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Des avions laissés hors d'usage après le départ de l'armée américaine de Kaboul

Pakistan ou Qatar : qui sera le sponsor des Talibans cette fois-ci ?

État islamique au Khorasan : le groupe extrémiste afghan dont les talibans ont au moins autant de raisons de se méfier que les Occidentaux

Des talibans recréent la photo iconique des soldats américains à Iwo Jima

Afghanistan : le directeur de la CIA, William J. Burns, a rencontré les talibans à Kaboul

<h3>Atlantico : Quel r&ocirc;le le Qatar joue-t-il aupr&egrave;s des Talibans ?</h3>
<p><strong>Emmanuel Dupuy&nbsp;:</strong>&nbsp;Le r&ocirc;le du Qatar est simple. Le pr&eacute;sident Obama voulait engager des n&eacute;gociations discr&egrave;tes avec les talibans alors que cela faisait d&eacute;j&agrave; plus de quatorze ans que les forces occidentales &eacute;taient pr&eacute;sentes en Afghanistan. Le Qatar a servi et sert toujours de m&eacute;diateur.&nbsp; Le Qatar a un r&ocirc;le particulier par la concomitance de son agenda avec celui des Fr&egrave;res musulmans. Le Qatar a des int&eacute;r&ecirc;ts &agrave; d&eacute;fendre dans la r&eacute;gion, tout comme la Turquie.</p>
<p>C&rsquo;est la raison pour laquelle un certain nombre de pays ont d&rsquo;ores et d&eacute;j&agrave; dit qu&rsquo;ils reconna&icirc;tront les talibans tr&egrave;s rapidement.&nbsp; En 1996, trois pays seulement avaient reconnu le Qatar (le Pakistan, l&rsquo;Arabie saoudite et les Emirats arabes unis). Nous sommes dans un front renvers&eacute; cette fois-ci. Ce sont les pays qui n&rsquo;ont pas le m&ecirc;me agenda que les Emirats arabes unis ou que l&rsquo;Arabie saoudite, nomm&eacute;ment le Qatar et la Turquie, qui sont le plus en attente d&rsquo;une normalisation avec les talibans ou l&rsquo;instauration de relations diplomatiques officielles avec ce qui est d&eacute;sormais l&rsquo;Emirat islamique d&rsquo;Afghanistan.</p>
<p>Pour la Turquie, c&rsquo;est une autre question. C&rsquo;est une fa&ccedil;on de dire que la pr&eacute;sence turque, qui est engag&eacute;e depuis que les forces de l&rsquo;OTAN sont pr&eacute;sentes en Afghanistan, &eacute;tait d&rsquo;une nature diff&eacute;rente de celle des 49 autres nations qui &eacute;taient pr&eacute;sentes.&nbsp; Les Trucs n&rsquo;ont jamais revendiqu&eacute; d&rsquo;op&eacute;rations militaires, mais plus des op&eacute;rations de formation, de contr&ocirc;le. C&rsquo;est la raison pour laquelle les Turcs avaient tent&eacute; de n&eacute;gocier avec les talibans.&nbsp; Face au refus des talibans, les Turcs sont d&eacute;j&agrave; partis d&rsquo;Afghanistan et ont fini leurs rotations il y a quelques jours. La Turquie a tent&eacute; de jouer sa propre partition et son propre agenda un peu diff&eacute;remment des autres pays de l&rsquo;OTAN. Mais la Turquie est consid&eacute;r&eacute;e de la m&ecirc;me mani&egrave;re par les talibans en &eacute;tant pri&eacute;e de sortir du pays. Toutefois, le pr&eacute;sident Erdogan, comme le pr&eacute;sident Ra&iuml;ssi, comme le pr&eacute;sident Poutine et comme le Premier ministre Imran Khan et le pr&eacute;sident Xi Jinping vont opportun&eacute;ment montrer que la fin de ce conflit en Afghanistan est aussi l&rsquo;&eacute;chec de la communaut&eacute; internationale, du multilat&eacute;ralisme et de l&rsquo;Occident face &agrave; la mont&eacute;e en puissance d&rsquo;un agenda oriental, qui est aussi un agenda &eacute;conomique car c&rsquo;est aussi cela qui se joue actuellement en Afghanistan.</p>
<h3>Le Pakistan a toujours soutenu les talibans. Quel a &eacute;t&eacute; son r&ocirc;le ces derni&egrave;res ann&eacute;es et quel r&ocirc;le joue-t-il actuellement&nbsp;? <strong>&nbsp;</strong></h3>
<p>Le Pakistan a toujours &eacute;t&eacute; un perturbateur de la stabilit&eacute; afghane. Et ce depuis les trois guerres afghanes (la premi&egrave;re en 1839, la derni&egrave;re s&rsquo;&eacute;tant d&eacute;roul&eacute;e en 1919).&nbsp; Il y a d&rsquo;ailleurs un passif entre l&rsquo;Afghanistan et le Pakistan&nbsp;: la ligne Durand qui mat&eacute;rialise la fronti&egrave;re mais qui n&rsquo;est pas reconnue par l&rsquo;Afghanistan car cela englobe un certain nombre de territoires que les Pakistanais ont r&eacute;cup&eacute;r&eacute;s de mani&egrave;re indue. Il y a donc un litige frontalier entre les deux pays.</p>
<p>Il y a aussi la difficult&eacute; d&rsquo;avoir deux pays alors qu&rsquo;une bonne partie de la population qui compose l&rsquo;Afghanistan et qui compose le Pakistan sont de la m&ecirc;me tribu et de la m&ecirc;me ethnie. En l&rsquo;occurrence, les Pachtounes se situent &agrave; la fois dans la province de Kandahar en Afghanistan et en m&ecirc;me temps dans le Baloutchistan pakistanais. Il y a l&agrave; une inter connectivit&eacute; tribale et sociologique. &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</p>
<p>Il y a &eacute;galement un autre &eacute;cueil.&nbsp; C&rsquo;est au Pakistan que se sont trouv&eacute;s les groupes que la communaut&eacute; internationale souhaitait &eacute;radiquer. Le chef d&rsquo;Al-Qa&iuml;da que la communaut&eacute; internationale entendait punir par rapport aux attentats du 11 Septembre n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; tu&eacute; en Afghanistan, mais a &eacute;t&eacute; tu&eacute; au Pakistan, &agrave; Abbottabad, qui est au c&oelig;ur du syst&egrave;me politique et du syst&egrave;me militaire pakistanais. C&rsquo;est l&agrave; que se trouve l&rsquo;acad&eacute;mie militaire pakistanaise.</p>
<p>On voit bien qu&rsquo;il y a un non-dit. La guerre contre le terrorisme a &eacute;t&eacute; engag&eacute;e par le pr&eacute;sident Bush contre l&rsquo;Afghanistan pour donner suite aux attaques du 11 Septembre.&nbsp; Les Afghans h&eacute;bergeaient et refusaient de livrer Ben Laden. Pourtant quelques mois apr&egrave;s, Ben Laden est all&eacute; se r&eacute;fugier au Pakistan. Pendant dix ans, il a &eacute;t&eacute; accueilli par les Pakistanais. Il faut sans doute avoir &agrave; l&rsquo;esprit que l&rsquo;Afghanistan n&rsquo;ayant pas la bombe atomique alors que le Pakistan est en possession de l&rsquo;arsenal nucl&eacute;aire. Cela change radicalement la donne. Peut-&ecirc;tre que si nous avions fait la guerre au Pakistan, nous ne serions pas dans la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement en Afghanistan.</p>
<h3>Un article de Bloomberg avan&ccedil;ait que le Pakistan et le Qatar ne soutiennent pas exactement la m&ecirc;me frange des talibans. Le Qatar soutenant une frange plus politique, le Pakistan une frange plus militaire. Est-ce le cas&nbsp;?</h3>
<p>Il n&rsquo;y a aucune diff&eacute;rence entre la branche politique et la branche militaire. Ce sont les m&ecirc;mes qui ont &eacute;t&eacute; form&eacute;s par les services de renseignement pakistanais. Les talibans ne sont pas autre chose que des suppl&eacute;tifs des services de renseignement pakistanais.&nbsp; On va le constater h&eacute;las &agrave; nos d&eacute;pens d&rsquo;ici quelques semaines lorsque les talibans disposeront des appareils militaires, notamment de l&rsquo;aviation. Une bonne partie a quitt&eacute; le territoire. Sur les 167 avions et h&eacute;licopt&egrave;res dont disposait l&rsquo;arm&eacute;e afghane, une bonne partie &eacute;chappe actuellement aux talibans. Une partie est all&eacute;e se r&eacute;fugier en Ouzb&eacute;kistan (une cinquantaine) et au Tadjikistan (une vingtaine). Ces appareils sont ultramodernes (des h&eacute;licopt&egrave;res black hawk am&eacute;ricains, des MI-8 russes, des appareils Cessna). Ces engins n&eacute;cessitent &eacute;videmment des pilotes, une technique, un ravitaillement et des capacit&eacute;s logistiques que n&rsquo;ont pas les talibans qui vont les trouver aupr&egrave;s de leur parrain et de leur soutien pakistanais. C&rsquo;est de ce point de vue que l&rsquo;on verra, comme n&rsquo;a cess&eacute; de le dire le leadership politique afghan depuis 20 ans, que ce sont bien les services de renseignement pakistanais (ISI) qui ont mont&eacute; de toute pi&egrave;ce les talibans pour affaiblir le pouvoir et le r&eacute;gime afghan soutenu par la communaut&eacute; internationale. Le Premier ministre pakistanais Imran Khan a f&eacute;licit&eacute; les talibans pour la mani&egrave;re dont ils ont conquis le pouvoir.</p>
<h3>Qui va le plus profiter et qui va le plus soutenir les talibans dans les mois et ann&eacute;es qui viennent entre le Qatar, le Pakistan et la Turquie&nbsp;?</h3>
<p>Le Pakistan va soutenir ses propres int&eacute;r&ecirc;ts. La Turquie soutiendra l&rsquo;Afghanistan car ce pays dispose avec l&rsquo;arme migratoire et les r&eacute;fugi&eacute;s afghans d&rsquo;un moyen de pression suppl&eacute;mentaire vis-&agrave;-vis de l&rsquo;Union europ&eacute;enne. La Turquie avec les 3,6 milliards sur son territoire obtient 6 milliards d&rsquo;euros donn&eacute;s au pr&eacute;sident Erdogan. Ce sch&eacute;ma pourrait se reproduire avec le sort des migrants afghans. La Turquie jouera avec la carte des r&eacute;fugi&eacute;s.</p>
<p>L&rsquo;Iran jouera aussi de la carte afghane. L&rsquo;Iran a besoin de revenir &agrave; la table des n&eacute;gociations sur le nucl&eacute;aire iranien et a besoin de mettre autre chose sur la table pour montrer sa bonne volont&eacute;. Vis-&agrave;-vis des Etats-Unis &eacute;galement qui sont fortement d&eacute;cr&eacute;dibilis&eacute;s au Moyen-Orient suite &agrave; l&rsquo;&eacute;chec patent en Irak, en Syrie et en Afghanistan. Sans doute que l&rsquo;Iran voudra montrer sa bonne volont&eacute; en disant que le pays peut assumer une sorte de leadership qui pourrait &ecirc;tre la premi&egrave;re ligne de d&eacute;fense face &agrave; ces mouvements terroristes qui sont proches de se reconstituer non pas seulement au Moyen-Orient mais aussi en Asie de l&rsquo;Ouest, en Asie centrale et en Asie du Sud.</p>
<p>Le Pakistan va tenter de consolider sa profondeur strat&eacute;gique dont elle a toujours r&ecirc;v&eacute;, dont elle n&rsquo;osait pas esp&eacute;rer. Etant donn&eacute; qu&rsquo;il n&rsquo;y a quasiment plus de soldats am&eacute;ricains en Afghanistan, les Pakistanais ont obtenu ce qu&rsquo;ils voulaient, avoir la structure financi&egrave;re des Am&eacute;ricains sans avoir les Am&eacute;ricains sur leur propre territoire.</p>
<p>C&rsquo;est &eacute;galement la victoire de la Chine et de la Russie qui profiteraient d&rsquo;une d&eacute;soccidentalisation de l&rsquo;agenda du multilat&eacute;ralisme, du nation building, de la construction de la stabilisation sur des bases onusiennes. Toutes les op&eacute;rations onusiennes ou &eacute;tats-uniennes en Irak, en Syrie, en Afghanistan ont &eacute;chou&eacute;. C&rsquo;est un puissant narratif entre les mains de Vladimir Poutine et Xi Jinping pour montrer que le monde a chang&eacute;, que les r&egrave;gles du jeu ont chang&eacute; et qu&rsquo;il faut peut-&ecirc;tre orientaliser les relations internationales. &nbsp;</p>
<p>La prochaine r&eacute;union de coop&eacute;ration de Shanghai qui va se tenir en septembre sera sans doute le meilleur porte-voix de ce changement de paradigme sur les relations internationales.</p>
<h3>Est-ce qu&rsquo;il y a un pays qui est susceptible de peser le plus et d&rsquo;avoir le plus d&rsquo;influence sur le r&eacute;gime taliban&nbsp;?</h3>
<p>Les talibans ont besoin de deux choses. Ils ont besoin d&rsquo;argent. L&rsquo;Afghanistan &eacute;tait un pays sous perfusion. Les Am&eacute;ricains ont d&eacute;pens&eacute; deux trillions de dollars durant les 20 derni&egrave;res ann&eacute;es. 90% du budget des administrations afghanes &eacute;tait pay&eacute; directement par les Am&eacute;ricains.</p>
<p>Si la communaut&eacute; internationale coupe les vivres au pays. Le FMI a bloqu&eacute; tous les comptes de l&rsquo;Afghanistan. La banque mondiale ne livre plus aucun argent. L&rsquo;OMS a d&eacute;cid&eacute; de ne plus livrer les vaccins puisqu&rsquo;il n&rsquo;y a plus d&rsquo;autorit&eacute;.&nbsp; L&rsquo;aide humanitaire est la seule chose qui est maintenue. Le programme alimentaire mondial a d&eacute;cid&eacute; de maintenir son aide alimentaire. 80&nbsp;000 Afghans sont en situation de carence nutritionnelle. 600&nbsp;000 tonnes de nourriture vont &ecirc;tre livr&eacute;es prochainement par le programme alimentaire mondial.</p>
<p>Les talibans ont moins besoin de reconnaissance diplomatique que de fonctionner afin de toucher les subsides ou l&rsquo;argent dont ils b&eacute;n&eacute;ficiaient jusqu&rsquo;&agrave; pr&eacute;sent. Les talibans peuvent tr&egrave;s bien se passer d&rsquo;une reconnaissance internationale. Les talibans ou le nouveau gouvernement qui sortira des n&eacute;gociations avec et ce qui reste de la classe politique afghane vont aussi argumenter qu&rsquo;il existe une autre fa&ccedil;on de dialoguer avec les bailleurs de fonds, notamment orientaux autour des questions mini&egrave;res et min&eacute;rales.</p>
<p>L&rsquo;Afghanistan est un pays qui n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; tr&egrave;s exploit&eacute; au regard des 40 ans de guerre qui ont consomm&eacute; l&rsquo;&eacute;nergie des diff&eacute;rentes institutions et de la communaut&eacute; internationale autour de la lutte contre le terrorisme. Il y a des mines d&rsquo;or, de platine, de chromite, d&rsquo;uranium. L&rsquo;Afghanistan poss&egrave;de la plus grande r&eacute;serve de lithium au monde alors que lors du G7 les difficult&eacute;s dans la capacit&eacute; de production des composants de nos batteries &eacute;lectriques ont &eacute;t&eacute; &eacute;voqu&eacute;es. La richesse mini&egrave;re de l&rsquo;Afghanistan avoisine les mille milliards de dollars. Les talibans pourront donc utiliser cet argument. Ils ont d&eacute;j&agrave; commenc&eacute; &agrave; le faire avec la Chine. Le ministre des Affaires &eacute;trang&egrave;res Wang Yi a rencontr&eacute; le chef de la commission politique des talibans, Abdul Ghani Baradar, en confirmant l&rsquo;investissement chinois.&nbsp; La Chine, en 2007, a fait le plus gros investissement en Afghanistan, 3 milliards de dollars, pour la plus grosse mine de cuivre au monde, Me&iuml;ssa Unac.</p>
<p>Peut-&ecirc;tre faut-il aussi consid&eacute;rer que nous aurons aussi besoin d&rsquo;un moment ou &agrave; un autre non pas des talibans mais de l&rsquo;Afghanistan.</p>

Pakistan ou Qatar : qui sera le sponsor des Talibans cette fois-ci

Talibans

Pakistan ou Qatar : qui sera le sponsor des Talibans cette fois-ci Emmanuel Dupuy

<h3><strong>Atlantico : Qu'est-ce qu'on sait vraiment du groupe que l'on soup&ccedil;onne d'&ecirc;tre responsables de l'attentat de Kaboul, &agrave; savoir ISIS-K, la filiale de l'Etat islamique en Afghanistan ?</strong></h3>
<p><strong>Emmanuel Dupuy :</strong>&nbsp;L'Etat islamique Province de Khorasan (du nom qui historiquement regroupe l&rsquo;Afghanistan, l&rsquo;Iran, le Pakistan et l&rsquo;Asie Centrale) c&rsquo;est un groupe qui est n&eacute; de la scission des talibans &agrave; partir de d&eacute;but 2015. Ce mouvement a pr&ecirc;t&eacute; all&eacute;geance &agrave; Daesh tr&egrave;s t&ocirc;t. Il est compos&eacute; de talibans afghans, pakistanais, de la branche pakistanaise des talibans (TTP, Tehrik-e-Taliban Pakistan) dont le chef Noor Wali Mehsud a pr&ecirc;t&eacute; all&eacute;geance il y a quelques jours aux talibans afghans. Ce mouvement a tent&eacute; un ancrage dans plusieurs provinces d'Afghanistan (au Nord- Est de Kaboul, &agrave; Nagra et Kunar). Cette organisation fait concurrence aux talibans. Le nombre de talibans varie entre 65 000 et 80 000, eux sont moins nombreux, on estime leur nombre de 500 &agrave; 2 000. Ils ont pr&ecirc;t&eacute; all&eacute;geance &agrave; l'Etat islamique, et donc ils se retrouvent en concurrence, mais bien souvent en opposition. Leurs motivations ne sont pas les m&ecirc;mes. L&rsquo;IS-KP est majoritairement compos&eacute; de Tadjiks, avec peu de Pachtounes comme le sont les talibans. On leur conna&icirc;t une strat&eacute;gie ciblant en particulier la minorit&eacute; Hazara, &nbsp;de confession chiite, ce qui justifie que l'Etat islamique consid&egrave;re les talibans comme des apostats. Les talibans sont, selon cette configuration, consid&eacute;r&eacute;s comme pas assez actifs au plan international. Les talibans restent caract&eacute;ris&eacute;s par un djihad national eu &eacute;gard &agrave; leur volont&eacute; territoire dans leur reconqu&ecirc;te territoriale de l'Afghanistan suite &agrave; leur d&eacute;faite de 2001.</p>
<p>L&rsquo;Etat islamique Khorasan a en majorit&eacute; cibl&eacute; des lieux publics&nbsp;: des h&ocirc;pitaux, des &nbsp;mosqu&eacute;es, des centres commerciaux, des lieux de cute (on se rappelle du dernier attentat ayant vis&eacute; une maternit&eacute; chiite du quartier de Kaboul en mai 2020).</p>
<h3><strong>Quel sens pouvons-nous donner &agrave; l'attentat de l'a&eacute;roport de Kaboul pour la reprise de pouvoir des talibans en Afghanistan ?</strong></h3>
<p>Ces attentats visent &eacute;videmment la communaut&eacute; internationale et le dispositif mis en place par les &Eacute;tats-Unis et ses alli&eacute;s, notamment les pays membres de l'OTAN qui eux ont particip&eacute; &agrave; ce gigantesque pont a&eacute;rien depuis le 15 ao&ucirc;t dernier, o&ugrave; &nbsp;plus&nbsp; de100 000 personnes ont &eacute;t&eacute; &eacute;vacu&eacute;es jusqu'&agrave; pr&eacute;sent, dont 70 000 Am&eacute;ricains et les Afghans ayant travaill&eacute; avec eux et 3 000 Fran&ccedil;ais et les ressortissants afghans ayant travaill&eacute; pour eux. Malgr&eacute; ces chiffres impressionnants, il reste des Occidentaux pi&eacute;g&eacute;s dans Kaboul. On estime leur nombre &agrave; pr&egrave;s d&rsquo;un millier. Ces attentats servent &agrave; montrer &agrave; la communaut&eacute; internationale que les Am&eacute;ricains, en 20 ans, ont perdu leur guerre contre le terrorisme. Il y aura donc encore des attentats ainsi que des combats entre les talibans et l&rsquo;Etat islamique Khorasan. Il faut avoir &agrave; l'esprit que ces attentats ayant cibl&eacute; Abbey Gate et l&rsquo;h&ocirc;tel Baron a fait plus de 170 victimes dont au moins 13 Am&eacute;ricains aura ou a un effet certain de sid&eacute;ration. C'est pr&eacute;cis&eacute;ment l'accord du 29 f&eacute;vrier 2020, scell&eacute; entre les talibans et les autorit&eacute;s am&eacute;ricaines qui est cibl&eacute;. Car c&rsquo;est pr&eacute;cis&eacute;ment ce que les Am&eacute;ricains redoutaient et avaient n&eacute;goci&eacute; avec les talibans. Aucun soldat am&eacute;ricain suppl&eacute;mentaire ne devait perdre la vie. 2 448 Am&eacute;ricains ont perdu la vie depuis vingt ans en Afghanistan.</p>
<p>13 sont morts, Or la derni&egrave;re fois o&ugrave; autant d&rsquo;Am&eacute;rcians sont morts d&rsquo;une seule fois remonte &agrave; aout 2011 quand un h&eacute;licopt&egrave;re am&eacute;ricain s'est &eacute;cras&eacute; suite &agrave; un tir de missile taliban occasionnant la perte de trente soldats am&eacute;ricains.La derni&egrave;re fois qu&rsquo;un soldat am&eacute;ricain a perdu la vie remonte pr&eacute;cis&eacute;ment &agrave; l&rsquo;arr&ecirc;t des hostilit&eacute;s des talibans contre les forces am&eacute;ricaines, en f&eacute;vrier 2020.</p>
<p>Maintenant, le d&eacute;fi s&eacute;curitaire est un enjeu de de taille pour les talibans qui sont d&eacute;sormais aux commandes de l&rsquo;Etat afghan. Ce sera d&rsquo;autant plus vrai le 1<sup>er</sup> septembre prochain apr&egrave;s que les derniers soldats am&eacute;ricains auront quitt&eacute; le territoire afghan.</p>
<p>Les talibans ont &eacute;galement &eacute;chou&eacute; &agrave; anticiper et &agrave; d&eacute;jouer cet attentant au m&ecirc;me titre que la communaut&eacute; internationale. 28 talibans sont morts lors des deux attaques ayant cibl&eacute; l&rsquo;a&eacute;roport de Kaboul.</p>
<p>Ces deux attaques confirment que l&rsquo;Etat islamique se rappelle au bon souvenir des talibans en leur rappelant que ces derniers ne sont pas les seuls &agrave; avoir chass&eacute; les Occidentaux d&rsquo;Afghanistan mais bien la menace terroriste r&eacute;siduelle.</p>
<h3><strong>Nous observons d&eacute;j&agrave; des rivalit&eacute;s fortes entre l&rsquo;Etat islamique et les talibans, nous pouvons nous attendre &agrave; des affrontements de taille dans un pays d&eacute;j&agrave; instable ?</strong></h3>
<p>Bien s&ucirc;r, il y en a eu par le pass&eacute;, lorsque l'Etat islamique a pris l'ascendant sur les talibans dans certaines provinces Punar et Nangarhar. L'Etat islamique est en grande partie compos&eacute; de talibans d&eacute;&ccedil;us du manque d&rsquo;offensive contre les forces occidentales, notamment apr&egrave;s les n&eacute;gociations avec les Am&eacute;ricains.</p>
<p>Ces combats risquent d'arriver rapidement, Joe Biden lui-m&ecirc;me a avou&eacute; lors de son discours d&rsquo;il y a quelques jours que la meilleure arme contre Daesh &eacute;tait &laquo;&nbsp;peut &ecirc;tre&nbsp;&raquo; les talibans, donnant l'impression qu'il se conforterait &agrave; l'id&eacute;e d&rsquo;une forme de sous-traitance de la lutte contre Daesh aux talibans. Le pr&eacute;sident am&eacute;ricain et le g&eacute;n&eacute;ral Kenneth McKenzie, le chef de l&rsquo;US Central Command, en charge de l&rsquo;Afghanistan, &eacute;taient assez fermes en disant qu'ils allaient les "chasser" et "retrouver les auteurs de cet attentat". Une frappe am&eacute;ricaine aurait frapp&eacute; un des chefs de l&rsquo;Etat islamique ce samedi d&eacute;montrant une forme d&rsquo;acceptation de la part des talibans d&rsquo;une op&eacute;ration de repr&eacute;sailles promise par les Am&eacute;ricains.</p>
<p>Par contre les Am&eacute;ricains auront du mal &agrave; proc&eacute;der &agrave; de telles frappes dans Kaboul (vid&eacute;e d&rsquo;Occidentaux &agrave; partir du 1<sup>er</sup> septembre) en sachant que les talibans ont interdit aux Am&eacute;ricains d&rsquo;agir sur leur territoire au-del&agrave; du 31 ao&ucirc;t.</p>
<p>Le double attentat du jeudi a un double impact. &nbsp;C'est une humiliation suppl&eacute;mentaire vis-&agrave;-vis de la communaut&eacute; internationale qui se retrouve d&eacute;faite et encore plus affaiblie par la dimension chaotique du d&eacute;part des Occidentaux qui n'a pas &eacute;t&eacute; suffisamment anticip&eacute;e. La position du pr&eacute;sident Biden va &ecirc;tre compliqu&eacute;e face &agrave; sa propre majorit&eacute; et ses alli&eacute;s. En effet Il avait promis de ramener tous les soldats am&eacute;ricains vivants, or, il se trouve d&eacute;sormais &nbsp;&agrave; devoir justifier la mort de treize, et sans doute plus. Le deuxi&egrave;me impact conforte l&rsquo;id&eacute;e selon laquelle les Am&eacute;ricains auraient n&eacute;goci&eacute; avec les talibans une forme de transition pour ne pas dire reddition ayant amen&eacute; &agrave; la chute spectaculaire du gouvernement d&rsquo;Ashraf Ghani.</p>
<h3><strong>L'ISIS-K ayant plus vocation au djihad international, cela repr&eacute;sente-t-il une menace pour la communaut&eacute; internationale et l'Occident ?</strong></h3>
<p>L'Etat islamique en Afghanistan vise les minorit&eacute;s ethniques ainsi que les Occidentaux. C&rsquo;est aussi une menace per&ccedil;ue comme &nbsp;particuli&egrave;rement dangereuse par les voisins de l&rsquo;Afghanistan, notamment l&rsquo;Iran eu &eacute;gard aux attentats ayant vis&eacute; les&nbsp; 5 &agrave; 6 millions de chiites durant les cinq derni&egrave;res ann&eacute;es. D'ailleurs, c'est probablement l'une des raisons pour laquelle le nouveau pr&eacute;sident Ebrahim Ra&iuml;ssi a lui aussi appel&eacute; comme le pr&eacute;sident chinois (Xi Jinping), russe (Vladimir Poutine), turc (Recep Tayyip Erdogan) ainsi que le Premier ministre pakistanais (Imran Khan) &agrave; une reconnaissance rapide du nouveau r&eacute;gime install&eacute; &agrave; Kaboul. Il s&rsquo;agit pour ces puissances orientales d&rsquo;&eacute;tablir un contact non pas seulement par pr&eacute;occupation pour les talibans mais consid&eacute;rant le fait que l&rsquo;Etat islamique puisse passer la fronti&egrave;re orientale vers l&rsquo;Iran ou septentrionale vers l&rsquo;Ouzb&eacute;kistan, le Tadjikistan, le Turkm&eacute;nistan, voire la Chine pour exporter leur djihad. Ce qui &eacute;tait, du reste, un des sujets de pr&eacute;occupation centrale pour l&rsquo;Iran, soucieux de la menace que faisait peser l&rsquo;Etat islamique pr&eacute;sent en Irak et en Syrie sur son propre territoire. C&rsquo;est un des sujets &agrave; l&rsquo;ordre du jour de la r&eacute;union de ce samedi &agrave; Bagdad, &agrave; l&rsquo;initiative du Premier ministre irakien Moustafa al-Kazimi, &agrave; laquelle le pr&eacute;sident Emmanuel Macron a assist&eacute; aux c&ocirc;t&eacute;s des ministres des affaires &eacute;trang&egrave;res iranien et saoudien.</p>
<p>D&egrave;s 2014, l&rsquo;Iran avait verrouill&eacute; sa fronti&egrave;re avec l&rsquo;Irak et demand&eacute; aux forces kurdes autonomes de les aider &agrave; emp&ecirc;cher toute infiltration de Daesh sur son territoire.&nbsp;Ce qui confirme que la premi&egrave;re menace que constitue l&rsquo;IS-KP est r&eacute;gionale. Le nouveau pr&eacute;sident iranien discutait encore il y a quelques semaines avec les talibans pour que les groupes arm&eacute;e tels que le MOI (mouvement islamique de l&rsquo;Ouzb&eacute;kistan), le MITO (mouvement islamique du Turkestan oriental) appartenant &agrave; la mouvance des talibans mais qui ont leur propre agenda soit &nbsp;&laquo;&nbsp;contr&ocirc;l&eacute;s&nbsp;&raquo;. Il s&rsquo;agit pour ces derniers d&rsquo;instaurer le m&ecirc;me type de califat dans l&rsquo;ensemble de l&rsquo;Asie centrale avec comme assise l&rsquo;Ouzb&eacute;kistan, pivot des 5 pays de l'Asie centrale. Au m&ecirc;me titre que Daesh avait voulu le faire entre le nord-ouest de la Syrie et le nord-ouest de l&rsquo;Irak. C'est donc aussi un sujet de pr&eacute;occupation pour les talibans d&rsquo;emp&ecirc;cher leur propre troupe d&rsquo;amener un djihad international qui les affaiblirait dans leur qu&ecirc;te de reconnaissance r&eacute;gionale.</p>

ISIS-K

État islamique au Khorasan : le groupe extrémiste afghan dont les talibans ont au moins autant de raisons de se méfier que les Occidentaux Afghanistan Etats-Unis Kaboul attentat terrorisme Emmanuel Dupuy

<p>Les talibans ont publi&eacute; cette semaine une image se moquant (ou rendant hommage ?) de la c&eacute;l&egrave;bre photo des soldats am&eacute;ricains hissant le drapeau am&eacute;ricain &agrave; Iwo Jima.</p>
<p>Les combattants figurant sur l'image, des talibans membres de l'unit&eacute; Badri 313 des commandos d'&eacute;lite, sont repr&eacute;sent&eacute;s en train de hisser le drapeau blanc du mouvement au sommet d'une colline, dans une posture qui rappelle celle des soldats am&eacute;ricains issant leur banni&egrave;re au sommet du mont Suribachi pendant la bataille d'Iwo Jima.</p>
<p>&nbsp;Les talibans photographi&eacute;s sont v&ecirc;tus d'uniformes de camouflage, de bottes de combat, d'&eacute;quipement tactique et de lunettes de vision nocturne d'origine am&eacute;ricaine. Washington tente toujours d'&eacute;valuer l'ampleur de l'armement et du mat&eacute;riel am&eacute;ricains qui sont tomb&eacute;s entre les mains des talibans apr&egrave;s la chute de l'Afghanistan. Le groupe islamiste aurait acquis des centaines de milliers de fusils d'assaut, des milliers de v&eacute;hicules blind&eacute;s, des dizaines d'avions, des chars, de l'artillerie, des fusils de sniper, des lunettes de vision nocturne et bien plus encore. Selon un responsable am&eacute;ricain, qui s'est exprim&eacute; sous couvert d'anonymat &agrave; <a href="https://www.reuters.com/business/aerospace-defense/planes-guns-night-vision-goggles-talibans-new-us-made-war-chest-2021-08-19/" target="_blank" rel="noopener">Reuters</a>, les talibans auraient mis la main sur l'&eacute;quivalent de 28 milliards de dollars d'&eacute;quipement militaire.</p>
<p>Des photos similaires publi&eacute;es ces derniers jours montrent des combattants talibans portant des armes et des &eacute;quipements fournis par les &Eacute;tats-Unis ou des nations alli&eacute;es. Autant de clich&eacute;s qui&nbsp;s'&eacute;cartent sensiblement des repr&eacute;sentations traditionnelles des combattants talibans, qui apparaissent rarement en tenue militaire compl&egrave;te.</p>
<p><img src="https://atlantico-media.s3.eu-west-3.amazonaws.com/Capture_2e326d77ea.JPG" alt="" width="600" height="386" /></p>

Propagande

<p>Alors que la situation reste pr&eacute;occupante &agrave; l&rsquo;a&eacute;roport de Kaboul, le directeur de la CIA, William J. Burns, aurait rencontr&eacute; des repr&eacute;sentants des talibans &agrave; Kaboul. William J. Burns, ancien diplomate de longue date, a rencontr&eacute; lundi Abdul Ghani Baradar, le chef des talibans qui a men&eacute; les n&eacute;gociations diplomatiques au Qatar avec le gouvernement am&eacute;ricain, selon des r&eacute;v&eacute;lations du <a href="https://www.nytimes.com/live/2021/08/24/world/afghanistan-taliban-kabul-news" target="_blank" rel="noopener">New York Times</a> et du Washington Post.</p>
<p>La difficult&eacute; majeure pour les Etats-Unis est d'obtenir des dirigeants talibans qu'ils accordent un d&eacute;lai suppl&eacute;mentaire pour les op&eacute;rations d'&eacute;vacuation &agrave; l'a&eacute;roport de Kaboul. Les Etats-Unis ont d&eacute;but&eacute; un important pont a&eacute;rien pour &eacute;vacuer des Afghans et des citoyens am&eacute;ricains.</p>
<p>Le pr&eacute;sident Joe Biden a fix&eacute; une date limite pour la fin de cette op&eacute;ration au 31 ao&ucirc;t.</p>
<p>Le mollah Abdul Ghani Baradar, qui dirigeait le bureau politique des talibans au Qatar, est le nouvel homme fort du r&eacute;gime qui a pris le pouvoir &agrave; Kaboul. Le num&eacute;ro 2 du mouvement incarne depuis dix jours le pouvoir taliban et sa volont&eacute; de parler au reste de la communaut&eacute; internationale.</p>
<p>Les Etats-Unis ont envoy&eacute; des milliers de soldats afin de s&eacute;curiser l'a&eacute;roport de Kaboul. Le rythme des &eacute;vacuations s'est acc&eacute;l&eacute;r&eacute; ces derniers jours.</p>
<p>Suhail Shaheen, porte-parole des talibans au Qatar, a d&eacute;clar&eacute; lundi que toute prolongation au-del&agrave; du 31 ao&ucirc;t constituerait une &laquo;&nbsp;violation claire&nbsp;&raquo; de l'accord des Etats-Unis avec les talibans sur le retrait des troupes am&eacute;ricaines. Les talibans ont donc mis en garde contre &laquo; cons&eacute;quences &raquo; si les soldats am&eacute;ricains supervisant l&rsquo;&eacute;vacuation restent au-del&agrave; de la date limite.</p>
<p>Les responsables am&eacute;ricains s'inqui&egrave;tent des perspectives d'attaques terroristes &agrave; l'a&eacute;roport de Kaboul par l'Etat islamique et d'autres groupes.</p>
<p>Les dirigeants du G7 vont se r&eacute;unir ce mardi pour tenter d&rsquo;apporter des solutions &agrave; la crise en Afghanistan. &nbsp;</p>
<p>La pr&eacute;sence en Afghanistan de William Burns montre l&rsquo;urgence ressentie &agrave; Washington pour r&eacute;soudre la crise en Afghanistan. Une course contre la montre est engag&eacute;e pour la suite des &eacute;vacuations depuis l&rsquo;a&eacute;roport de Kaboul.</p>

Diplomatie

Talibans gâtés

Avions, blindés, armes... Le butin de guerre souvent « Made in USA » des talibans

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