Une seule liste RN aux municipales en Seine-Saint-Denis : c’est grave docteur ?

Atlantico : Les élections municipales approchent à grands pas et le Rassemblement National tient à confirmer son bon score des élections européennes au niveau local. Pourtant le mouvement peine à rassembler des candidats sérieux et doit retirer certaines de ses investitures comme à Montpellier ou à Villepinte en Seine-Saint-Denis. Ainsi, dans le département du nord-est de Paris le parti n’aura qu’une liste à présenter dans le département. Quelles sont les raisons d’un échec annoncé ? Christophe Bourseiller, Journaliste, historien, spécialiste des courants minoritaires 

Christophe Bourseiller : Il faut demeurer prudent quant à l’échec annoncé. Il est vrai que le Rassemblement national a perdu la moitié de ses adhérents en 2017. Il doit par ailleurs faire face à des difficultés financières. Sur le plan local, il ne dispose pas toujours de candidats suffisamment formés. Dès lors, il est souvent forcé de « parachuter » des seconds couteaux. Le RN dispose toutefois sur un plan municipal de plusieurs bastions : Hayange, Fréjus, Hénin Beaumont, Beaucaire. Il espère en outre conquérir une cinquantaine de villes, parmi lesquelles Perpignan, Denain, Vauvert ou encore Menton.

En ce qui concerne la Seine Saint-Denis, l’électorat musulman semble y être aujourd’hui majoritaire. Dès lors, le RN n’a nul intérêt à y guerroyer en pure perte. Cela dit, on sait que les élections municipales se jouent principalement sur des questions locales. La plupart des candidats ont d’ailleurs tendance à gommer sur leurs professions de foi leur appartenance politique. Ce qui manque au RN en Seine Saint Denis, c’est l’enracinement.

Le Rassemblement national a obtenu 15,89% aux européennes et s’est hissé à la deuxième place des élections. Pourquoi le parti n’arrive pas à capitaliser sur son bon score aux élections nationales ? 

Les élections européennes ne sont jamais un bon test, sans doute parce que l’abstention y est prédominante. À l’évidence, Marine Le Pen, au-delà des municipales et même des régionales qui vont suivre, se positionne dans la perspective de la présidentielle de 2022.

La Seine-Saint-Denis est un département à la démographie particulière, la défection des candidats RN est-elle le signe que ceux qui peuplent les villes sont bobos et progressistes ? 

Il y a surement des bobos et des représentants de la gauche de la gauche en Seine Saint Denis. Nous sommes dans l’ancienne « ceinture rouge » du PCF. Mais c’est le vote musulman qui est ici décisif. Il existe d’ailleurs en Seine-Saint-Denis depuis 2001 une Union des associations musulmanes de Seine-Saint-Denis (UAM 93), qui constitue une sorte de lobby politique. Lors des Européennes, Jordan Bardella a recueilli 16,27% des résultats globaux dans le département. C’est un score honorable, qui ne permet cependant pas d’assurer une majorité, d’autant que la marge d’alliances du RN est très restreinte.

Est-ce que un mouvement extrémiste comme le RN a un avenir dans le département ? 

D’abord, le RN n’est pas à proprement parler un mouvement extrémiste, mais plutôt un mouvement populiste.

Ensuite, il peut espérer capitaliser sur le vote des « petits blancs ». Cette capitalisation ne lui assurera pas de majorité locale mais pèsera au niveau des présidentielles.