Quand les maillots gagnent du temps et quand les artisans prennent leur revanche : c’est l’actualité ascensionniste des montres<!-- --> | Atlantico.fr
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Le meilleur d’une tradition horlogère dans les beaux-arts de la haute mécanique (Simon Brette).
Le meilleur d’une tradition horlogère dans les beaux-arts de la haute mécanique (Simon Brette).
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Atlantic-Tac

Mais aussi les rochers de Capri en mode aluminium, une « plongeuse » française qui ne débloque pas sa couronne, un concentré d’avant-garde constructiviste et un acier vieilli d’explorateur vétéran…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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DOXA : La patine du temps sans le temps…

Tous les amateurs d’aventures maritimes et sous-marines ont lu au moins un roman de Clive Cussler (85 titres, traduits en 40 langues et vendus à plus de 100 millions d’exemplaires et souvent portés au cinéma), un auteur qui a souvent mis la main à la pâte puisqu’on lui doit la découverte d’une vingtaine d’épaves des plus célèbres. Explorateur sous-marin et historien, Clive Cussler était par ailleurs le créateur et animateur de la Numa (National Underwater and marine Agency : Agence nationale maritime et sous-marine), qui œuvre pour le patrimoine maritime. Dans la vie, Clive Cussler (1937-2020) portait une montre Doxa – reconnaissable à son cadran orange – et c’est à sa mémoire que Doxa a dédié cette nouvelle édition de la célébrissime Sub 300T, avec un irrésistible boîtier en « acier vieilli » (42,5 mm) et un cadran qui évoque les anciennes boussoles : ce style patiné est celui des montres portées par les vrais « vieux plongeurs », ceux qui ont de l’eau salée dans les veines et qui rêvent toujours de leur prochaine épave inviolée. Sur le disque de la date, les chiffres 7, 15 et 31 sont en rouge en souvenir de la date de naissance de Clive Cussler (15 juillet 1937). Au choix : bracelet en nylon beige de type Nato, caoutchouc noir ou acier vieilli à boucle déployante. Le prix public reste étonnamment raisonnable pour ce style de montre automatique « professionnelle » étanche à 1 200 m (valve à hélium) : moins de 2 700 euros – c’est le prix d’une légende nautico-littéraire qui affiche une forte présence au poignet, avec, en prime, une subtile touche vintage qui fera chavirer le cœur des amateurs…

YEMA : Une plongée à temps dans les temps…

Une nouvelle Yema tous les mois ou presque : les amateurs de bonne horlogerie française sont gâtés cette année. Voici la nouvelle Superman 500 Dato, équipée du calibre maison Yema2000, étanche à 500 m et fière de beaucoup de petites améliorations techniques qui en font un « instrument professionnel » de plongée dont l’horlogerie tricolore peut être fière. Le « bloque-couronne » (à la hauteur de la couronne de remontage), qui sécurise la manipulation de celle-ci pour en éviter les glissements intempestifs, a été revu et corrigé. Le verre saphir en dôme est encore plus résistant et il apporte, en plus, une touche vintage des plus réussies. Le Super-LumiNova du cadran a été renforcé et amélioré pour la lecture dans la pénombre. Bref, avec 43 heures de réserve de marche et une précision de l’ordre de plus ou moins dix secondes par jour, cette montre automatique, disponible en 39 mm ou en 41 mm, est une des meilleures options pour les loisirs sportifs de l’été. Comme elle n’est facturée qu’à moins de 1 250 euros (Yema vous offre le bracelet « Oyster »), c’est aussi une des meilleures options sportives « dures » mais quand même chic de ce printemps. La version en cadran vert est irrésistible, surtout à ce prix…

BRISTON x GILI’S : Le temps d’un grand bain…

On dirait le Sud – peut-être. On dirait l’Ouest, ou le sud de l’Ouest – sans doute, quelque part sur l’Atlantique ou en Méditerranée. On dirait surtout la mer, les rochers, le soleil et ces lumières qui n’en finissent pas d’éclairer les vacances d’été. La marque française de maillots de bain Gili’s ne pouvait que s’allier avec Briston, la plus chic sportive des marques horlogères françaises, pour une collection de montres dans l’esprit des deux maisons. De Briston, Gili’s a gardé le chronographe Clubmaster Classic et la « plongeuse » Clubmaster Diver, montres sportives qui plaisent aux dames comme aux messieurs (boîtier en acétate « écaille de tortue » de 40 mm). À Gili’s, Briston a emprunté le jaune fluo qu’on retrouve sur les lignes de maillots de bain, le fond « azulejos » qui décore le cadran (c’est un des motifs iconiques des maillots) et le logo qui co-signe la montre. Un partenariat qui ne pouvait que réussir, les créateurs des deux marques (Clarisse et Aymeric pour le bain, Brice pour le poignet) étant naturellement copains ! Pour le prix d’une Briston (300 euros pour la Clubmaster Classic, 500 euros pour la Diver), vous aurez le style Gili’s pour compléter votre style estival – espadrilles et chemise en seersucker recommandées…

RAKETA : Au temps d’avant notre temps…

Avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les montres de la manufacture Raketa (Saint-Pétersbourg) ont acquis une sorte de voile sulfureux qui les rend probablement encore plus désirable – c’est un peu le charme éternel du diable. Charme qui semble combattre le violet épiscopal et l’orange probablement très bouddhiste de cette version limitée de la montre Avant-Garde réimaginée par le blog indépendant The Horophile. On sait que les « collabs » entre sites et montres sont légion, mais celle-là sort du commun en rendant hommage à l’avant-garde artistique des premières années du suprématisme, du constructivisme et de l’abstraction très expressive d’un Kandinsky. Formes et couleurs éclatent ici de modernité, avec des aiguilles en rond et en triangle comme plus personne n’en ose par les temps de rétromanie vintage que nous vivons : du coup, cette Avant-Garde horophilienne n’en paraît que plus joyeusement et sincèrement avant-gardiste. Le plus électrisant est peut-être le prix : comptez à peu près 1 650 euros hors taxes pour des montres « trois-aguilles » (« Time Only » disent les anglomanes) les plus originales de ce printemps…

BVLGARI : En avance sur son temps…

Une montre en aluminium sur bracelet caoutchouc : voici vingt-cinq ans (1998), c’était une forme de révolution dans l’horlogerie. Il falait oser, mais ce n’est jamais l’audace qui manque chez Bvlgari, qui revient cette année avec une nouvelle version de son icône aluminée, toujours aussi sacrément décontractée et toujours aussi séduisante par son mélange de fantaisie à l’italienne, de rigueur à la suisse et d’élégance estivalo-chic. Parmi les propositions de ce printemps et en vue des lumières iodées de l’été, on aime l’édition Capri avec son cadran bleu dégradé comme cet instant magique où le jour bascule vers le nuit sur les rochers sacrés de l’île de Capri (le dos de la montre est gravé des Faraglioni, les trois formations rocheuses emblématiques des côtes découpées de la baie de Naples). Ne comptez le nombre de fois où le mot « Bvlgari » est écrit sur cette montre, dont le glamour est si évident qu’elle pourrait même ne pas être ainsi griffée – mais cette insistance dans le bleu tyrrhénien fait partie de son charme italianissime. L’Aluminium de Bvlgari, c’est une des façons les plus élégantes de rester dans son temps sans être vraiment de son temps : voici deux millénaires, nos ancêtres les Romains de l’Antiquité avaient déjà succombé aux charmes de Capri…

SIMON BRETTE : Pour donner du temps au temps…

Peut-être avons-nous gardé le meilleur pour la fin, parce que l’apparition sur le marché des « chronomètres » [pas chronographes !] signés par le jeune horloger français Simon Brette sont une des meilleures nouvelles qui soient arrivées à la création horlogère française au cours de ces dernières années ? Ce « Chronomètre Artisans » dit bien son nom, plus par « artisans », d’ailleurs, que par « chronomètre » puisqu’on attend encore les certificats de chronométrie ou les bulletins d’observatoire ad hoc – mais ce n’est qu’une question de temps. « Artisans » parce qu’il y a pas un seul composant, un seul détail, un seul volume de cette montre en zirconium de 39 mm de diamètre qui n'ait été soigneusement réfléchi, pensé, taillé et poli dans les règles d’un art oublié qui ne s’apprend plus dans les écoles horlogères, où on ne forme plus que des opérateurs modèles pour robots d’usinage [on exagère à peine] ! Ce n’est pas une montre, mais une sorte de plateforme de démonstration d’artisanat mécanique horloger : avec Simon Brette, on retrouve la « patte » des grands maîtres horlogers du XVIIIe siècle, tant dans l’absence de toute compromission avec les facilités de notre époque que dans l’extraordinaire qualité des finitions et de la décoration – là où « ça se voit » autant que là où « ça ne se voit pas ». C’est peut-être cet intégrisme exigeant et incandescent, poussé très au-delà des normes les plus contraignantes, qui vaut à Simon Brette [qui travaille à Genève et qui a été à bonne école chez les nouveaux hauts horlogers les plus créatifs de la place] et à son équipe quelques jalousies de leurs chers confrères suisses ! Le mouvement est entièrement nouveau et « fait maison » comme il se doit, chaque élément [nous disons bien « chaque », et il y en a 226, bracelet compris] en étant non seulement fiabilisé, mais également « soigné » pour donner le meilleur de lui-même dans la durée. Le style témoigne d’une rare maturité dans la maîtrise d’une harmonieuse dissymétrie et dans la réinvention de la concavité comme source de lumière : si vous regardez attentivement les vis (par exemple, celle du cadran, en haut de cette page), vous remarquerez qu’elles sont bombées vers l’intérieur, concaves donc, ce « creux » captant de superbes reflets : la perfection de chaque vis réclamant plusieurs heures de polissage, imaginez la somme des heures nécessaires à la réalisation d’un tel mouvement. Ce qui peut, bien entendu, expliquer le prix d’un tel Chronomètre Artisans, qui dépasse les 50 000 euros si vous avez la chance de pouvoir en commander un. C’est à la fois un belle somme, mais aussi une fraction de ce que les amateurs et les collectionneurs ont payé aux enchères, le week-end dernier à Genève, pour des montres franchement « industrielles » ou même pour des créations d’ateliers dont l’« artisanat » qualifie la taille des équipes plus que leur qualité de travail ou leur goût du « fait main » intégral. Simon Brette : retenez bien son nom ! S’il ne prend pas la grosse tête à force d’être adulé par les amateurs, on tient peut-être là notre futur Louis Abraham Breguet…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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