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François Hollande a choisi de nommer Manuel Valls Premier ministre à la place de Jean-Marc Ayrault.
François Hollande a choisi de nommer Manuel Valls Premier ministre à la place de Jean-Marc Ayrault.
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François Hollande a choisi de nommer Manuel Valls Premier ministre à la place de Jean-Marc Ayrault suite aux résultats catastrophiques de la gauche aux dernières élections municipales.

Matthieu  Chaigne

Matthieu Chaigne

Matthieu Chaigne est co-fondateur du site Délits d'Opinion, site de référence de l'opinion publique et des sondages. Il a commencé sa carrière au  pôle politique de TNS SOFRES avant de travailler au sein du groupe Ogilvy à partir de 2008  en tant que planneur stratégique. En 2012 il a rejoint le cabinet de conseil en communication Taddeo, en charge notamment des études et du planning stratégique

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Et si cela ne changeait rien ?

Indéniablement, le remaniement annoncé par le président de la République a permis de clore la séquence des municipales, abrégeant le supplice médiatique d’une semaine de critiques acerbes à l’encontre du gouvernement.

Mais la nomination de Manuel Valls va t-elle réellement offrir de l’oxygène au président ? En mai 2012, en choisissant Jean-Marc Ayrault, François Hollande avait privilégié le confort d’une relation de confiance aux choix plus tactiques qui s’offraient à lui. Une décision qui l’a laissé nu face au peuple, sans fusible à même de cristalliser la colère des Français. Comme le révèlent les données du baromètre Harris Interactive pour Délits d’Opinion, Jean-Marc Ayrault n’a en réalité jamais réussi à s’extraire de l’ombre portée de François Hollande, suscitant la défiance d’abord parce qu’il était associé au président.

A l’inverse, Manuel Valls dispose de traits d’images bien identifiés ainsi que d’une popularité utile pour occuper l’espace et réduire l’exposition subie de François Hollande. Certes l’étoile des sondages a pâli ces derniers mois. La popularité de Manuel Valls a baissé selon le baromètre Harris Interactive/ Délits d’Opinion pour s’établir à 43% au mois de mars, alors qu’elle culminait à 57% au mois d’octobre. Une érosion principalement à mettre sur le compte d’une double désaffection des sympathisants FN et UMP. Néanmoins, Manuel Valls demeure toujours le ministre le plus populaire de la gauche.

Mais ces atouts permettront-ils au président de redorer son blason ? Une lecture historique des remaniements témoigne de l’impact extrêmement limité de ces derniers. 

Nous sommes en mai 2005. Jacques Chirac, au plus bas dans les sondages, doit impulser une nouvelle étape, après le non au référendum sur l’Europe.

Nommé fin mai en remplacement de Jean-Pierre Raffarin, Dominique de Villepin suscite durant les premiers mois et avant l’épisode du CPE un réel engouement. Mais, dans le même temps, la cote de popularité du président Chirac ne cesse de se dégrader. Crédité de 32% de bonnes intentions en mai 2005 selon TNS Sofres, il tombe à 21% en juillet de la même année. Le renouvellement des têtes dans les ministères ne parvient à masquer l’impuissance d’un président dorénavant sans prises sur le réel.

De même, sous le second quinquennat de François Mitterrand, les changements de Premier ministre témoignent de la même incapacité à infléchir la disgrâce subie. La nomination de Edith Cresson en juin 1991 donne l’impression durant l’été de pouvoir endiguer l’hémorragie qui frappe le président. Mais dès la rentrée de septembre, la popularité de François Mitterrand replonge pour atteindre 31% en décembre 1991. Et la nomination de Pierre Bérégovoy, censée renouer avec l’électorat populaire, n’aura jamais l’effet escompté.

L’analyse des remaniements sous Nicolas Sarkozy, plus limités car ils ne concernaient pas le Premier ministre, ont également démontré les limites de l’exercice. Par exemple, après le remaniement du printemps 2009 et dans la foulée d’une hausse conjoncturelle consécutive aux bons résultats de l’UMP aux élections européennes, le président chute avec 60% de défiance.

Pourquoi les remaniements ne permettent-ils pas d’inverser les tendances ?  

D’abord parce que changer les hommes sans changer la politique limite l’efficacité de ces mercatos. Certes, ces dernières semaines la lecture des sondages a pu laisser entendre que la demande de remaniement était  importante : 79% des Français le souhaitaient selon un sondage BVA, réalisé dans l’entre deux tours des municipales. Néanmoins, dans les détails, le souhait était majoritaire, mais d’une courte tête (51%) parmi les sympathisants de gauche tandis que la demande de remaniement, majoritaire chez les sympathisants de droite semblait avant tout exprimer la défiance envers l’exécutif.

Car au fond d’eux-mêmes, une majorité de sondés, 68% selon une enquête Opinion Way, estiment qu’un remaniement n’aurait aucun effet sur la reprise économique. En réalité, le jeu de chaises musicales laisse profondément sceptiques des Français totalement blasés quant aux possibles effets positifs à attendre. Ainsi, 59% des Français estiment  selon l’IFOP que Manuel Valls ne fera ni mieux ni moins bien que le gouvernement précédent contre 33% d’un avis contraire.

Alors, le Premier ministre peut bien-sûr surprendre, profiter du soutien du peuple de gauche et de la neutralité bienveillante de celui de droite. Mais l’espoir que ce succès valorise le président par effet de halo paraît bien ténu, tant l’autorité et la popularité de l’un s’est précisément construite en contrepoint de la faiblesse perçue de l’autre.

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