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Si vous êtes en train de planifier les activités de vos enfants pour cet été, voilà une erreur commune à ne pas commettre
©ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

Grandes vacances

Mettre ses enfants dans des cours très spécialisés pendant les congés ne participe pas à leur épanouissement et à leur réussite.

Florence  Millot

Florence Millot

Psychologue pour enfants.

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Atlantico : A l'approche des grandes vacances, de nombreux parents (en particulier aux Etats-Unis) décident d'inscrire leurs enfants à des camps d'été où ils étudient de façon intensive les mathématiques, l'informatique ou le sport. Devant l'exigence de réussite et la concurrence croissante entre les enfants, les parents paniquent et optent souvent pour une spécialisation accrue dans certains domaines. Orienter très tôt son enfant vers une activité particulière (sport, musique etc.) constitue-t-il une stratégie d'éducation judicieuse et équilibrée ?

Florence Millot : En général, quand l'enfant a une compétence particulière, c'est plutôt l'inverse qui se passe : c'est l'enfant lui-même qui demande à son parent d'en faire plus ou va de lui-même chercher à se renseigner (en musique, informatique etc.) Généralement, il n'y a pas que le parent stimule une motivation parce qu'elle est déjà là. Cependant, certains enfants n'aiment pas la compétition ou n'aiment pas faire toujours la même chose, mais dans la catégorie des enfants performants dans leur domaine extrascolaire, c'est plutôt l'enfant qui demande à son parent de faire son activité. Dans ce cas, le parent n'est là que pour guider l'enfant : c'est donc bénéfique.

En revanche, quand c'est le parent qui décide que son enfant fasse telle activité parce qu'elle a de l'avenir, cela a moins de sens pour l'enfant parce que ce n'est pas son désir. Certains enfants sont mêmes sensibles à la concurrence que leurs parents font peser (volonté de réussite pour son enfant), qu'elle soit consciente ou non. Dans ce cas, c'est le parent qui détermine l'avenir de l'enfant, et l'enfant ne se sent jamais à la hauteur de ses parents. Dans les familles, la réussite d'un enfant peut créer de la jalousie entre les frères et sœurs : quand un enfant est déjà compétent et qu'on mise tout sur lui, tous les autres enfants n'ont pas le droit au même traitement.

Cette compétition entre les enfants et les stratégies d'investissement des parents dans l'avenir de leurs enfants sont-elles une tendance nouvelle ?

Le système scolaire français a changé. Aujourd'hui, dès la maternelle, on pense aux meilleures écoles, on veut que l'enfant fasse le primaire, le collège, le lycée. Avant, il s'agissait juste d'aller jusqu'au baccalauréat. Dans une école à deux vitesses avec le public qui a été beaucoup décrié et maintenant la survalorisation du privé, qui a tendance a avoir les pleins pouvoirs (dès que l'enfant ne va pas bien, on menace de le virer dès le début). Les enfants sont notés dans leur comportement, avec des feux rouges ou verts : chaque jour, dès la fin de la maternelle, l'enfant est jugé sur son comportement et subit une énorme pression qui fait que les écoles privées ont les pleins pouvoirs. Comme les parents les veulent absolument, certaines écoles se permettent de ne pas être forcément à l'écoute de l'enfant et parlent aux jeunes enfants comme à des adolescents. Cela joue donc sur l'inquiétude des parents parce qu'avant, on mettait son enfant à l'école et cette dernière se chargeait de guider l'enfant. Maintenant, on donne des cours après l'école, les parents se substituent aux instituteurs et on lui impose des stages : l'enfant a l'école deux fois, parce que les parents veulent trop maitriser l'éducation de leurs enfants. L'école a pris une importance inédite dans la mesure où on parle du chômage et de la réalité du travail aux enfants dès leur plus jeune âge.

Aujourd'hui, les enfants ont accès aux mêmes médias que les adultes et sont donc au courant de l'actualité (attentats, terrorisme, chômage etc.) Même si les parents ne leur en parlent pas, ils en parlent entre eux à l'école et se fixent des challenges entre amis à l'école, médiatisés sur les réseaux sociaux etc. Les parents n'ont même plus de pouvoir là-dessus.

Quels sont les dangers de cette tendance à l'utilitarisme dans l'éducation des enfants (dans le cadre familial comme dans le cadre scolaire) ?

Il n'y a pas forcément une tendance à l'hyperspécialisation parce qu'aujourd'hui la nouvelle génération aura sept travails différents. Il faut s'ouvrir à des spécialités différentes et non se surspécialiser dans une : il faut savoir toucher à tout pour gérer son entreprise, être capable de changer de pays ou de métier. La surspécialisation trop tôt n'a pas de sens parce que les métiers de demain sont encore à inventer. Un enfant change rapidement de goût et cela a du sens puisque le but de l'enfance est d'explorer toutes ses facettes. Il ne faut donc pas qu'il se spécialise d'emblée parce qu'il manque des expériences qui seront plus dures à faire plus tard.

Sauf si cela vient de lui, la surspécialisation n'est pas souhaitable. Chez environ 20% des enfants, on remarque dès le primaire qu'ils savent déjà ce qu'ils souhaitent faire : ce n'est plus un métier mais une vocation. C'est différent puisqu'on peut leur donner des moyens de faire des stages ou de se spécialiser, mais à leur niveau. On parle maintenant du "burn-out" des enfants : en réalité, les enfants sont épuisés de devoir être présents sur plusieurs terrains, plusieurs activités etc. Grâce à internet, de nombreux champs de compétence sont apparus : c'est la confiance en lui qui compte, puisque du moment qu'on a l'envie d'apprendre on l'aura toujours pour tout.

Aujourd'hui, en France, on n'est plus dans l'ère de la compétence parce qu'on peut se former à tous les âges et partout, mais plutôt dans celle du savoir-être parce que les enfants sont de plus en plus concernés par des questions importantes. Le challenge de cette génération est émotionnel : les enfants sont de plus en plus éveillés, et il faut donc savoir encadrer cet intérêt.

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