(Sur)vivre à 50 degrés Celsius : existe-t-il des solutions techniques durables ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Un homme s'hydrate par une chaude journée à New Delhi, le 15 mai 2022.
Un homme s'hydrate par une chaude journée à New Delhi, le 15 mai 2022.
©SAJJAD HUSSAIN / AFP

Dôme de chaleur

Alors que les températures atteignent 50 degrés en Inde et au Pakistan, quelles sont les solutions à envisager pour s'adapter à de telles conditions climatiques au sein de nos sociétés ?

Thibault Laconde

Thibault Laconde

Thibault Laconde est ingénieur spécialiste des risques climat et fondateur de Callendar.

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Atlantico : Les températures avoisinent les 50 degrés Celsius en Inde et au Pakistan. Elles deviennent, à ce stade, mortelles. Est-il possible de développer des solutions techniques pour y faire face ?

Thibault Laconde : La réponse courte est non. Quand on atteint ces températures, on atteint les limites physiques de ce que le corps humain peut supporter en termes de combinaison température – humidité.  La limite extrême au-delà de laquelle on ne peut plus survivre dépend de la température et de l’humidité : C’est 35-40°C dans des environnement très humides, entre 40 et 45 °C à 50% d’humidité et au-delà de 50°C dans des environnements très secs. Si cette limite est dépassée, il n’y a pas vraiment de solution si ce n'est de trouver un endroit où il fait plus frais. La question de l’adaptation se pose surtout pour les températures moins extrêmes mais aussi plus fréquentes, car les risques liés à la température apparaissent bien avant. C’est surtout dans cette zone là que l’action et la recherche sont possibles. 

Au-dessous de ces seuils mortels, quelle adaptation est possible ?

Lorsque la vague de chaleur est là, l’adaptation n’est pas tant technique qu’organisationnelle et sociale. Par exemple, même pour des températures relativement basses, il y a des risques d’hyperthermie si vous êtes exposé au soleil ou pratiquez une activité physique. La prévention des risques passe donc par la suspension ou le report des activités qui nécessitent d’être en extérieur, donc par des systèmes d’alerte et l’organisation du travail. Aux Canada et aux Etats-Unis, l’année dernière on a aussi vu l’importance des capacités d’accueil avec des refuges climatisés. C’est donc plus des solutions organisationnelles que techniques. 

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Est-ce qu’on peut imaginer mettre des climatiseurs partout, serait-ce viable ?

Je pense que l’on devrait se poser sérieusement la question de l’usage de la climatisation. Aux Etats-Unis ou en Chine elle est la norme mais en Europe elle reste mal vue. Le risque c’est que la multiplication des canicules encourage les gens à s’équiper anarchiquement malgré tout. Nos modélisations montrent que l’impact sur la consommation électrique change beaucoup selon la qualité des climatiseurs ou l’isolation des bâtiments. Mais aussi de la manière dont on les utilise : parce que cet équipement est encore relativement nouveau, beaucoup de gens ne savent pas l’utiliser efficacement. Il vaudrait peut-être mieux accompagner les achats de climatisation pour faire les bons choix avant de subir une vague de chaleur qui précipite les clients vers des climatiseurs de mauvaise qualité et énergivores. 

On imagine moins des pays comme l’Inde mettre en place un dispositif de climatisation à échelle nationale. Comment faire dans ces conditions ?

Le problème ce n’est pas seulement l’équipement en climatisation mais aussi l’infrastructure nécessaire pour leur fonctionnement. Actuellement, il y a environ 30 millions de climatiseurs en Inde mais, en période de forte chaleur, cela suffit à représenter 10% de la consommation électrique du pays. Cette demande contribue aux  coupures d’électricité que l’on a vues ces dernières semaines. Même si la production est suffisante, la chaleur peut entraîner des incidents sur le réseau électrique et ce n’est pas simplement une problématique de pays moins développés :  en 2003, la canicule avait provoqué la coupure d’électricité de 240 000 foyers en Ile de France.

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Peut-on imaginer des solutions qui fonctionnent avec peu ou pas d’argent ? 

Dans la gestion des bâtiments et l’aménagement, il existe des solutions simples pour limiter les températures intérieures et prévenir les îlots de chaleur urbains : végétaliser, installer des ombrières, fermer les volets, peindre les toitures avec des couleurs claires... Une partie de la résolution du problème passe par des solutions low tech mais c’est un travail de long-terme.

Les universités et entreprises se sont-elles penchées sur le dossier ?

Oui, mais les solutions, pour la plupart, nous les connaissons. Le défi, c’est de transformer une ville française en une ville espagnole et une ville espagnole en une ville du Maghreb, capable de résister à des températures vivables mais plus élevées que celles pour lesquelles elles ont été conçues. Ce n’est pas facile car on parle de systèmes qui évoluent sur des décennies. 

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