. Nous pouvons être dans une construction où il fait plus frais que l'extérieur de manière naturelle, en ouvrant les fenêtres la nuit et le matin pour renouveler l'air et en « capter » du plus frais que durant la journée, en fermant les volets,...puis nous allons pouvoir nous déplacer en journée en extérieur et entrer dans d'autres bâtiments. Cette chaîne de déplacements se fait dans des conditions où nous pouvons encore véritablement nous trouver « hors » de constructions.
Mais ce n'est pas ou plus forcément le cas dans des régions de notre globe terrestre où les conditions climatiques font que vous passez d'une construction climatisée à une voiture climatisée puis à des bureaux climatisés sans « sortir dehors ». Ce passage d'un mode de vie à un autre, du fait des conditions climatiques, est à redouter. Or, il conduirait à la fin de nos modes de vie actuels.
Ainsi, la recherche de bâtiments climatiquement durables (ou d'une redécouverte avec par exemple les constructions en terre) en terme de matériaux, de structures ou de technologies rapportées est importante mais ce n'est qu'une partie du problème car la question de « résister aux fortes chaleurs » se pose quand nous y sommes soumis mais ces chaleurs ont des causes dont nous sommes en partie responsables. Nous devons en effet réduire collectivement notre empreinte carbone pour que nous puissions continuer à imaginer que nous-mêmes, nos enfants ou petits-enfants continuent à sortir dans la rue ou à être dans la nature même lors d'épisodes de fortes chaleurs. Vivre avec la Nature et non pas en opposition avec elle.

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