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Bientôt, on regrettera de ne pas avoir profité des taux bas pour investir dans l’avenir !
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

emprunts bancaires

En France, leurs emprunts bancaires ont augmenté de 72 milliards d’euros en juillet et leur financement par les marchés de 31 milliards

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Attention : ils remontent, en France et ailleurs ! Bientôt, on le regrettera, ce temps béni des taux bas. On pleurera de ne pas en avoir plus profité. La peur des taux négatifs annonciateurs de crise majeure recule. Aux États-Unis, le point bas des bons du trésor s’éloigne : il était à 1,4% début septembre, les voilà à 1,7%. En France, nous sommes à -0,2%, mais plus à -0,45% de fin août. Bientôt, on va voir remonter les taux des crédits aux entreprises et surtout aux logements pour les ménages. Les entreprises ont vu le changement : elles mettent les bouchées doubles pour la dette. En France, leurs emprunts bancaires ont ainsi augmenté de 72 milliards d’euros en juillet (soit +7,3% sur un an, à un taux de 1,35%, une tendance régulièrement croissante) et leur financement par les marchés de 31 milliards (soit +4,9% sur un an, à un taux de 0,57%). C’est la même chose pour les ménages : 7 milliards de plus de crédit à l’habitat en juillet, un record, +6,5% en un an ! 

Caramba, encore raté ! 0,1% de déficit public de plus que prévu par rapport au PIB, comme si c’était le problème de nos finances publiques en France ! Le déficit budgétaire français serait de 2,2% en 2020, faute de réussir 2,1% ! On nous explique que la « faute » en est aux tensions mondiales qui ont pesé sur la croissance et qui n’ont pas permis de satisfaire les engagements pris, suite aux « gilets jaunes ». « Gilets jaunes » plus Trump, donc ! Mais c’est oublier les municipales qu’il faut préparer d’un côté, les « réductions d’effectifs que l’on réduit » de l’autre, parce que c’est bien difficile. Le quinquennat seraentièrement déficitaire, allant vers 1,8% de déficit public par rapport au PIB en 2021, un quinquennat de plus. Nos décideurs ont pourtant longtemps cherché à faire des économies ici ou là, pour 3 milliards, sans vraiment réduire le nombre de fonctionnaires, ce qui pourrait paraître une voie. Qui sait ? Et pourtant, la charge de la dette devrait baisser au moins de 2 milliards en 2019, et de 4 en 2020 : 10% du total ! Jamais les taux d’emprunt de la dette publique n’ont été aussi bas, la France vient d’emprunter 3,9 milliards à 10 ans à un taux de -0,36% et 1,5 milliard à 15 ans à 0,03%.

La France s’endette à des conditions exceptionnellement favorables pour maintenir sa croissance actuelle, mais sans se soucier de sa croissance future. Ainsi, elle est la quatrième économie du monde par la dette de son secteur privé (entreprises et ménages) par rapport à son PIB avec 133,2%, contre 151,8% pour le Japon, premier, 151,7% pour le Royaume-Uni deuxième, 148,3% pour les États-Unis troisième. Elle est aussi la quatrième économie du monde par la dette du secteur public par rapport au PIB, avec 98%, derrière le Japon bien sûr (238%), l’Italie (132%) et les États-Unis (106%). Et, avec tout cela, nous avons 1,3% de croissance aujourd’hui, et pas beaucoup plus demain !

Ah, si on empruntait autant, sinon plus,à ces conditions pour rénover les ponts et améliorer les réseaux électriques et de distribution d’eau, tout en faisant par ailleurs des économies de fonctionnement en modernisant l’administration ! Ah, si on mettaitces financements si peu chers et à long terme face à des projets rentables à long terme. Ah, si on cessait de faire entrer toutes les ressources en face de toutes les dépenses dans ce grand « budget » incompréhensible ! Ah, si on utilisait des échéanciers et adoptait une logique par projets,non pas une logique de caisse ! 

Quels choix fait-ondonc, en France, pour figurer notre futur ? Tantôt, nous supposons que la situation mondiale s’améliore, autrement dit que les tensions géopolitiques diminuent : il faut donc en profiter d’autant plus pour investir dans les technologies du futur, avant que les taux ne remontent plus ! Tantôt, nous craignons que la situation ne se détériore, Chine, Iran… et les taux baisseraient encore. Alors, il faut en profiter plus, sinon plus que les autres pays, pour investirdavantage dans les technologies du futur en aidant les entreprises !

Le temps perdu des taux bas ne se rattrape pas. Si l’avenir coûte moins cher à renforcer en profondeur, il ne s’agit pas d’en tirer avantage pour améliorer le présent en surface en gagnant ici sur les personnes âgées, ailleurs en sous-indexant les allocations familiales à 0,3%, tandis que le nombre de postes de fonctionnaires supprimé sera plutôt 15 000 que 50 000 sur le quinquennat, faute de politique de modernisation et de simplification. C’est au contraire le travail des politiques que de profiter de ces taux longs si basnon pour la prochaine élection, mais pour la prochaine génération ! Pas sûr que ceci soit compris. Le rabot budgétaire n’est pas l’outil du futur !Pendant ce temps, les économistes débattent, les gilets et autres défilent, les politiciens combinent et les taux montent.

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