Y a-t-il des gens dont le cerveau les condamne à être nuls en math : ce que nous en dit la science désormais <!-- --> | Atlantico.fr
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La structure cérébrale répond en partie à une pré-détermination.
La structure cérébrale répond en partie à une pré-détermination.
©Flickr/IsaacMao

Zéro plus zéro égal la tête à Toto

De la même manière que les caractéristiques physiques sont définies par le patrimoine génétique des ascendants, la structure cérébrale répond en partie à une pré-détermination. Le milieu social et les expériences permettent cependant d'entraîner notre matière grise et de réduire cet effet.

Michel Dib

Michel Dib

Michel Dib est neurologue à l’hôpital de la Pitié-Salpétrière depuis plus de vingt ans. Membre de la Société Française de Neurologie, il est auteur de plusieurs ouvrages scientifiques et destinés au grand public, notamment Apprivoiser la migraine aux Editions du Huitième Jour.

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Atlantico: Une partie de nos capacités intellectuelles sont définies par avance, elles sont donc d'origine congénitale. Ainsi, naît-on fondamentalement bon ou mauvais en mathématique ?

Michel Dib : Dire que l'on naît fatalement bon ou mauvais en mathématique serait aller trop loin. Tout comme nos caractéristiques physiques (petit ou grand, blond ou brun…) nos caractéristiques intellectuelles sont définies par notre capital génétique. Notre patrimoine génétique définit l'activité de certaines zones du cerveau et notamment celles responsables de notre type d'intelligence.

Notre cerveau est programmé pour certaines caractéristiques dont font parties le type d'intelligence et les capacités intellectuelles. Cela fonctionne à l'identique pour le type de mémoire que l'on possède. Ainsi, on peut globalement dire nos capacités cognitives sont définies par avance.

Qu'est-ce qui nous prédestine à avoir des capacités plus ou moins poussées dans ces domaines ? Est-ce un trait génétique ?

Ce qui va nous prédestiner à être plus ou moins bons dans certains domaines, sera l'activité des structures de certaines zones du cerveau responsables de telles ou telles taches. Par exemple, comme nous pouvons être grand ou petit, musclé ou faible ; l'activité de notre cerveau et nos domaines de prédilection varieront d'une personne à l'autre.

Si nos facilités intellectuelles ont à voir avec notre génome, le milieu social dans lequel on évolue comporte une importance non négligeable. Par exemple, si nos parents sont mauvais en mathématiques cela veut-il dire que nous le serons également ? Non, pas forcément, entre en  jeu le champ d'action qui nous donne la possibilité ou non d'exercer nos facilités dans un domaine en particulierIl faut donc d'un côté un patrimoine génétique avec un réservoir cognitif compatible avec une intelligence mathématique, dans ce cas précis, et la possibilité de pratiquer cette faculté.

Par exemple, certaines personnes avec un réservoir cognitif orienté vers le domaine mathématique, peuvent être amenées à pratiquer leur intelligence logique dans des domaines littéraires. Les deux ne sont pas incompatibles, leurs carrières seront seulement atypiques.

D'autre part, si l'aspect génétique de nos capacités intellectuelles est indubitable, la transmission n'est pas forcément directe : elle peut sauter une ou plusieurs générations.

Pour résumer, ce n'est pas parce que nos parents sont des littéraires, que nous aurons nous même une intelligence littéraire et réciproquement en ce qui concerne l'intelligence mathématique. Il ne faut pas mélanger le mot congénital et le mot génétique : on peut naître avec un capital génétique compatible avec une intelligence mathématique sans que celle-ci nous soit parvenue de parents par transmission directe.

Peut-on travailler ses capacités de base dès l'enfance pour s'améliorer, sans pour autant devenir un mathématicien de génie, mais simplement être plus doué dans ce domaine ?  

Est-ce que le fait de travailler certaines zones les développe d'avantage ? C'est-à-dire faire des exercices cognitifs peut-il développer notre mémoire mathématique ou non ?  Aujourd'hui, nous n'avons pas de preuves suffisantes pour l'affirmer. Est-ce que faire des exercices cognitifs régulièrement accentue notre réservoir et notre intelligence mathématique ou bien est-ce le fait de posséder une intelligence mathématique développée qui nous rendra plus performants dans nos exercices cognitifs ?

Afin de comprendre, prenons un exemple différent, celui de l'exercice physique : l'interprétation la plus facile serait de dire que le sport développe nos muscles et nos capacités physiques, mais une plus récente affirme que certaines personnes ont besoin d'entretenir une activité physique débordante pour se vider de leur énergie. La première version affirme donc que faire du sport développe nos muscles quand la deuxième tend à dire que ce sont nos muscles qui entraînent notre pratique sportive.

Sans vouloir être pessimiste, les probabilités que l'on puisse changer notre mode d'intelligence sont minces. Cependant, nous pouvons nous entraîner à affirmer, renforcer cette intelligence spécifique. L'idéal serait d'avoir des tests permettant de savoir quel type d'intelligence nous possédons, des exercices ciblés pour mettre la main sur notre type d'intelligence.

Dans d'autres termes, il faudrait pouvoir déterminer si on possède une intelligence mathématique, musicale ou linguistique grâce à un test pour ensuite les renforcer. Or, pour le moment détecter cette intelligence est impossible et on ne peut faire naître chez quelqu'un un mode d'intelligence inexistant. On ne peut transformer en un musicien quelqu'un qui n'aurait pas un mode d'intelligence musicale spontané. A contrario, on peut passer à côté d'un musicien si on n'a pas été en mesure de le repérer et lui donner sa chance (et de même avec les mathématique).  

Dans le cas des mathématiques, on peut muscler ce mode d'intelligence déjà présent avec des jeux à base de chiffres (domino par exemple), mais c'est débusquer cette intelligence qui nous est pour le moment difficile.

Onne dispose pas de preuves scientifiques qui indiqueraient que l'on puisse créer une zone d'intelligence pour le moment inexistante. Les techniques comme la neuromodulation ou le cognitive training ne sont pas encore utilisées pour ces cas précis, mais uniquement pour développer un mode d'intelligence déjà existant.  

Certaines théories défendent l'intérêt de parler très tôt de chiffres à ses enfants ou d’entraîner leurs fonctions cognitives en vue de d'améliorer leur compréhension de la matière. Ceci est-il fondé ou s'agit-il d'une spéculation ? A l'âge adulte, a-t-on encore des chances de s'améliorer en mathématiques ?

Ces théories restent des spéculations, en vue de développer des types d'intelligences encore inexistants chez eux, il faudrait suivre les enfants dès leur plus jeune âge. Ce seraient des études longitudinales suivant les enfants très tôt et sur le long terme visant à vérifier ce qui se créé sur les réserves neuronales. Or, pour le moment nous sommes incapables de le faire et ce serait bien trop couteux !   

Si on trouve que l'enfant est responsif à la neurostimulation ou au cognitive training on fera appel à sa plasticité cérébrale en vue de développer une zone d'intelligence de son cerveau déjà existante. Il faut travailler ces éléments là pendant l'enfance. Après 18 ans, la plasticité cérébrale n'est plus la même, l'apprentissage pénètre moins bien. 

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