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5 milliard d’amendes et même pas mal : mais comment Facebook se débrouille-t-il pour ne jamais payer le vrai prix de ses multiples "péchés" ?
©KIMIHIRO HOSHINO / AFP

Image écornée ?

La Federal Trade Commission vient d'infliger une amende de 5 milliards de dollars à Facebook. Comment Facebook parvient-il toujours à retourner toutes les situations à son avantage alors qu’il ne respecte ni les règles, ni ses propres engagements ?

Daniel Ichbiah

Daniel Ichbiah

Daniel Ichbiah est écrivain et journaliste, spécialisé dans les jeux vidéo, les nouvelles technologiques, la musique et la production musicale.

Il est l'auteur de nombreux best-sellers tels que La Saga des jeux vidéos, Les 4 vies de Steve Jobs, Rock Vibrations, Le Livre de la Bonne Humeur, Bill Gates et la saga de Microsoft, etc. Daniel Ichbiah a aussi écrit : Qui es-tu ChatGPT ?

Parmi les biographies musicales écrites par l’auteur figurent celles du groupe Téléphone, de Michael Jackson, des Beatles, d’Elvis Presley, de Madonna (il a également publié Les chansons de Madonna), des Rolling Stones, etc. 

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Atlantico.fr : Ce mercredi, la Federal Trade Commission a infligé une amende de 5 milliards de dollars à Facebook pour avoir violé les termes d'un accord préalable conclu en 2012. Ces violations incluent le scandale Cambridge Analytica mais également d'autres erreurs de confidentialité de Facebook, notamment son utilisation de la technologie de reconnaissance faciale etc. Mark Zuckerberg ne semblait ni surpris, ni embarrassé par cette amende et entend déjà profiter de cette occasion pour redorer l'image de Facebook. Comment le groupe parvient-il toujours à retourner toutes les situations à son avantage alors qu'il ne respecte ni les règles ni ses propres engagements ?

Daniel Ichbiah : Facebook est avant tout coupable de négligence, mais pas de malveillance. Dans le cas du Cambridge Analytica par exemple, un chercheur russe (Alexander Logan) avait créé une application de test de personnalité à laquelle 273 000 personnes ont répondu et les gens eux-mêmes autorisaient l'application à accéder à leurs données personnelles et à celles de leurs amis. Alors que c'est écrit noir sur blanc à l'écran, les personnes cliquent sans faire attention. Là où Facebook a fauté dans l'affaire, c'est quand, par la suite, Cambridge Analytica (société en partie fondée par Steve Bannon) a contacté le chercheur russe parce qu'ils étaient intéressés par les données collectées. La faute de Facebook tient à ce que, lorsqu'Alexander Logan a contacté Facebook pour faire changer le statut de son application,  quelqu'un chez Facebook a accepté de la passer en application commerciale. A partir du moment où le statut a changé, Alexander Logan a pu vendre ces données à la société de Steve Banon qui s'appelle Cambridge Analytica, lesquelles ont été utilisées pour favoriser l'élection des Républicains aux Etats-Unis. En autorisant le changement de statut de l'application, Facebook a donné le droit à Logan de vendre les données de son application à Cambridge Analytica, laquelle les a utilisées pour favoriser l'élection de Trump entre autres.

Quand vous gérez une société de la taille de Facebook, c'est difficile de contrôler tous les détails. Là où Zuckerberg a failli, c'est parce qu'il n'avait pas prévu ce qu'il adviendrait de son groupe. Quand il gère un logiciel, 1/3 de l'effectif s'occupe de prévoir ce que les gens peuvent en faire. De nos jours, quand vous lancez une application sociale, vous devez prévoir tout ce qui pourrait se passer. Mark Zuckerberg est un grand humaniste malgré tout, opposant farouche à Donald Trump lui-même : apprendre qu'il avait créé une application qui a permis à une personne d'être élue l'a brisé. Il a fait amende honorable parce que son souci est qu'il veut laisser une bonne image de lui dans l'Histoire. Il sait que l'Histoire va se rappeler de lui et voudrait que l'Histoire le retienne comme ayant été quelqu'un de vertueux.

Lors de son appel des résultats trimestriels d'avril, Facebook a annoncé qu'il mettrait 3 milliards de dollars de côté pour faire face à l'amende prévue. Peut-on encore atteindre Facebook ? Les amendes affaiblissent-elles vraiment le groupe ?

C'est vrai que la FTC a commencé à taper sur les doigts de Facebook en 2010. Avant 2010, ce que l'on publiait sur Facebook était visible par tous les amis Facebook de la personne. A partir de 2010, tout est devenu public ce qui fait que chacun peut aller voir ce que l'autre publie. Il y a eu à l'époque une grande levée de bouclier. Zuckerberg avait promis de faire attention : ses promesses ont-elles été violées par le Cambridge Analytica ? Sans doute. Un certain nombre de groupes de défense de service public ont commencé à protester contre les procédés de Facebook.

Facebook fera probablement appel, s'ils sont en mesure de le faire, ne serait-ce que pour sauver un peu leur image. Facebook fait partie des boîtes, comme Google ou Amazon, qui ont atteint une telle taille que plus grand-chose ne pourrait les atteindre. En Avril 2018 il y a eu la campagne pour se désabonner de Facebook sur Twitter etc. qui a touché 10 000 personnes, pas plus. Pour beaucoup de gens, se désabonner de Facebook revient à arrêter d'utiliser son téléphone mobile parce qu'Apple ou Android aurait mal agi. La plupart d'entre nous ne peuvent pas se passer de Facebook : c'est devenu un service aussi répandu que le téléphone mobile et la télévision.

Dans le règlement de 2012, Facebook a accepté de "donner un avis clair et visible aux consommateurs" et d'obtenir un "consentement exprès" lors du partage de données d'utilisateur. Le groupe a-t-il véritablement la volonté d'évoluer ou est-ce une impression qu'il donne ? A quoi peut-on s'attendre ?

Le vrai problème c'est que tout est écrit noir sur blanc depuis 2012, visible par n'importe qui. Les applications demandent parfois le droit de publier en notre nom. S'il y a quelque chose à changer, c'est de savoir s'il faut dès le départ changer la façon dont fonctionnent les applications et essayer de comprendre la façon dont elle fonctionne. Par exemple, pourquoi Airbnb aurait besoin de connaître nos goûts personnels etc. ? Pourquoi dans ce cas leur donne-t-on accès à nos données ? La plupart des applications font ces collectes de données à des fins très précises. Pour la plupart, elles ne cherchent pas à utiliser nos données à des fins irrespectueuses. Si l'on pouvait reprocher quelque chose à Facebook, c'est de ne pas nous avoir suffisamment prévenus du fonctionnement des applications etc. Ce qui pourrait être bien, c'est que Facebook avertisse et demande notre confirmation lorsque les applications demandent des informations personnelles etc. Ce n'est pas encore suffisamment le cas.

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