Sur le gaz russe, Berlin n’a pas de solution à court terme, mais les écologistes vont le payer cher<!-- --> | Atlantico.fr
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Le chancelier allemand Olaf Scholz s'adresse aux journalistes avec le Premier ministre espagnol avant leur rencontre à la Chancellerie à Berlin, le 18 mars 2022.
Le chancelier allemand Olaf Scholz s'adresse aux journalistes avec le Premier ministre espagnol avant leur rencontre à la Chancellerie à Berlin, le 18 mars 2022.
©FILIP SINGER / POOL / AFP

Atlantico Business

La guerre en Ukraine va faire des victimes collatérales en Allemagne : Mme Merkel vilipendée, Berlin incapable de s’affranchir du gaz russe et le parti des Verts, qui aura du mal à se remettre de son erreur historique

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La presse allemande ne se prive pas, depuis quelques jours, de faire le procès des années Merkel. Y compris les grands journaux conservateurs qui soulignent que le nouveau chancelier a complètement renversé la table qui avait été dressée par Mme Merkel. 

Ce qui est reproché à Angela Merkel, c’est bien sûr son obsession de l’efficacité économique, c’est d’avoir refusé tout accroissement du budget de la défense ; et c’est bien sûr, aussi, d’avoir tissé des liens très étroits avec les Russes pour se trouver du gaz à bon prix. 

C’est donc pendant cette période que l’Allemagne s’est branchée sur le Nordstream 1, puis sur le Nordstream 2 pour sécuriser les approvisionnements et protéger la sacro-sainte compétitivité de son industrie.  Du coup, Mme Merkel avait accepté d’abandonner le programme nucléaire allemand et même de fermer définitivement les centrales, puis de se lancer dans un plan de développement des énergies renouvelables, et notamment les éoliennes. 

Tout cela, pourquoi ? Pour avoir la paix avec le parti des Verts. Les écologistes ont obtenu gain de cause et quand, en Europe, on leur rappelait parfois que les éoliennes ne fonctionnent pas tout le temps faute de vent, ils s’en moquaient et préparaient Nordstream 2 ou rallumaient les centrales au charbon. 

Pendant les années Merkel, rappelle la presse, l’Allemagne est devenue championne de compétitivité industrielle, mais aussi championne d’Europe de la pollution et aujourd’hui, obligée, pour pouvoir se chauffer et continuer de fonctionner, de pactiser avec le diable.

L‘Allemagne achète plus de la moitié de son énergie aux Russes. Alors pour se dédouaner, le Chancelier a promis aux Européens de s’affranchir de cette contrainte, mais ça ne va pas être facile. 

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L‘Europe du Sud pourra le faire assez vite. La France, l’Italie et l‘Espagne peuvent s’approvionner ailleurs et en plus, aucun de ces trois pays n’est fâché avec le nucléaire. Mieux, l’Italie et l’Espagne regardent avec beaucoup d’intérêt l’évolution amorcée par la France de relancer son programme nucléaire. 

En Allemagne, la classe politique a commencé à régler ses comptes avec l'épique Merkel. Mais dès que la classe politique aura déboulonné les statues de Mutti, elle se tournera sur les Verts allemands. Jadis triomphants et donneurs de leçon à l’Europe toute entière, les Verts allemands aujourd’hui se taisent. Et pour cause, les analystes les plus fins ne manquent pas d’expliquer qu‘ils ont tenu Merkel en otage. 

Lors du week-end dernier à Versailles, quand Emmanuel Macron a réuni tous les chefs d’Etat et de gouvernement pour leur demander d’accroitre les sanctions, la grande majorité en a conclu qu‘il leur fallait prendre leur distance avec le gaz russe et commencer par mettre une croix sur Nordstream 2, ce qu’ils ont fait très rapidement. 

Mais parallèlement à cela, le nouveau Chancelier allemand a dépêché son ministre de l'énergie, Robert Habeck, au Qatar pour engager des négociations et trouver du gaz. Il en a trouvé, mais pas avant dix ans. Les carnets de commande sont pleins. Les entreprises allemandes ont commencé, elles, à faire leur marché en Arabie saoudite et à Abou Dhabi. Les secteurs industriels qui peuvent se le permettre se sont rués sur les capacités de production d’hydrogène et d’ammoniac. Considérant déjà que l'hydrogène sera l‘alternative la plus efficace au gaz russe. 

Mais le ministre de l’énergie n’est pas au bout de ses peines parce que, le plus dur pour lui va être d’accepter l’importation de gaz américain qui, soit dit en passant, est du gaz de schiste particulièrement carboné et de l’électricité nucléaire en provenance de la France et de la Belgique. Quand on sait que le ministre de l’énergie est aussi l’un des leaders des Verts allemands, on imagine l’état dans lequel il se retrouve. 

L‘opinion publique en général, et les Verts en particulier, sont obligés d’admettre que la sécurité des approvisionnements de l’Allemagne, condition incontournable de son dynamisme économique, est très difficilement compatible avec les principes moraux qu’ils défendent et les objectifs qu'ils poursuivent dans la protection de l‘environnement. 

Interpellés, questionnés tous les jours par la presse allemande sur ce qu’ils vont faire, les Verts allemands ont choisi de se taire actuellement et de respecter leur contrat de gouvernement, même si la chancellerie a fait voler en éclat des pans entiers de ce contrat. 

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