Voilà pourquoi l’addiction à la Tech est un problème de santé publique <!-- --> | Atlantico.fr
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Une compétition en ligne organisée dans un salon dédié aux jeux vidéo.
Une compétition en ligne organisée dans un salon dédié aux jeux vidéo.
©BARTOSZ SIEDLIK / AFP

Nouvelles technologies

Privés de leurs smartphones ou de leurs écrans, les Français sont de plus en plus nombreux à ressentir des symptômes comme de l'anxiété ou du stress, témoins d’une véritable addiction aux nouvelles technologies.

Michael Stora

Michael Stora

Michael Stora est l'auteur de "Réseaux (a)sociaux ! Découvrez le côté obscur des algorithmes" (2021) aux éditions Larousse. 

Il est psychologue clinicien pour enfants et adolescents au CMP de Pantin. Il y dirige un atelier jeu vidéo dont il est le créateur et travaille actuellement sur un livre concernant les femmes et le virtuel.

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Il est important de comprendre qu'il y a environ un an et demi, l'OMS a officiellement reconnu l'addiction aux jeux vidéo en ligne comme une forme d'addiction virtuelle. En observant nos contemporains, nous pouvons constater des comportements addictifs, notamment en raison du nouveau modèle économique des géants de la tech, tels que les GAFAM, qui visent à capter notre attention le plus longtemps possible. Pour y parvenir, ces entreprises utilisent des stratégies pour nous faire passer plus de temps sur leurs plateformes, en exploitant les algorithmes pour nous proposer un contenu personnalisé qui nous procure de petites doses d'endorphines. Cependant, plus nous en recevons, plus nous en voulons, créant ainsi une forme d'hyper-connectivité addictive. Bien que l'addiction soit considérée comme une pathologie psychiatrique, elle peut également être une forme de lutte antidépressive pour certains individus qui ont du mal à se réguler. Il est donc important de prendre conscience des stratégies des entreprises pour éviter de tomber dans une dépendance numérique. 

En ce qui concerne l'addiction, il est important de considérer son impact sur la santé sociale. Lorsqu'une personne se coupe petit à petit de ses liens sociaux, notamment avec sa famille, son partenaire, son école, son travail, cela peut être considéré comme un signe avant-coureur d'un problème plus profond. Préférer la vie virtuelle à la vie réelle peut être un signe d'évitement de la réalité, en raison de la douleur qu'elle peut causer. Bien que nous ayons tous le droit d'avoir des moments d'évasion, le fait de se couper de ses relations sociales réelles peut être préoccupant. 

On peut dire qu'il y a eu une tendance à la digital détox, mais les méthodes proposées n'étaient pas toujours sérieuses. Certaines personnes ont même dû rejoindre des groupes de parole pour des comportements problématiques liés aux jeux vidéo en ligne, qui ont entraîné une rupture sociale. Les solutions traditionnelles, telles que les thérapies et les hospitalisations, ont souvent été inefficaces ou seulement temporaires. Cependant, il y a deux ans et demi, j'ai créé un programme appelé l'École des héros pour aider ces jeunes déconnectés du monde réel. Ce programme novateur utilise la création de jeux vidéo pour encourager des exigences cognitives créatives dans un environnement de groupe. Grâce à cette approche, nous avons obtenu un taux de réussite de 60 % pour les jeunes qui se sont engagés dans cette initiative. En résumé, il est nécessaire de développer de nouvelles méthodes pour aider les personnes souffrant d'addiction aux jeux vidéo en ligne. 

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Mon expérience personnelle montre que la situation est complexe. Pour lancer l'École des héros, j'ai obtenu un financement de l'État, grâce à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, qui dispose d'un bureau spécialisé sur les nouvelles addictions. Olivier Masson Aluni était responsable de ce bureau et il m'a permis de mener une expérimentation qui a été validée avec succès. Il est important de comprendre que les hospitalisations pour addiction coûtent très cher à l'État, même si elles ne concernent qu'une petite proportion des 35 millions de joueurs en France. L'addiction virtuelle est une pathologie en expansion, qui peut être liée à une difficulté à affronter la réalité, notamment dans une société de plus en plus compétitive. Le monde numérique offre une échappatoire sans recours à des substances artificielles. Cependant, la question de l'addiction aux jeux vidéo en ligne est encore controversée et peu abordée par l'État. Au Japon, où l'on parle de "dico Mori", ce phénomène est bien connu depuis longtemps et représente une réalité clinique. En pédopsychiatrie, de plus en plus de structures s'intéressent aux jeunes déscolarisés ou en situation de retrait social, et il serait intéressant que l'État s'implique davantage dans cette prise en charge. 

Conseiller les personnes souffrant d'addiction est complexe, car cette lutte est souvent associée à la dépression. Il est vrai qu'une étude récente montre que la France est l'un des champions en termes de dépression chez les jeunes de 20 ans. Mon conseil n'est pas de se déconnecter à tout prix, car cela n'est pas la solution. Selon moi, il est important de se reconnecter, mais je constate que lorsque nous allons bien dans notre vie réelle, nous avons moins besoin de nous réfugier dans le monde numérique. Souvent, une addiction est le signe d'un mal-être sous-jacent. Si la personne prend conscience qu'elle y passe trop de temps, c'est peut-être le moment de consulter un professionnel de l'écoute pour discuter de ses problèmes. N'hésitez pas à demander de l'aide à votre entourage ou à un professionnel.

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