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Les nouvelles failles de l'Aide sociale à l'enfance
©STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Enfants en danger

Après l'enquête de "Pièces à conviction" menée il y a un an par France 3 sur les défaillances de l'Aide sociale à l'enfance, un nouveau documentaire paru dimanche sur M6 a suscité un tollé, en révélant les graves manquements de l'État lors de la prise en charge de mineurs dans des foyers.

Le sort des "sacrifiés de la République" reste inchangé. Il y a tout juste un an, le documentaire diffusé par France 3, filmé en caméra caché, levait le voile sur le sort des enfants placés. Il pointait déjà du doigt les dysfonctionnements de l'Aide sociale à l'enfance, censée protéger les jeunes en les éloignant de leurs parents et en les plaçant en "lieu sûr". Mais bien souvent, le calvaire continue.  Éducateurs dépassés, parfois maltraitants, des enfants en pleine détresse dans des situations d'une extrême gravité : certains sont sexuellement abusés par leurs camarades. D'autres, âgés de 15 ans, sont placés dans des chambres d'hôtel, livrés à eux-mêmes. Côté familles d'accueil, les contrôles sont rares. Certaines assistantes familiales condamnées pour maltraitance continuent à accueillir des enfants. Après le tollé suscité par ces révélations, le gouvernement avait réagi en nommant Adrien Taquet au gouvernement, auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé.

Mais un an après la nomination du Secrétaire d'État, rien ne semble avoir changé. Dimanche, après la diffusion de l'enquête menée par "Zone Interdite" sur le sujet, le Adrien Taquet avait exprimé, dans un communiqué, son "émotion" et sa "détermination à agir face à ces dysfonctionnements majeurs". Du reportage, il retient "des adolescents pris en charge dans des conditions indignes, victimes de violences de la part d'adultes qui devraient prendre soin d'eux et les protéger." Dans un entretien au quotidien La Croix, il a demandé aux préfets de lui "transmettre, dans les trois mois, un état des lieux de la manière dont ces établissements sont contrôlés".

Des enfants humiliés et maltraités

Inflitrés à l'aide de caméra cachées, les journalistes révèlent dans le documentaire des conditions sanitaires désastreuses, notamment dans un foyer de Seine-Saint-Denis. "Il y a de la merde dans l'eau. Ça sentait très fort. Donc on s'est dit qu'il y avait peut-être un rat mort qui a infecté l'eau. Ils avaient vu un rat, les gamins. Ils en avaient filmé un en train de courir", raconte une travailleuse sociale. Le documentaire revient aussi sur des violences commises par des éducateurs dans un foyer situé à Jarsy (Savoie). Une éducatrice y raconte comment elle a été témoin d'humiliations et d'actes de maltraitance subis par les enfants : "Le jeune était attaché avec une corde à la barrière, assis par terre en position de chien, et il lui demandait d'aboyer", raconte-t-elle. Deux responsables de ce foyer ont été condamnés en 2018 à un an de prison ferme

Dans un foyer de Dijon (Côte-d'Or), l'enquête de M6 révèle que des éducateurs non formés administrent des neuroleptiques à une adolescente de 13 ans, "ingérable" en raison de ses problèmes psychiatriques, mais non suivie par un psychiatre. Aucune infirmière, censée contrôler la prescription, n'est présente lors de l'administration des médicaments.Certains enfants se sont vu par ailleurs administrer des tranquillisants sans prescription et sans qu'on leur ait diagnostiqué des troubles psychiques. Une ex-pensionnaire du foyer de Jarsy accuse l'ancienne directrice de l'établissement. "Le soir, à table, elle disait aux éducateurs : 'Donnez-leur leurs gouttes, mettez la dose, comme ça ils ne nous feront plus chier après.' C'était du Tercian", un neuroleptique notamment prescrit pour traiter la schizophrénie ou les troubles graves du comportement. La directrice reconnaît dans le documentaire avoir drogué certains pensionnaires "une ou deux fois, mais pas systématiquement".

Des cas de prostitutions signalés

Toujours dans le foyer de Dijon, l'enquête de "Zone interdite" révèle que des jeunes filles fuguent et sont laissées dans la nature pendant plusieurs jours sans être recherchées par la police. D'après le personnel, certaines d'entre elles vendraient du cannabis et se prostitueraient. "Elles, c'est drogue, prostitution. Le chef de service était allé les chercher, il les avait trouvées dans une chambre d'hôtel", explique une employée, sans savoir qu'elle est filmée en caméra cachée, à propos de deux adolescentes de 13 ans. Une autre pensionnaire du foyer confirme les faits : "Elle baise pour de l'argent, une prostituée. J'ai fugué avec elle et je l'ai vu faire tout ça." 

L'enquête s'intéresse aussi à un foyer situé dans le Vaucluse où "des jeunes filles placées (…) sont des proies pour les proxénètes", affirme M6. Interrogé par La Croix, Adrien Taquet estime que "le sujet concerne, certes, des jeunes de l'ASE qui sont des proies faciles. Mais il est plus vaste". "On estime que 8 000 enfants sont prostitués en France, un fléau qui n'épargne aucun milieu social, continue-t-il. Nous allons lancer un groupe de travail avec la police, la justice, les associations afin d'élaborer une réelle politique publique." 

En France, plus de 350 000 mineurs font l'objet d'une mesure de protection de l'enfance. Parmi eux, la moitié sont placés dans des foyers ou des familles d'accueil.

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