4 millions d’euros en guise de bienvenue pour le nouveau patron de Sanofi : pourquoi le mode opératoire est bien plus choquant que le montant<!-- --> | Atlantico.fr
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Olivier Brandicourt va recevoir 4 millions d'euros de bonus
Olivier Brandicourt va recevoir 4 millions d'euros de bonus
©Reuters

C'est cadeau

Olivier Brandicourt, dont la nomination a été annoncée la semaine passée, sera gratifié de deux généreux bonus de bienvenue. Des "cadeaux" qui ont fait réagir, principalement, au sein du gouvernement. Stéphane Le Foll a en effet qualifié le montant "d'indécent".

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Une grande partie de l’opinion publique a exprimé, et on peut le comprendre, son indignation en apprenant que le nouveau patron de SANOFI recevait une petite prime d’arrivée de 2 millions d’euros, rapidement doublée en 2016 si le jeune recruté donnaît satisfaction à ses actionnaires. Alors que la modération salariale est de mise dans les entreprises françaises et que, consciencieusement, SANOFI a limité ses dernières années tous les avantages consentis aux salariés, ce traitement de faveur pour son nouveau patron ne peut que susciter des réactions négatives. Le débat sur cette prime de bienvenue rejoint ici le débat peu tranché mais récurrent des retraites chapeau. Le nouveau patron de SANOFI a en effet demandé à percevoir en cash une parties des avantages auxquels il avait renoncé en quittant son précédent poste.

Vu sous cette angle, le bonus de bienvenue prend un tout autre sens : faute d’un système de répartition entre dirigeants d’entreprise, et faute d’une externalisation souple des avantages qui leur sont dus par le contrat ou le mandat qui les lie aux entreprises qu’ils dirigent, les patrons demandent à l’entreprise d’internaliser les provisions qui servent à financer leurs avantages.

C’est un peu comme si, faute d’un système de retraite par répartition, l’entreprise versait à chaque salarié, au moment où il quitte l’entreprise, la totalité des cotisations retraite qui permettront d’assureur ses vieux jours.

Autrement dit, si les retraites n’existaient pas en France, les salariés se réjouiraient, en quittant au bout de dix ans une entreprise où ils étaient payés 2.000 euros par mois, de percevoir une somme de 120.000 euros : elle leur permettrait de se constituer un capital pour préparer leur rente future, lorsqu’ils arrêteront de travailler. Si leur contrat de travail ne prévoyait pas un tel versement anticipé au bout de dix ans, ils ne manqueraient pas de demander à l’employeur qu’ils rejoignent de reprendre à son compte les avantages acquis dans l’entreprise précédente, et ils trouveraient justifier de recevoir 60.000 euros à leur arrivée, et 60.000 euros supplémentaires au bout de deux ans. Peut-être même trouveraient-ils ce pari trop risqué et exigeraient-ils de percevoir tout de suite la totalité de la somme.

Rappelons que, pour percevoir une retraite de 2.000 pendant 20 ans, il faut un capital d’environ 400.000 euros. Cette seule somme permet de mesurer l’effort à fournir pour assurer les vieux jours d’un salarié.

Bien entendu, ce mécanisme prend des proportions effrayantes quand les sommes en jeu touchent à des rémunérations colossales. Certaines entreprises doivent parfois provisionner plusieurs dizaines de millions d’euros pour assurer la retraite chapeau de quelques personnes.

Il existe pourtant un moyen de moraliser la rémunération des parachutes : l’externalisation. Au lieu de demander aux finances de l’entreprise de supporter l’effort, les avantages qui entourent la rémunération des dirigeants devraient donner lieu à des provisions mensuelles obligatoires, versées à un organisme gestionnaire extérieur. Cet effort d’épargne permettrait de garantir au dirigeant qui quitte l’entreprise de conserver ses avantages acquis. Il éviterait ainsi aux entreprises qui les recrutent de devoir constituer des bonus de bienvenue, puisque les avantages à reprendre seraient garantis ailleurs. Cette mécanique aurait un autre avantage : elle serait fiscalement vertueuse, puisque le dirigeant s’acquitterait de cotisations sociales en bonne et due forme au moment où il percevrait ses sommes. 

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