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700 patrons proposent 20 mesures pour faire bouger le monde de l’entreprise
©Reuters

Une question de volonté

La Chambre de commerce et d'industrie de Meurthe-et-Moselle a récemment fait appel à près de 700 entreprises pour établir un diagnostic des freins à la croissance des PME dans le pays. Si tous les thèmes ont été abordés à travers trois thématiques que sont l'emploi, la fiscalité et la règlementation, il faudra surtout au gouvernement du courage pour aider les entreprises.

François Pelissier

François Pelissier

François Pélissier est le président de la Chambre de commerce et d'industrie de Meurthe-et-Moselles depuis 2011. Entrepreneur, il est également le Président directeur général et fondateur d'Ecologgia, une entreprise du domaine de la construction écologie.

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Atlantico : Vous avez émis, à l'issue de deux colloques réunissant 700 chefs d'entreprise, une liste de 20 propositions pour dynamiser les entreprises en France. Celles-ci résonnent comme un diagnostic des principaux problèmes qui bloquent les entreprises françaises aujourd'hui. Quelle analyse faites-vous aujourd'hui de ce blocage ? Se situe-t-il davantage au niveau du poids du passé ?

François Pelissier : Je pense qu'il y a une incapacité en France de passer du diagnostic à l'action. Par exemple, sur les sujets qui touchent l'aspect fiscal, réglementaire, et social, les grandes réformes n'ont pas été mises en oeuvre, sans doute, et c'est bien là le fond du problème, par méconnaissance des PME. Il y a aussi un vrai problème à anticiper l'avenir, ça a été le cas avec la mondialisation, et à faire les choix en conséquence. On se retrouve alors avec un poids fiscal qui est trop élevé, une réglementation compliquée et de surcroît instable qui freine l'innovation et le développement, et un carcan social qui lui empêche de véritablement s'adapter au contexte international et la fait sortir de facto du champs compétitif face aux Américains et aux asiatiques.

Le chemin vers le développement d'une entreprise est jonché d'un certain nombre de contraintes. Dès lors qu'une entreprise commence à se développer, elle doit faire face à des effets de seuil, 10 puis 50 pour ne citer que ceux-là, qui constituent des contraintes non justifiées puisqu'en dessous de 100 salariés, le dialogue social ne nécessite pas qu'il soit encadré aussi lourdement qu'il l'est aujourd'hui.

Le gouvernement auraît-il du mal à innover ? Comment cela s'illustre-t-il ? 

On peut le dire comme ça, même si c'est davantage un manque de courage selon moi. Les élites politiques se refusent à affronter un certain nombre d'évidences en ce qui concerne les PME, qui a contrario des grandes entreprises, sont souvent confinées à un champs territorial spécifique, et qui sont difficiles à assurer compte tenu des contraintes sociales et réglementaires évoquées. Au cours des sept dernières années, on a vu apparaître un certain nombre de textes de lois qui vont tous dans le même sens, à savoir rendre la vie des entreprises toujours plus complexes. Pour illustrer cela, c'est bien simple : il y a plus d'une trentaine de formes de contrats de travail dans le dispositif réglementaire, et je ne comprends pas ce qui empêche la création d'un seul et même contrat dont les droits et les garanties augmenteraient au fil du temps ! Malheureusement, nous en sommes encore au stade d'un décallage idéologique avec la réalité. Je pense qu'il subsiste encore une méfiance vis-à-vis des PME alors que l'entrepreneur aujourd'hui essaye de mettre en place des structures qui sont les seules pourvoyeuses de richesses, et qui peuvent protéger l'emploi si on lui permet une certaine facilité de gestion, sur l'apprentissage, sur la formation professionnelle, sur la capacité d'investir ou la réglementation, qui sont autant d'espaces managériaux et organisationnels.

Dans la liste des 20 propositions, un mot revient souvent, celui de la confiance des chefs d'entreprises. En quoi l'action du gouvernement actuel contribue-t-elle à ce climat ?

Vous avez raison, un entrepreneur a besoin de sérennité et de sécurité. Il y a tellement aujourd'hui d'instabilité dans la perspective économique, qu'il ne faut pas rajouter en plus une instabilité règlementaire. Pour le CICE par exemple, là où on aurait pu tout simplement faire une simple baisse des charges, on rajoute encore, alors que la mesure est réputée être favorable aux entreprises, une lourdeur administrative qui petit à petit n'est plus supportable pour les PME. La simplification administrative qui est envisagée en ce moment doit aller vite si elle veut vraiment être satisfaisante. Il faut libérer nos énergies dans les PME. A partir du moment où il n'y a pas de croissance, où les financements sont difficiles d'accès et les marges sont érodées, les capacités de manoeuvre sont quasiment inexistantes ! Or il y a beaucoup de mesures qui ne coûtent rien ! Supprimer les seuils, simplifier le contrat de travail, alléger les procédures d'instruction d'un permis de construire, de la création d'entreprise, tout cela ne coûte rien !

Quelles sont d'après vous les propositions qui expriment le plus l'audace parmi les vingt qui ont été reçues ?

Je pense que supprimer les seuils en dessous de 100 salariés est déjà audacieux. On a pour habitude en France de considérer que les textes de loi doivent s'appliquer à tout le monde de la même manière. Le temps de travail partagé, le dialogue social, peuvent être personnalisés dans un mode contractuel et non législatif. Il faut que le contrat reprenne ses droits vis-à-vis de la loi qui est paralysante et complexe. Comme dans le domaine de l'écologie, on traite en France de manière punitive et non pas de façon incitative.

Pourtant, on a pu constater les multiples démarches qui allaient dans le sens des négociations, et notamment avec une forte consultation du Medef...

J'ai beaucoup aimé le propos de Monsieur Schröder lors de son passage à Nancy, lorsqu'il disait que le dialogue social devait à un moment donné être mis de côté pour passer à l'action. Et c'est exactement ce dont on a besoin. Lorsque je constate que les dépenses des collectivités territoriales ont augmenté en 2013, où se trouve le plan de la baisse de la dépense publique ? On ne se pose pas les questions de manière claire et franche sur les retraites ou le droit du travail. Alors qu'à l'image des Allemands, des Anglais ou des Italiens, on pourrait changer de braquet.

Le fruit de votre analyse s'appuie sur de nombreuses comparaisons statistiques avec la Grande-Bretagne et l'Allemagne. L’émergence d'un modèle français est-il concevable ? A quoi pourrait-il ressembler ?

Je pense qu'il faut que l'on revienne à une logique de contrat social, que l'on redéfinisse clairement ce qu'est le rôle de l'entreprise et quelles sont ses objectifs, c'est à dire générer de la richesse, pour ensuite et seulement ensuite pouvoir recruter. Aujourd'hui, tout ce que l'on pense ou dit sur l'emploi est le résidu d'une forme de droit social. Alors que l'emploi n'est que le résultat d'une entreprise en développement. Il faut donc leur redonner de l'air, via les bonnes mesures, et cela ne nécessite que du courage pour les appliquer.

Voir l'intégralité des 20 propositions :

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