Quand l’âge d’or vous dit merci et quand les Stones envahissent le plateau : c’est l’actualité solsticiale des montres <!-- --> | Atlantico.fr
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La maison Ochs und Junior (du nom du génial mécanicien contemporain Ludwig Oechslin) est un des plus sympathiques ateliers horlogers du paysage suisse.
La maison Ochs und Junior (du nom du génial mécanicien contemporain Ludwig Oechslin) est un des plus sympathiques ateliers horlogers du paysage suisse.
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Atlantic-Tac

Mais aussi un anneau magique qui peut effacer une déroute, un monopoussoir que personne ne repousse, la vie en rose au gré des saisons, des oursons en gélatine et un bip-bip de poignet…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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OCHS UND JUNIOR : Saisonnalisée…

La maison Ochs und Junior (du nom du génial mécanicien contemporain Ludwig Oechslin) est un des plus sympathiques ateliers horlogers du paysage suisse : on y pratique avec allégresse un minimalisme mécanique [moins il y a de composants, plus c’est chic !] qui est poussé jusqu’au minimalisme tarifaire, avec des montres créatives qui dépassent rarement les 3 000 euros. Voici une nouvelle série de montres Settimana (« semaine »), cette fois saisonnières : il y aura une couleur par grande saison – vert pour l’été, orange pour l’automne, bleu pour l’hiver et rose pour le printemps, première pièce à être lancée en 36 mm et 40 mm, avec un mouvement automatique, au prix de 2 500 euros [c’est une bonne affaire !]. L’aiguille des secondes rose foncé n’est pas la moindre des originalités de cette montre : on appréciera aussi son calendrier hebdomadaire très… ponctuel, puisque chaque jour de la semaine est repéré lui aussi rose foncé (lundi, mardi, etc., cette date sautant automatiquement du dimanche au lundi, en haut du circuit au centre du cadran). Il y a quelque chose de joyeux dans ces Settimana saisonnières, qui savent ne pas se prendre au sérieux alors qu’elles sont horlogèrement très sérieuses – c’est exactement ce qu’on attend d’une montre suisse quand on a fini par se détacher des fétiches ostentatoires de la spéculation ordinaire…

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LOUIS ÉRARD x MASSENA LAB : Monopoussée…

On ne nous avait encore jamais fait le coup de la nouvelle montre lancée sans lancement, et totalement vendue au public sans vente publique. Explication de ce mystère : c’est l’histoire d’une « collab » (« collaboration ») sinon secrète, du moins très discrète, entre la marque indépendante Louis Érard, bien connue de nos lecteurs, et le laboratoire créatif Massena Lab, dont nous vous parlons également souvent. Objet de ce regard croisé : la « réécriture » du chronographe monopoussoir cher à Louis Érard, avec les codes vintage favoris de Massena Lab – à savoir boîtier en acier de 43 mm, superbe rehaut extérieur pour le « chemin de fer » des minutes et des secondes, compteur argenté déporté à midi pour comptabiliser les trente premières minutes du chronographe, cadran grainé bleu, aiguilles feuilles bleuies pour les heures, les minutes et les secondes, commande du chronographe intégrée dans la couronne de remontage, etc. Le résultat est assez bluffant : c’est la « friandise » horlogère qui fait saliver tous les collectionneurs, l’élégante pureté du monopoussoir ajoutant à la distinction de la montre. Les deux maisons n’en ont produit que 28 exemplaires, facturés dans les 4 500 euros : tout a été vendu en quelques minutes aux meilleurs clients des deux marques, simplement contactés par e-mail. C’est la nouvelle tendance pour vendre des montres : produire très serré, restyler en beauté, frapper vite et passer immédiatement à une autre série limitée…

MERCI : Compartimentée…

Le président Emmanuel Macron ayant assuré, entre autres montres tricolores, la promotion horlogère de la maison parisienne Merci (« concept store » solidaire et ultra-tendance), celle-ci s’efforce de tenir son rang et elle semble y réussir. Les montres Merci sont très françaises par leur esprit, quoique très suisses par leur lettre (à peu près tout est fait en Suisse), mais très vintage par leur inspiration et très contemporaines par leur prix. La nouvelle LMM-01 The Archiwatch est un bon exemple de cette réussite stylistique : développée en collaboration avec The Archiwatch, un site dédié au commerce des montres vintage, cette montre de 38 mm est mécanique (mouvement suisse Sellita à remontage manuel, boîtier suisse, cadran suisse, etc.) et certains détails la rendent très expressive aux yeux des amateurs. Par exemple, le simple « 12 » en chiffres Breguet apposé à midi. Tout aussi séduisant, le compartimentage sectoriel des échelles des minutes et des heures autour du cadran : on ne faisait pas plus « moderne » dans les années 1960. Notez également les aiguilles « Dauphine », celle des heures étant à peine trop courte par coquetterie. Repérez enfin le « fab. suisse » à l’ancienne, autrement plus chic et moins galvaudé que le Swiss Made habituel et ne passez pas à côté du nom de la marque, « Merci Instruments » et de la mention « The Archiwatch » sous les aiguilles, et non dessus comme les marques le pratiquent le plus souvent : c’est un signe de soumission aux codes de l’âge d’or des montres mécaniques. Quand on vous dira le prix (650 euros) pour un tel condensé de culture horlogère, vous bondirez chez Merci, mais, comme il n’y aura que 250 montres dans cette édition limitée, vous avez de fortes chances d’avoir été précédés par les plus connaisseurs des meilleurs amateurs chez les grands collectionneurs…

JAQUET DROZ : Rock’n’rollée…

Le phénomène Rolling Stones est planétaire, mais la manufacture suisse Jaquet Drozen fait un capricieux plaisir solitaire pour les amateurs de belle horlogerie. On est ici dans la passion absolue pour le légendaire groupe de rock, dont tout l’univers est concentré sur cette montre. Au centre, un cadran qui donne l’heure – c’est bien le moins qu’on puisse demander à une l’heure. C’est cependant autour de cette heure que le concert commence : on y reconnaît les instruments favoris de la bande à Mick Jagger. Dans ce stage set, de gauche à droite, la strato de Ron Wood devant son stack double corps, la batterie minimaliste de feu Charlie Watts, puis les autres guitares de Ron Wood et Keith Richards – sa plus célèbre guitare à cinq cordes, avec laquelle le « Riff humain », surnommé Keef Riff Hard a gravé les sillons les plus légendaires du rock. En fidèle automate horloger, ce plateau tourne autour du cadran quand on actionne le poussoir logé dans la couronne de remontage. Tout autour de ce stage set musical, six des albums les plus emblématiques du groupe sur un disque qui va tourner, lui aussi, pendant une trentaine de secondes autour de la scène centrale. Détail qui amusera les fans : on remarque, à neuf heures, la tête de lecture d’un disque vinyle – on vous parle d’un temps que les moins de trente ans (la génération des CD) ne peuvent pas connaître. C’est la réserve de marche de la montre, qui va se déplacer au-dessus du fameux logo des Rolling Stones, leur langue tirée. Tout le spectacle est bien entendu réalisé à la suisse, en mode précieux, avec des guitares et des batteries en or : même l’harmonica de Mick Jagger est en or ! Comble du plaisir solitaire de l’heureux amateur qui pourra se procurer une de ces montres, toutes pièces uniques personnalisées : il pourra choisir le nom de l’album qui sera gravé sur le rotor en or rouge de la montre, au verso du boîtier. Le plus grand groupe de rock de tous les temps méritait bien un hommage spectaculaire dans l’univers de la haute horlogerie : « Pour tous ceux qui sont nés après 1963, il y a le Soleil, la Lune. Et les Rolling Stones », disait Keith Richards. Il a trouvé à qui parler en Suisse…

G-SHOCK : Gélatinée…

Regardez bien sur le cadran ou sur les poussoirs cette touche translucide et acidulée, avec une silhouette caractéristique : non, vous n’avez pas rêvé, il s’agit bien du petit ours des bonbons Haribo, et vous avez déjà le goût du citron, de la framboise, de la pomme ou de l’orange sous la langue. Le « Goldbear »– c’est son nom : « ours d’or » – a colonisé cette fois une Baby-G de la collection G-Shock (Casio) : quand vous activerez le rétroéclairage de ce cadran purement numérique, vous découvrirez plus précisément les formes gélatineuses de ce Goldbear qui vous a fait si souvent craquer. Le boîtier en résine blanche presque translucide complète l’illusion : la mode est aux « bonbons » horlogers, profitez-en, sachant que vous avez le choix entre cette Baby-G Haribo, facturé dans les 120 euros, et quelques paquets de ces oursons dorés, qui valent à peu près 60 euros le kilo – sans colorant artificiel, rappelons-le. Ah, au fait, cette montre donne l’heure, avec une multitude de fonctions annexes, mais elle ne se déguste pas ! Une régression adulescente bien assumée : il faut de tout pour faire une montre !

BON À SAVOIR : en vrac, en bref et en toute liberté…

•••• RINGCONN : si les montres connectées (de type Apple Watch) ont totalement pulvérisé l’entrée de gamme de l’horlogerie classique, ces montres traditionnelles ont peut-être trouvé de quoi prendre leur revanche. Il s’agit d’un « anneau de santé », une sorte de grosse alliance qu’on porte au doigt pour enregistrer, en continu, de multiples paramètres individuels d’activité (par exemple, le niveau de stress, l’oxygénation du sang, les battements cardiaques, la température de la peau, la consommation de calories ou la qualité du sommeil : vidéo ci-dessous). Précisément, c’est à cause de ces paramètres de santé que les smartwatches ont pu s’imposer au poignet, d’où elles ont expulsé les montres traditionnelles – en plus de leurs fonctions téléphoniques, musicales ou relationnelles. L’anneau de santé comme futur champ de bataille ? Pourquoi pas : la campagne de sociofinancement de RingConn sur Indiegogo a généré en quelques jours près de 850 000 euros de précommandes passées par 5 400 amateurs, ce qui n’est pas anecdotique ! À la place des marques suisses, on offrirait systématiquement un de ces anneaux de santé (prix moyen : 140 euros) à tous les acheteurs de montres classiques, pour libérer la place qu’occupe souvent les montres connectées à leur poignet… •••• SWATCH : on pensait la fièvre MoonSwatch en train de se calmer, mais l’approche des fêtes a regonflé les files d’attente devant les boutiques de la marque. S’il y a davantage de choix dans ces boutiques pour les couleurs de ces MoonSwatch, il n’y en a pas assez pour tout le monde ! En 2022, Swatch aura vendu près d’un million de ces montres décalquées en mode « bioceram » de la célébrissime Speedmaster Moonwatch d’Omega, soit la moitié de tout ce que Swatch aura pu vendre par ailleurs de ces modèles classiques – ce qui est consternant par rapport à la dizaine de millions de montres que Swatch pouvait encore vendre voici dix ou quinze ans. La MoonSwatch serait-elle le chant du cygne de la Swatch, l’ultime feu d’artifices d’une marque fantastique qui perd aujourd’hui près d’un million d’euros par jour ouvrable du calendrier ? •••• RAKETA : le lancement du premier satellite artificiel placé en orbite autour de la Terre ne date que d’il y a soixante-cinq ans. Spoutnik-1 n’était qu’une sphère en aluminium de 58 centimètres de diamètre (83 kg avec les autre antennes), mais toute la planète a guetté et écouté son fameux « bip bip ». La manufacture russe Raketa fête ce 65e anniversaire avec sa Spoutnik-1, dont le cadran est fait du même alliage aluminium-magnésium AMg6 que le bouclier thermique du satellite. Comme là-haut, entre 227 km (périgée) et 945 km (apogée), il n’y a plus de coucher ou de lever du soleil, le mouvement décompte le temps sur vingt-quatre heures, avec midi et minuit à six heures d’une montre qu’on peut commander en ligne sur le site de Raketa, moyennant 1 800 euros (ci-dessous). L’épopée de la conquête spéciale au poignet, ça vaut bien les Rolling Stones non ?

LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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