Cocu 2.0
Surfer, c’est tromper ? Les conséquences juridiques de la décision de la Cour de cassation sur l’échangisme en ligne et les obligations du mariage
Un époux a obtenu le divorce aux torts exclusifs de son épouse, au motif que celle-ci s'était rendue sur des sites échangistes et avait échangé des mails à caractère explicite avec plusieurs hommes. Si de tels cas sont de plus en plus courants, la preuve, elle, reste toujours compliquée à rapporter.
Nicolas Graftieaux
Maître Nicolas Graftieaux est spécialiste en droit de la famille. Il a d’abord exercé son activité au sein d’une banque privée, pour ensuite intégrer le département famille/patrimoine d’un cabinet parisien et bénéficie à ce titre d’une approche pluridisciplinaire dans les domaines du droit de la famille, des successions, du patrimoine, de l’immobilier et des affaires. Il anime par ailleurs régulièrement colloques et formations auprès de ses confrères autour de ces thèmes.
Atlantico : La Cour de cassation a récemment fait savoir dans un arrêt que la seule recherche de relations sexuelles par l’intermédiaire de sites internet peut justifier que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs de celui ou celle qui s'y rend. Tant qu’il n’y a pas eu consommation de la part de l’un ou l’autre des conjoints, peut-on vraiment dire qu’il y a faute ? Pourquoi ?
Nicolas Graftieaux : Cette décision renvoie à une question fondatrice : qu'est ce qu'une faute dans le mariage ? Pour la société ? Pour chacun d'entre nous ? La loi a tenté de synthétiser cette ambivalence (appréciation sociale et personnelle) en combinant dans l'article 242 du Code civil la notion générale de "devoirs et obligations du mariage" et un critère plus personnel puisque le comportement dénoncé doit rendre "intolérable le maintien de la vie commune" du couple.
Peut-on parler, dans une certaine mesure, de procès d’intention ? Comment être certain que la personne mariée qui consulte un site échangiste poursuit réellement l’objectif de passer à l’acte ?
C'est exactement et au premier sens du terme un "procès de l'intention". Pour le mari, la simple existence de la démarche, concrétisée et prouvée par des échanges de mails, de photos etc., est suffisamment intolérable et fautive pour justifier le divorce. Au fond, peut importe qu'elle ne soit pas passée à l'acte. C'est la recherche en elle-même de ces relations qui est fautive.
Si le fait de se rendre sur un site échangiste rend "intolérable" le maintien de la vie commune, est-ce à dire qu’il faut légiférer sur ces sites internet ? Ne proposent-ils pas un service qui, par nature, va contre les obligations du mariage ?
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