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Les Etats-Unis 
se rachètent une image
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Barack Obama réoriente sa politique étrangère au Moyen Orient en se plaçant clairement du côté des mouvements démocratiques. Il annonce un soutien financier pour l'Egypte et la Tunisie. C'est aussi l'occasion de redorer le blason américain tant l'image du pays dans la région est écornée, et ce malgré les révolutions arabes.

Entre la carotte et le bâton, le président américain semble privilégier la première option.

Dans un discours très attendu hier, Barack Obama a apporté hier un soutien appuyé (et financier) aux mouvements démocratiques qui se soulèvent contre des régimes autoritaires au Moyen Orient. Le président américain a expliqué que, faute d'un profond changement d'approche des Etats-Unis dans la région, le risque est grand de se couper définitivement des populations arabes. Fini le temps des hésitations et des tergiversations (comme celles, très critiquées, de M. Obama vis-à-vis d'Hosni Moubarak en Egypte). Les Etats-Unis s'engagent avec fermeté pour encourager tous les processus de démocratisation : la défense acharnée des intérêts stratégiques américains devra donc s'effacer devant la promotion des réformes politiques et économiques. "Nous avons une chance de montrer que l'Amérique attache plus de valeur à la dignité d'un vendeur de rue qu'à la force brutale du dictateur", a indiqué le président américain.

M. Obama a évoqué un vaste plan d'aide financière à destination des pays d'Afrique du Nord et du Moyen Orient dont les régimes autoritaires ont été renversés ou ébranlés par des mouvements populaires au cours des derniers mois. Il s'agit de s'inspirer du "plan Marshall" dont a bénéficié l'Europe de l'Ouest au sortir de la Seconde guerre mondiale. La Tunisie et l'Egypte en seront les premiers bénéficiaires. Barack Obama proposera au G8 de Deauville d'alléger la dette égyptienne d'un milliard de dollars. Un programme pour favoriser les investissements au Caire et à Tunis a également été évoqué.

Le redéploiement de la stratégie américaine s'appuiera notamment sur la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) dont les activités pourraient être étendues en Afrique du Nord lors de sa réunion annuelle qui se tient ce week-end à Astana.

Après le discours du Caire de 2009, cette nouvelle inflexion dans la politique étrangère des Etats-Unis intervient alors qu'une vaste étude du Pew Research Center démontre que l'image du pays n'a pas profité des révolutions arabes, bien au contraire. Les pays musulmans stratégiques conservent une opinion négative des Etats-Unis - ce qui est une constante depuis 10 ans. Ce sentiment s'est en revanche renforcé cette année en Turquie, au Pakistan et en Jordanie. Tous les pays sondés ci-dessous considèrent par ailleurs que leur intérêts ne sont pas suffisamment pris en compte par les Américains toujours perçus comme une menace. 


L'étude a été menée avant la mort de Ben Laden et la réconciliation entre le Hamas et le Fatah en Palestine. Elle démontre qu'à l'exception de l'Indonésie, Barack Obama reste impopulaire dans toutes les nations arabes. Ses prises de position (d'abord timides) à l'égard des récents mouvements démocratiques tunisiens, égyptiens ou libyens n'ont rien arrangé, loin de là. Les Etats-Unis sont d'ailleurs toujours critiqués pour les mêmes raisons. Au premier rang des griefs, une trop forte propension à agir de manière unilatérale. Reste également vivement critiquée la "croisade" contre la terreur entreprise par Geoge W. Bush. A noter que les Pakistanais, les Libanais et les Jordaniens considèrent que leurs gouvernements collaborent trop directement avec les Etats-Unis.

A en croire les opinions publiques du monde arabe, le redéploiement de la politique étrangère américaine en faveur des mouvements démocratiques serait susceptible de trouver un certain écho. Les populations du Moyen Orient ont en effet largement suivi les soulèvements populaires tunisiens et égyptiens, et elles y croient. 71 % des Libanais et 73 % des Jordaniens pensent que les protestations sont efficaces pour déclencher des réformes démocratiques. Les Turcs (36 %) et les Pakistanais (12 %) sont nettement plus circonspects.

L'étude du Pew Research Center montre qu'il existe une large adhésion au système démocratique dans tous les pays arabes. Celui-ci est perçu comme la meilleure forme de gouvernement possible, bien plus efficace qu'un leader autoritaire pour résoudre les problèmes nationaux. Le constat est plus nuancé quand il s'agit de choisir entre la démocratie et la croissance : Indonésiens et Pakistanais privilégient une économie dynamique, et les autres nations sondées sont divisées. De la même manière, c'est la prospérité économique et la stabilité politique qui sont majoritairement recherchées via la démocratie, avant la liberté d'expression ou l'égalité des sexes.

Si 78 % des Pakistanais et 62 % des Égyptiens estiment que les lois doivent s'inspirer directement du Coran, 37 % des Turcs et 31 % des Libanais pensent que leurs législations ne doivent pas avoir de rapport avec les affaires religieuses. Le fondamentalisme religieux est rejeté partout, sauf au Pakistan et dans les territoires palestiniens où il trouve davantage de partisans que d'adversaires. 

Les mouvements extrémistes ne sont nulle part majoritairement appréciés. Al Qaïda est rejeté dans tous les pays, à l'exception des territoires palestiniens où l'organisation recueille 28 % d'opinions favorables. Le Hamas et le Hezbollah sont plus populaires que la nébuleuse terroriste, mais tous les pays rejettent les attentats suicide, mis à part - encore une fois - les Palestiniens qui justifient, pour 68 % d'entre eux, les actions kamikazes.

Dans son discours de ce jeudi 19 mai, Barack Obama a mis l'accent sur deux priorités : appuyer les mouvements démocratiques en leur offrant les conditions d'un essor économique et relancer le processus de paix entre Israël et les territoires palestiniens. Deux ambitions qui, selon l'étude de Pew Research Center, sont loin d'être dues au hasard.

C. Mal

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