"De la vérité en politique" : et François Bayrou écrivit sa sortie du désert <!-- --> | Atlantico.fr
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Dans son dernier livre, François Bayrou esquisse des solutions aux crises dans le monde.
Dans son dernier livre, François Bayrou esquisse des solutions aux crises dans le monde.
©Reuters

La vérité si je mens

Dans son livre "La vérité en politique", François Bayrou, candidat malheureux du Modem à la présidentielle, donne sa vision de l'état du monde. Il ne manque pas d'esquisser des solutions, qui s'imposeront, selon lui, bientôt à tous.

Jean Garrigues

Jean Garrigues

Jean Garrigues est historien, spécialiste d'histoire politique.

Il est professeur d'histoire contemporaine à l' Université d'Orléans et à Sciences Po Paris.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages comme Histoire du Parlement de 1789 à nos jours (Armand Colin, 2007), La France de la Ve République 1958-2008  (Armand Colin, 2008) et Les hommes providentiels : histoire d’une fascination française (Seuil, 2012). Son dernier livre, Le monde selon Clemenceau est paru en 2014 aux éditions Tallandier. 

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L’homme providentiel est de retour. Naguère gaullien lorsqu’il publiait en 2007 son Projet d’espoir, référence explicite aux Mémoires d’espoir du général, voici que François Bayrou se réclame dans son dernier ouvrage de deux autres grandes figures de notre histoire politique contemporaine : Pierre Mendès France et Raymond Barre.

Passé le choc de sa cuisante défaite de 2012, le président du Modem creuse à nouveau le sillon du recours, face à un monde politique qui se refuse selon lui à regarder la vérité en face et qui ment aux Français. Dans l’héritage de ces grands modèles référents que furent le président du Conseil de la IVe République et le Premier ministre de la Ve, François Bayrou revient sur la scène politique pour dire la vérité aux Français. La thèse de son livre, nous dit-il, est "que la vérité dite au peuple, partagée avec le peuple des citoyens, est la clé de tout redressement." Cette vérité, qu’il annonce depuis 2002 mais qui a été selon lui évacuée des campagnes présidentielles de 2007 et 2012, s’impose désormais à tous, et il lui revient de la dire.

La vérité, c’est bien sûr la profondeur de la crise financière, économique, sociale et morale qui gangrène la société française depuis des décennies. La vérité, c’est un système politique bipolaire usé jusqu’à la corde, rongé par "la pratique généralisée du mensonge, du bluff, de l’abêtissement collectif et du déni de réalité." Dans la première partie de sa démonstration, François Bayrou s’attache à montrer au contraire que la vérité est la condition même de la démocratie. Il définit ce que doit être la recherche de cette vérité démocratique, fondée sur l’exploration patiente des faits, à rebours des clichés, des formules et des fantasmes électoralistes, tel que celui d’une France refermée sur ses frontières. Aux habiles, aux séducteurs, aux endormeurs du ronron politicien, il oppose les "trois figures du parti de la vérité", l’intransigeance de Mendès France, la hauteur de vues du général de Gaulle et la pureté orgueilleuse de Raymond Barre.

De sa propre expérience, de son chemin parsemé de combats, il retire l’impression d’un système politique fondé sur l’opacité. Justifiant son choix du second tour de 2012, il explique que ce fut un choix par défaut entre d’un côté les illusions proposées par la campagne de François Hollande et de l’autre les divisions suscitées par celle de Nicolas Sarkozy. Persuadé que les divisions menaient le pays à sa perte tandis que les illusions finiraient par se dissiper, il a choisi le candidat socialiste.D’où la nécessité d’une troisième voix, d’un pluralisme que la réforme du mode de scrutin devrait permettre.  D’où une politique d’urgence nationale, visant à restaurer les forces de création et de production, et susceptible de rassembler une majorité de Français, de la gauche réformiste à la droite républicaine, à condition que soit levé le monopole de la bipolarisation. D’où un Etat rendu plus accessible, plus lisible au citoyen, par l’allègement et la simplification de nos structures. D’où enfin un "nouveau siècle de l’Europe", c'est-à-dire une véritable politique européenne, fondée sur l’élaboration commune d’une stratégie d’avenir et sur l’incarnation de son pouvoir par un président de l’Union légitimé par le suffrage des peuples.

"Il faudra peu de mois", conclut François Bayrou, pour que s’imposent à tous les solutions qu’il propose. Peut-être a-t-il à l’esprit les lendemains d’élections municipales qui seraient fatales aux deux grands partenaires de la bipolarisation. Peut-être se rêve-t-il dans quelques mois dans les habits du sauveur. Ce serait une issue glorieuse à sa traversée du désert. Au moins ce dernier livre aura-t-il contribué à en dessiner les contours.   

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