Suicides des agriculteurs : "la pire des pressions c'est la honte de l’échec"<!-- --> | Atlantico.fr
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"Le monde agricole étant assez fier, les agriculteurs auront plutôt tendance à ne pas partager leurs souffrances."
"Le monde agricole étant assez fier, les agriculteurs auront plutôt tendance à ne pas partager leurs souffrances."
©Reuters

Dans la mouise

Avec près de 500 suicides entre 2007 et 2009, les agriculteurs seraient une des populations les plus exposées à ce danger. Problèmes financiers ou familiaux combinés à une pudeur propre à ce milieu peuvent pousser les plus fragiles à commettre l'irréparable.

David Lacrépinière

David Lacrépinière

Salarié au service de remplacement des jeunes agriculteurs de l'Ain, David Lacrépinière est également élu en tant que délégué départemental pour l’Ain et le Rhône à la Mutuelle sociale agricole (MSA). 

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Atlantico : Selon l’Institut national de veille sanitaire, près de 500 suicides d’agriculteurs ont été recensés entre 2007 et 2009. Un chiffre qui en fait la troisième cause de décès dans la profession. Comment le mal-être des agriculteurs se manifeste-t-il sur le terrain ? Comment identifier les agriculteurs en souffrance ?

David Lacrépinière : Il semblerait que les suicides augmentent à chaque fois qu'une filière connaît une crise. Les problèmes financiers des agriculteurs seraient donc une des causes du suicide. A cela s’ajoutent également les crises familiales qui peuvent découler de ces situations économiques difficiles.

Certains agriculteurs vont faire part de leur mal-être de manière très directe. Ils peuvent le dire : "J’en ai marre, je vais me pendre". Il ne faut jamais le prendre à la légère. Mais le monde agricole étant assez fier, les agriculteurs auront plutôt tendance à ne pas partager leurs souffrances. Ils ont cette peur du qu’en dira-t-on. Alors il faut être attentif aux signes qui peuvent témoigner d’un malaise afin de pouvoir alerter un psychologue. Par exemple, lorsqu’un vétérinaire ou un autre collaborateur se rend compte que l’agriculteur n’a plus le goût du travail, qu’il ne fait plus traite de ses vaches à heures régulières, etc.  

Si beaucoup d’agriculteurs de l’ancienne génération sont pudiques sur ces questions, les jeunes ont tendance à se confier plus facilement.

Le mal-être des agriculteurs est-il un phénomène nouveau ?

Le suicide en agriculture a toujours existé mais le phénomène s’est accentué. Les agriculteurs sont las de travailler 10 à 12 heures par jour et ne pas s’en sortir. Le mal-être a toujours existé mais ce n’est qu’à partir du début des années 2000, lorsque Bruno Le Maire était au ministère de l’Agriculture, que nous avons assisté à une réelle prise de conscience.

Quelles sont les pressions propres à cette profession ?

Ils sont beaucoup plus stressés psychologiquement. Une exploitation agricole c’est une entreprise, avec son lot de tâches de gestion qui s’ajoutent à l’activité propre de l’agriculteurs.  

Autre phénomène propre au monde agricole, c’est la honte liée à l’échec. Si une exploitation disparaît, l’agriculteur le vivra comme une honte, ce qui n’est pas forcément le cas chez les artisans.

Quelles sont les pistes pour prévenir les suicide des agriculteurs ?

Il faut en parler. Beaucoup, beaucoup, beaucoup. Il faut aller au devant du problème. Dans le Rhône et l’Ain, nous avons mis en place une cellule avec un accueil téléphonique pour que les agriculteurs puissent être entendus. Sur le terrain, nous organisons des réunions avec les agriculteurs et toutes les personnes qui gravitent autour d’une exploitation agricole avec des psychologues dans le but pouvoir identifier les agriculteurs qui vont mal.

Nous identifions également les exploitations qui connaissent des difficultés financières afin de mieux les suivre. 

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