Stratégies de reconquête : qui sont les présidents qui sont parvenus à inverser les courbes, comment et dans quelles circonstances ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Les cohabitations sous Mitterrand et Chirac sont les seules périodes de remontées concrètes des cotes de popularité des présidents.
Les cohabitations sous Mitterrand et Chirac sont les seules périodes de remontées concrètes des cotes de popularité des présidents.
©Reuters

Politico scanner

La cote de popularité de François Hollande a dégringolé jusqu'à 20% en novembre 2013, chiffre le plus faible jamais enregistré par l'Ifop pour un président sous la 5e République. Voici les présidents dont il pourrait s'inspirer pour tenter de remonter la pente.

Jérôme Sainte-Marie

Jérôme Sainte-Marie

Jérôme Sainte-Marie est président de la société d'enquête et de conseils PollingVox.

 

Voir la bio »

Atlantico : La cote de popularité de François Hollande a dégringolé jusqu'à 20% en novembre 2013, chiffre le plus faible enregistré par l'Ifop. Avant lui, François Mitterrand tenait le record avec 22% en décembre 1991. Nicolas Sarkozy n'est pas descendu en dessous des 28%, Jacques Chirac des 27%. Quels sont les présidents de la Vème République qui ont réussi à inverser les courbes d'opinion en leur faveur alors qu'ils étaient au plus mal ?

Jérôme Sainte-Marie : Depuis que sévit un chômage de masse en France, problème effectivement essentiel dans le jugement que porte les citoyens sur leurs gouvernants, l’évolution de la courbe de popularité des présidents successifs se ressemble. Les chiffres de la Sofres montrent ainsi un affaiblissement continue du soutien apporté par l’opinion, avec une double tendance depuis le premier mandat de François Mitterrand : d’une part la popularité de départ se situe à un niveau moins élevé, d’autre part sa diminution due à l’exercice du pouvoir est plus rapide. L’inversion de la courbe ne se produit que sous l’effet d’une campagne électorale - ainsi précédemment Valéry Giscard d’Estaing avait profité de la victoire inattendue de la droite aux législatives de 1978 -, et, de manière plus durable et spectaculaire, lorsque survenait une cohabitation, en 1986 puis en 1993 et en 1997.

Source : Ifop

Source : CSA

Source : Ifop

Quelles stratégies ont-ils adoptées ? Pour quels résultats dans les sondages ?

Une fois posé qu’il n’y a pas eu inversion de la courbe de l’opinion mais seulement une limitation de la baisse ou une relative stabilisation, il est possible de déceler des stratégies relativement efficaces. Il s’agit tout d’abord d’une dramatisation de l’enjeu politique : sous Valéry Giscard d’Estaing, c’était "attention la gauche arrive", puis sous François Mitterrand, "attention la droite revient".

De manière moins durable, le contexte international a parfois joué puissamment sur l’image du chef de l’Etat : François Mitterrand est très soutenu dans sa "logique de guerre" face à l’Irak en 1990-1991, et Jacques Chirac encore davantage dans son refus de l’invasion anglo-saxonne du même pays en 2003. Dans les deux cas cependant, et l’on pense aujourd’hui à ce que pourrait susciter éventuellement un développement de la crise ukrainienne, l’effet de la conjoncture diplomatique sur la cote présidentielle est vite effacé.

Ont-ils bénéficié d'un contexte économique favorable ?

Il y a eu un impact très net de l’amélioration de la situation économique, et partant de celle de l’emploi, à la fin des années 1980, puis à partir de 1997. Cela a correspondu à la période où Michel Rocard était Premier ministre puis à celle où Lionel Jospin était premier ministre. Dans la mesure où dans le premier cas François Mitterrand était au début de son second mandat, et dans l’autre cas Jacques Chirac subissait une situation de cohabitation, il est difficile d’établir une comparaison avec la situation actuelle, si les chiffres du chômage venaient à s’améliorer. Il est évident cependant que la relative popularité de Michel Rocard puis celle de Lionel Jospin était, durant ces périodes, directement imputable à ce contexte économique. Le fait que François Hollande focalise l’estimation de son bilan sur ces données là produirait très probablement des effets positifs pour lui si les Français se persuadaient que le redressement est bien là.

Les cohabitations sous Mitterrand et Chirac sont les seules périodes de remontées concrètes, doit-on en conclure que la seule manière pour un président d’avoir la confiance des Français, c’est d'être bloqué politiquement ?

A l’évidence, la situation de cohabitation profite doublement au président de la République. Ceci gèle les critiques de ses opposants, car il est dédouané de la gestion politique du moment et attise le soutien de ses partisans dans la mesure où il apparaît comme un contre-poids au Premier ministre en place. Ceci fut vrai en 1986-88 comme en 1997-2002, mais pas en 1993-95. Dans ce dernier cas, François Mitterrand n’était plus, à tout point de vue, en situation de profiter de cette opportunité institutionnelle. Cette popularité paradoxale du président de la République dont le camp vient d’être battu aux législatives dit beaucoup sur le caractère profondément déceptif de l’action politique aux yeux des Français. Rappelons par ailleurs qu’il n’était pas du tout évident, en 1986, lorsque ce système de cohabitation fut pour la première fois pratiqué, qu’il en serait ainsi.

Source : Ifop

François Hollande a-t-il intérêt à dissoudre l’Assemblée nationale ?

Voici probablement la question essentielle des prochains mois. Evidemment, si la gauche était, par la grâce d’une dissolution et d’une défaite aux législatives anticipées, déchargée du pouvoir, elle éviterait d’avoir à assumer des réformes particulièrement douloureuse pour sa base sociale. On en voit l’opportunité politique. Inversement, nul ne sait ce que donnerait durablement dans l’opinion le spectacle d’un président qui provoquerait un combat électoral avec la certitude d’être battu. François Hollande pourrait en être durablement déconsidéré auprès de son propre électorat et favoriser ainsi l’émergence d’un autre candidat au sein de son camp.

Alors que le président Hollande voit sa cote de confiance dans l’opinion toujours au plus bas, 20% selon le dernier baromètre CSA (pour Les Echos et Radio classique), il bat le record d’impopularité de la cinquième République, précédemment détenu par François Mitterrand (22% en 1991). Leurs deux situations sont-elles comparables ? Hollande doit-il s'inspirer de son prédécesseur socialiste pour remonter la pente ?

Il n’y a pas grand-chose de comparable avec le second mandat de François Mitterrand, et d’ailleurs celui-ci n’avait "remonté la pente" que lors de son premier mandat. La période qui peut permettre d’étalonner politiquement celle que nous traversons est plus 1984-86, avec un nouveau Premier ministre, Laurent Fabius, alors nommé pour incarner une inflexion libérale de l’action gouvernementale. Ceci avait contenu l’impopularité présidentielle et permit au Parti socialiste, avec aussi l’introduction de la proportionnelle, de limiter ses pertes aux législatives suivantes. Il est vrai qu’il y a avait à l’époque une distinction beaucoup plus nette, dans l’esprit des Français, du rôle respectif du président de la République et du Premier ministre.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !