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Vote des femmes, la 1ère fois c’était il y a 70 ans : comment le "conservatisme" féminin s’est transformé depuis
©Reuters

Evolutions

Après de longues revendications soutenues par les idéaux de la démocratie, le Général de Gaulle accorde le droit de vote aux femmes en 1944. Et si les électrices votent aujourd'hui davantage que les hommes, la vie politique demeure aujourd'hui encore sous-féminisée.

Camille Froidevaux-Metterie

Camille Froidevaux-Metterie

Camille Froidevaux­-Metterie est professeure de science politique à l'Université de Reims Champagne­-Ardenne. Elle est l'auteure de La révolution du féminin (Gallimard, 2015). Le docu­fiction tiré de son enquête auprès des femmes politiques est visible ici : danslajungle.com

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Atlantico : 70 ans après leur leur avoir attribué le droit de vote, quelles évolutions dans leurs préférences électorales a-t-on pu constater ?

Camille Froidevaux-Metterie : Les femmes ont obtenu le droit de vote en 1944 et, depuis, nous avons pu observer quelques grandes phases relatives à leur rapport à la politique. Jusque dans les années 1970, les femmes votent moins que les hommes et elles sont plus conservatrices. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles elles ont mis autant de temps à être reconnues comme des citoyennes à part entière : si la majorité des députés étaient opposés à leur accorder le droit de vote, les députés de gauche le redoutaient particulièrement. Et, effectivement, dans une première phase, les femmes ont voté davantage à droite.

Avec la seconde vague féministe de la fin des années 1960, on entre dans une seconde phase où les femmes votent autant que les hommes et comme eux d'un point de vue partisan. C'est une phase d'équilibrage.

Puis, à partir des années 1980, et jusqu'à  aujourd'hui, les électrices deviennent plus nombreuses que les électeurs (52% contre 48% actuellement). Elles votent également davantage à gauche : c'est à elles que François Mitterrand doit son élection. On peut penser qu'étant mères, les femmes étaient plus sensibles aux valeurs de la gauche et davantage concernées par les thématiques sociales. Mais l'explication la plus probante est d'une autre nature, elle regarde la cause de l'égalité entre les femmes et les hommes, une cause portée d'abord par le PS. François Mitterrand avait par exemple promis qu'il mettrait en place un système de quota afin qu'il y ait davantage de femmes dans la vie politique. Il n'a pas tenu cette promesse de campagne et il a fallu attendre 2000 pour que soit votée la loi sur la parité.

Le paysage politique connaît actuellement de grands changements. A-t-on pu observer des évolutions récentes ? Quelles sont-elles ?

Le dernier tournant relatif à l'électorat féminin remonte à 2012. Jusque-là, les femmes étaient réticentes à voter pour le Front national (avec un rapport de une pour deux sympathisants FN). Depuis les dernières présidentielles, elles sont aussi nombreuses que les hommes à donner leurs voix au parti frontiste. Le fait qu'une femme le dirige n'est sans doute pas pour rien dans cette évolution. Le FN se préoccupe par ailleurs beaucoup de capter cet électorat, en s'attachant notamment à respecter la parité.

Comment le paysage politique a-t-il accueilli l'arrivée d'électrices, synonyme également de leur droit à accéder aux mandats ?

Si les femmes votent depuis 70 ans, la sous-féminisation de la vie politique est un phénomène persistant. On peut l'expliquer par la forte résistance des hommes politiques, mais c'est aussi lié à la réticence de certaines femmes qui hésitent avant de se lancer dans un milieu hostile. J'ai aussi pu observer en revanche, dans une enquête menée en 2012 auprès d'une soixantaine de femmes politiques, qu'il était beaucoup plus fréquent et aisé pour elles de concevoir un retour à la vie civile au terme de leur mandat. par exemple.

Les femmes en politiques se distinguent-elles de leurs homologues masculins ? De quelle manière ?

Les femmes travaillant autant que les hommes, dans tous les domaines et à tous les échelons, on ne peut pas distinguer l'électorat féminin de l'électorat masculin. Les femmes politiques elles-mêmes refusent l'idée selon laquelle elles feraient de la politique différemment. Elles refusent ainsi qu'on les cantonne dans des secteurs soit-disant féminins comme l'Education, la Culture ou le Social.

En revanche, il est très frappant d'observer qu'il existe des différences dans leur manière de faire de la politique au quotidien. Elles sont plus respectueuses du temps de parole des autres par exemple, et plus soucieuses d'efficacité dans l'organisation du temps politique. Elles sont notamment favorables à des agendas plus équilibrés : en France, le jour le plus important en politique, c'est le mercredi, le jour du Conseil des ministres qui est aussi celui où les enfants ne vont pas à l'école... Ce souci pour l'équilibre des sphères de l'existence,  ce sont les femmes qui l'apprennent aujourd'hui aux hommes politiques.

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