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"Cessez-le-feu" : les sédiments terribles de la guerre
©Reuters

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Comme tous les grands conflits, la guerre 14-18 a marqué au fer rouge tous ceux qui y ont participé. Comment arriver à dépasser les ravages personnels provoqués et souvent tus par les uns et les autres? Un sujet extrêmement grave traité avec force, intelligence et pudeur dans le film d'Emmanuel Courcol, "Cessez-le-feu".

François Quenin pour Culture-Tops

François Quenin pour Culture-Tops

François Quenin est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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CINEMA
Cessez-le-feu
D’Emmanuel Courcol
Avec Romain Duris, Céline Sallette, Grégory Gadebois, Julie-Marie Parmentier
LE RÉALISATEUR
Emmanuel Courcol, 59 ans, après avoir découvert le théâtre au conservatoire d’Angers, sa ville natale, et après sa sortie en 1984 de l’École Nationale des Arts et Techniques, rue Blanche à Paris, a joué dans une trentaine de pièces sous la direction de Roger Planchon, Didier Bezace, Robert Hossein… 
Il a tourné dans une vingtaine de films et séries télévisées françaises comme « Sauveur Giordano », « Le juge est une femme », « Ainsi soient-ils »… Il a co-signé les scénarios des films de Philippe Lioret, « Mademoiselle », « L’Équipier » et « Welcome », nommé au César du meilleur scénario. Il avait réalisé en 2012 un court-métrage avec Julie-Marie Parmentier et Grégory Gadebois que l’on retrouve dans ce premier long-métrage, « Cessez-le-feu ».
THÈME
Georges (Romain Duris) a participé en tant qu’officier à la guerre de 14/18 avec ses deux frères simples soldats. L’un est mort, l’autre, Marcel (Grégory Gadebois), a développé une maladie invisible : il ne parle plus et n’entend plus. Il est emmuré. 
Georges a rompu avec toute cette souffrance. Il est parti vivre dans l’Afrique coloniale française. On le suit après la guerre dans les villages du Sénégal entourés de paysages magnifiques. 
Et puis il revient dans sa Picardie natale où il reprend en charge sa famille. Et fait la connaissance de deux femmes, Madeleine (Julie-Marie Parmentier) qui s’est pris d’affection pour le frère muet. Et Hélène (Céline Sallette), professeur de langue des signes, qui vient le soigner. Peut-être qu’avec la belle Hélène, pas celle d’Offenbach mais l'actrice que nous aimons, Georges pourra prendre un nouveau départ et oublier la guerre.
POINTS FORTS
La première partie de « Cessez-le-feu » se déroule en Afrique Noire colonisée mais pas défigurée par la Seconde guerre mondiale dont les Africains n’ont perçu que les échos – sauf pour ceux qui ont été engagés de gré ou de force. L’environnement est donc magnifiquement préservé.
Du coup, lorsque Georges, le personnage principal qui a fui après la guerre revient dans sa Picardie natale, le contraste est frappant pour le spectateur. Les hôpitaux sont pleins d’estropiés. Les champs sont bourrés d’obus non explosés. L’ancien officier de 14/18 finira d’ailleurs par diriger un groupe d’hommes chargés d’extraire ces obus pour que l’agriculture de la région puisse redémarrer.
Le contraste est frappant aussi quand Georges découvre à Paris, où il se rend pour ses affaires – du commerce de masques et de bois précieux africains, bien sûr – la faune des salons des années folles. Tout le monde veut oublier… Jusqu’à la guerre suivante…
Romain Duris en homme du front qui a cadenacé sa souffrance, nous touche dans sa tentative de survie. Céline Sallette est une aide soignante bouleversante. Comme Julie-Marie Parmentier qui ne pense qu’aux soldats perdus et Grégory Gadebois, toujours juste et émouvant. Sans oublier Wabinlé Nabié qui joue Diofo, l’ami africain et aide de camp de Georges qui lui fait découvrir l’Afrique sauvage au début du film. 
Ce n’est pas la première fois que l’on filme les lendemains de la première guerre mondiale. Bertrand Tavernier s’y était essayé avec intelligence dans « La vie et rien d’autre » (1989). La réussite d’Emmanuel Courcol tient à la saga familiale qu’il met en scène et à la précision de sa réalisation qui restitue une époque dans toute sa complexité. Du grand art.
POINTS FAIBLES
C’est une époque à la fois pas si lointaine et qui pourtant nous apparaît très ancienne depuis que l’Europe s’est réunie pour faire du commerce plutôt que des guerres gigantesques et absurdes. Cette page d’histoire risque donc de passer par dessus la tête des jeunes préférant se projeter dans un avenir toujours plus connecté…
EN DEUX MOTS
A l’origine du projet, il y a l’histoire familiale du cinéaste. La guerre de 14 faisait partie de son univers d’enfant par le biais des récits de sa grand-mère et de son grand-père, Léonce, à qui le film est dédié. Emmanuel Courcol ne l’a pas connu mais il y avait beaucoup de photos de lui en uniforme dans la maison. Il avait 20 ans, ce grand-père, en 1914. A la fin de la guerre, il avait été décoré et était redevenu instituteur. « Un destin de poilu français assez ordinaire en somme, conclut le réalisateur, car ce conflit a impacté pratiquement toutes les familles en France ».
UN EXTRAIT
« J’ai été halluciné quand je me suis retrouvé en Afrique Noire, où je n’étais jamais allé. J’ai été marqué à vie par la beauté et la puissance de ces pays ». Romain Duris
RECOMMANDATION : EXCELLENT

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