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Beauvau de la Sécurité : mais comment est géré le budget du ministère de l’intérieur pour que les policiers manquent autant de moyens malgré une augmentation constante depuis des années ?
©LUDOVIC MARIN / AFP

Panier percé

Emmanuel Macron vient d’annoncer un “Beauvau de la sécurité” et le déblocage immédiat d’un budget d’un milliard et demi pour le ministère de l’intérieur.

Philippe Dominati

Philippe Dominati

Philippe Dominati est sénateur de Paris (apparenté LR).

 

 

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Philippe Dominati est sénateur de Paris (apparenté LR) et rapporteur de la commission des finances sur le budget sécurité

Atlantico.fr : A quoi va servir le déblocage de plus d’un milliard et demie d’euros pour le ministère de l’Intérieur ? Est-ce enfin les bons postes de dépense qui sont ciblés ?

Philippe Dominati : Sur deux ans, un milliard et demi d’euros vont être affectés à l’équipement et à l’investissement de nos forces de l’ordre. Cela comprend des fournitures en équipement, en dépenses courantes, des gilets, des armes, des caméras piétons... Ce budget répond surtout à deux préoccupations des dernières années : le parc automobile (avec le renouvellement d’un véhicule sur quatre) et l’immobilier. Cela vient inverser une tendance longue de budget pauvres. On peut considérer qu’il s’agira d’une progression de 20 % sur ces deux postes de dépenses.

Ce n’est pas une fin en soi. Nous saluons ce budget parce que nous sommes cohérents. Pendant quatre ans, le Sénat n’a pas voté les budgets de la mission Sécurité, alors que l'usage était de voter les budgets régaliens, que ce soit celui de la Défense ou celui de l'Intérieur. Tout simplement parce qu'il y avait un dérapage sur les dépenses du personnel, au détriment de l’équipement du policier.

Il faut souligner que c’est le plan de relance qui est venu tout bouleverser. Au départ, le budget de la mission Sécurités était, comme d'habitude, triste et pauvre sur le plan des moyens alloués aux policiers. Mais le plan de relance a permis au gouvernement d'injecter des crédits. Il n’y avait pas un euro de prévu pour l'armement de la gendarmerie dans la mission Sécurités, mais dans le plan de relance 11 millions d’euros sont alloués. C'est donc le plan de relance qui permet de combler les failles de la mission Sécurités. Comme Darmanin a été ministre des comptes publics (il refusait d’ailleurs à Castaner un tel budget) et qu’il connait les portes dérobées de Bercy, il a pu doter le ministère de l'Intérieur en investissement immobiliers et en investissement dans le parc automobile. Il a stoppé l'hémorragie d’un parc vieillissant. En tant que rapporteur, j'ai pris acte du fait qu'il y avait des moyens qui semblaient inverser la tendance. 

Mais il s’agit là d’un budget d'aubaine et d'exception. Ce qui comptera, c'est de pérenniser ces moyens. Pour l'instant il y a que des mots, et une certaine pagaille. Le livre blanc de la sécurité intérieure est sorti il y a à peine un mois, plus personne n'en parle. Emmanuel Macron annonce un "Beauvau de la sécurité" mais fait fi du livre blanc qu'il a lui-même commandé à Christophe Castaner. Ce livre blanc est en fait très décevant. Rien de comparable avec le livre blanc pour la défense nationale où il y avait des objectifs chiffrés, avec le matériel détaillé et l'obligation pour le gouvernement de respecter année après année l'équipement de notre défense nationale. 

Atlantico.fr : Le budget du ministère connaît des hausses successives chaque année mais la police semble toujours manquer de moyens, notamment matériels. Est-ce que l’argent alloué ne va pas dans des dépenses utiles ? Où va-t-il et pourquoi n'est-il pas alloué correctement ?

Philippe Dominati : Après la vague terroriste de 2015, la doctrine a été d'augmenter les effectifs là où Nicolas Sarkozy en avait supprimé. C’était une réponse politique compréhensible à une situation nouvelle. Mais cela s'est fait au détriment des dépenses fonctionnement et de l'investissement. 

Sous Sarkozy, 80 % de la masse budgétaire allait aux agents et 20 % pour le fonctionnement et l'investissement. Aujourd'hui, c'est respectivement 90 % et 10 %. Le parc automobile a vieilli, les formations se sont réduites (de douze mois à huit mois à la fin du quinquennat Hollande). Pour vulgariser, pour trois postes créés, on supprimait une voiture. On s’est retrouvé avec un malaise et des agents de l'Etat qui n'ont plus les moyens d'accomplir leurs missions. Ce constat, déjà bien ancré il y a quatre ans, s'est confirmé avec Emmanuel Macron alors qu'on aurait pu s'attendre à ce qu'il fasse table rase pour réformer. Chaque année, on s'est retrouvé avec la même copie budgétaire, preuve que le sujet n’était pas une priorité gouvernementale. 

Quelques chiffres pour résumer la situation : en dix ans, les dépenses de personnels ont augmenté de 23 %, les effectifs seulement de 6%. Le fonctionnement et l'investissement ont eux diminué de 0.4 % 

Atlantico.fr : Où faudrait-il précisément investir en priorité pour que la police fonctionne mieux sans que l’on ait chaque année à devoir augmenter son budget ?

Philippe Dominati : Il faut investir durablement dans la formation, l’équipement et les locaux de nos forces de l’ordre.

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