"Confidences d’une dermatologue" : la peau, cet organe noble<!-- --> | Atlantico.fr
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dermatologue peau examen médical
dermatologue peau examen médical
©Fred TANNEAU / AFP

Bonnes feuilles

Flora Fischer publie "Confidences d’une dermatologue" aux éditions Robert Laffont. En vingt ans d'exercice à l'hôpital et en cabinet libéral, Flora Fischer a vu se succéder nombre de patients et de pathologies : infestations parasitaires, atteintes génitales, cancers, dermatologie esthétique. Elle livre, avec une grande sensibilité, les secrets d'une profession méconnue, à la fois exigeante et humaine. Extrait 1/2.

Flora Fischer

Flora Fischer

Flora Fischer est médecin spécialiste en dermatologie à Paris. Elle est l’auteure du blog « Les billets d’humeur du docteur », contributrice au Huffington Post et à Causeur.

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Finalement, pourquoi la dermatologie ? Parce que la peau est l’organe noble par excellence. On a beaucoup vanté les mérites de ce cloaque à merde qu’est l’intestin et de son microbiote, alors que les écrits sur la peau sont moins connus du grand public. Les données sont plus confidentielles.

Le professeur Misery et avant lui quelques autres psychodermatologues et psychologues se sont penchés sur cet extraordinaire organe.

Organe noble d’abord d’un point de vue symbolique. On emploie bien, dans le registre intime, l’expression « avoir quelqu’un dans la peau », et pas « avoir quelqu’un dans l’intestin » (sauf si toutefois on abritait un parasite à évacuer sans délai). Le mot « peau » s’intègre ainsi dans de nombreuses expressions symboliques : se mettre dans la peau de quelqu’un, vouloir la peau de quelqu’un… C’est le premier organe de la relation.

C’est forcément un organe noble sur le plan physique. La peau est un élément essentiel de notre apparence, de notre personnalité, de notre identité, de notre culture. Notre peau reflète notre histoire : la couleur, les rides, les rougeurs, les taches… Elle laisse deviner notre état général : les traits tirés, la pâleur, les lèvres violacées, la texture, le teint. Elle varie avec l’âge et ses aléas. Elle extériorise nos émotions. Elle porte des maladies visibles. On cherche régulièrement à l’améliorer par le biais de différents artifices comme le maquillage ou les tatouages.

C’est une barrière protectrice aux propriétés mécaniques et physiques incroyables, qui en font un organe vital. On la décrit même comme une frontière entre l’extérieur et le monde intérieur, le psychique.

C’est un organe sensoriel responsable du toucher. La peau ne contient pas de neurones comme le cerveau mais des terminaisons nerveuses. Ces terminaisons nerveuses sont connectées avec le cortex cérébral, et nous identifions ainsi ce que nous touchons. Cette connexion se fait également avec toutes les zones du cerveau, notamment les zones affectives. La peau est un élément de la communication, de la jouissance mais aussi de la douleur.

À part ces terminaisons nerveuses retrouvées à chaque étage de la peau – sauf la couche cornée (la plus superficielle) –, essentiellement quatre types de cellules sont présentes : les kératinocytes, les cellules de Langerhans (cellules immunitaires), les cellules de Merkel (neurosensorielles) et les mélanocytes (cellules de la pigmentation).

En se penchant sur la physiopathologie de la peau, on comprend pourquoi la peau est également un organe psychique. On dit d’ailleurs « être bien ou mal dans sa peau », « être à fleur de peau ».

Les informations transmises par le cerveau à la peau et aux autres organes comme les glandes endocrines (testicules, pancréas) utilisent le même circuit dans l’autre sens. Les glandes sécrètent ainsi des hormones. Des neuromédiateurs sont des substances chimiques libérées par les synapses, elles circulent dans le sang.

Le système nerveux a une influence sur toutes les fonctions de la peau : la croissance des poils, l’excrétion du sébum, la réaction aux UV, la cicatrisation. Cette influence est observée en physiologie comme dans les situations pathologiques. En effet, au cours de certaines maladies cutanées, surtout celles qui ont une part inflammatoire, il existe un déséquilibre, certains neuromédiateurs s’expriment plus et d’autres moins. Cela a été mis en évidence dans le psoriasis, le vitiligo, la pelade, l’eczéma, ou l’acné, et des pathologies infectieuses (herpès, etc.). Les cellules immunitaires ont des récepteurs pour les neuromédiateurs. L’inflammation est amplifiée par la libération de neuromédiateurs, et la libération d’autres facteurs comme les catécholamines rentre aussi en ligne de compte.

Tout cela explique comment le système nerveux peut influencer certaines pathologies dermatologiques. Le psoriasis est une maladie évoluant par poussées avec des plaques rouges, épaisses, desquamatives, touchant beaucoup les genoux et les coudes mais pas uniquement. Il est dû à une prolifération excessive des kératinocytes (cellules majoritaires de la peau) et à une inflammation après activation pathologique du système immunitaire.

L’état de stress aggrave de nombreuses pathologies cutanées.

Par ailleurs, les maladies dermatologiques peuvent être mal vécues et engendrer des troubles anxieux ou dépressifs. Les atteintes cutanées provenant exclusive‑ ment de troubles psychiatriques (perceptions anormales, délires parasitaires…) sont plus anecdotiques que les deux autres cas de figure.

L’intrication maladies dermatologiques-troubles psychiques est désormais indéniable.

Extrait du livre de Flora Fischer, "Confidences d’une dermatologue", publié  aux éditions Robert Laffont

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