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Gabriel Attal s'adresse aux députés lors d'une séance de questions à l'Assemblée nationale à Paris, le 10 avril 2024.
Gabriel Attal s'adresse aux députés lors d'une séance de questions à l'Assemblée nationale à Paris, le 10 avril 2024.
©JULIEN DE ROSA / AFP

Chroniques parlementaires

Jean-Eric Gicquel, déontologue de l'Assemblée nationale, vient de présenter son rapport pour l'année 2023, marquant ainsi sa première année complète en fonction. Ce rapport fait écho à celui du comité de déontologie du Sénat, fournissant ainsi une perspective sur l'évolution de cette fonction qui a connu de nombreux changements depuis son instauration au tournant des années 2010

Samuel Le Goff

Samuel Le Goff

Ancien assistant de députés, ancien journaliste parlementaire et aujourd'hui consultant, Samuel Le Goff fréquente le palais Bourbon et ses environs depuis 20 ans.

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Le déontologue de l’Assemblée nationale, Jean-Eric Gicquel, vient de publier son rapport pour 2023, sa première année “pleine” en rythme de croisière. Il suit de peu celui du comité de déontologie du Sénat. Cela permet d’avoir une image de l’évolution de la fonction, qui a beaucoup bougé depuis sa mise en place, au tournant des années 2010 (2009 au Sénat, 2011 à l’Assemblée).

Aux fonctions initiales, de prévention des conflits d’intérêts et de la corruption (par les lobbies) toujours présentes, s'ajoute le contrôle de l’utilisation des frais de mandat qui occupe beaucoup de temps et de moyens. La moitié du rapport à l’Assemblée est consacré à ce sujet. Comme beaucoup de réformes dans le domaine de la déontologie, celle-ci a été adoptée un peu à corps défendant par les parlementaires, sans trop de réflexion sur les modalités pratiques. C’est donc aux organismes chargés de la mise en œuvre que revient, par petites touches, de fixer les limites et la jurisprudence.

Les deux rapports fourmillent de réponses, parfois très pointues, à des questions de parlementaires, tombant parfois dans un pointillisme byzantin. On y trouve toute une doctrine sur les cotisations (de quelques dizaines d’euros) à des associations , qui peuvent, ou pas, relever du mandat, et donc être prises en charge sur l’AFM. Même chose pour la communication, où on apprend qu’il est déconseillé à un député de faire prendre en charge les dépenses liées aux modifications apportées par un prestataire à sa page Wikipédia. Outre le fait que les contributeurs de l’encyclopédie n’aiment pas du tout cela (et le font payer cher à ceux qui se font prendre), le contenu de la fiche peut ne concerner que partiellement l’activité de député, et donc ne pas être en lien direct et exclusif avec le mandat.

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Le sujet des comptes payants sur les réseaux sociaux, et des posts sponsorisés est également évoqué. Au Sénat, on estime qu’un compte prémium sur Linkedin n’entre pas dans l’enveloppe des frais de mandat, car les fonctionnalités ne répondent pas aux besoins d’un parlementaire, et qu’un simple compte gratuit suffit amplement.

On apprend également qu’un sénateur peut acheter, sur ses frais de mandat, des livres qu’il a écrit, pour les offrir à ses visiteurs. Mais dans ce cas, il lui est demandé de renoncer aux droits d’auteurs, pour éviter un enrichissement personnel.

Sur l’encadrement du lobbying, la grande nouveauté de l’année est la mise en demeure de Phytéis, le lobby des pesticides, accusé d’avoir gonflé les risques de suppressions d’emplois, dans les argumentaires envoyées aux parlementaires lors de la loi Pacte en 2019. Critiquée dans les deux assemblées, cette organisation professionnelle, attaquée par les élus écologistes, n’a pas été en mesure de donner les méthodologies et les données ayant permis d’arriver à cette annonce alarmiste (qui ne s’est finalement pas concrétisée dans les faits). Cela ouvre un nouveau champ de bataille, entre lobbyistes, avec la tentation d’utiliser ces procédures déontologiques, pour discréditer son adversaire. Encore un sujet qui pourrait s’étendre dans les prochaines années, mais qui obligera les représentants d’intérêts à blinder un peu plus leurs argumentaires, et à être capables de justifier leurs chiffres.

Les parlementaires ayant tendance à saisir de plus en plus souvent les organes de déontologie (ce qui est un bon signe), la jurisprudence devrait continuer à s’enrichir et à foisonner.

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