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RSI : la mission d'étude décidée par le gouvernement ne suffira pas à rendre bon l'objectif de son adossement au régime général de la sécurité sociale
©Reuters / Charles Platiau

RSI

Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, entend adosser "très progressivement" le régime social des indépendants au régime général de la sécurité sociale.

Jean-Philippe Delsol

Jean-Philippe Delsol

Jean-Philippe Delsol est avocat, essayiste et président de l’IREF, l'Institut de Recherches Economiques et Fiscale. Il est l'auteur de Civilisation et libre arbitre, (Desclée de Brouwer, 2022).

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Atlantico : Concrètement, qu'est-ce que cette mesure implique pour les travailleurs indépendants ?

Jean-Philippe Delsol : Théoriquement, pas grand-chose. Cette mesure implique qu'ils s'adresseront à un nouveau bureau de la sécurité sociale plutôt qu'au RSI. Ceci dit, sur le fond, est-ce que ça changera quelque chose ? En réalité, le RSI est déjà géré très largement par des organismes dépendants de la sécurité sociale. C'est d'ailleurs l'ACOSS qui s'occupe de gérer les recouvrements des cotisations au RSI. Donc ça ne changera pas grand-chose. 

Le RSI ne fonctionne pas. Il a regroupé en 2006 différentes caisses de différentes  professions indépendantes. On a voulu en faire une grande caisse pour s'occuper de tous les indépendants. Manuel Valls a dit que le RSI était une catastrophe nationale, et il avait raison. Est-ce que le fait de regrouper encore un peu plus ces caisses va résoudre les problèmes ? Je ne pense pas. On a échoué parce qu'on arrivait pas à gérer quelque chose qui était trop gros, trop compliqué. Alors ce n'est pas en regroupant ces caisses qu'on va mieux arriver.

Quel est le risque d'une telle mesure ?

Le risque est encore un peu plus de confusion. Etant avocat, je suis moi-même adhérent au RSI. C'est effectivement, depuis des années, une caisse qui ne répond pas aux besoins des indépendants. On ne sait pas les joindre au téléphone. Quand on arrive à les avoir, ils ne s'occupent pas de nos problèmes. Et quand ils s'en occupent, ils s'en occupent mal. Est-ce que ça va changer? Peut-être. Est-ce pour autant mieux de centraliser encore un peu plus? Je ne le crois pas. Les difficultés du RSI sont une opportunité remarquable pour tenter autre chose. La gestion de la sécurité sociale, qui est plus onéreuse en général que le sont les assurances sociales à l'étranger, est un point qui devrait nous inciter à ouvrir à la concurrence, et surtout avec les indépendants. Par définition, les indépendants savent gérer leurs propres affaires. Ils s'assurent pour leurs locaux, leurs automobiles. Ils savent ce que c'est que de choisir leurs assurances. Alors pourquoi ne pas leur laisser le choix de leur assurance sociale? Pourquoi ne pas tenter cette expérience de l'ouverture des assurances sociales à la concurrence? Je suis convaincu qu'on trouverait un moyen de réduire les coûts des assurances. Regardez ce qu'il se passe pour les assurances automobiles ; ça marche remarquablement bien. C'est encadré par la loi. Mais chacun d'entre nous arrive à s'assurer librement auprès de la compagnie ou du constructeur de son choix. On peut choisir un contrat à minima, au tiers, ou tout risque. Cela pourrait être la même chose pour les indépendants.  Il y a une petite difficulté qui est la suivante : aujourd'hui, les régimes de sécurité sociale à la Française, dont le RSI, gère à la fois le risque et l'assurance, et une partie solidarité. C’est-à-dire que nos assurances sociales nous font payer pour couvrir ceux qui n'en ont pas les moyens. Mais couvrir ces derniers relèverait plutôt de l'impôt et de la solidarité nationale. Il faudrait dissocier cette solidarité – qui pourrait continuer à être gérer par le RSI ou la sécurité sociale – de ce qui relève de l'assurance qui pourrait être gérer par des mutuelles ou des assurances. Ce qui ne veut pas dire qu'il faut forcément interdire le RSI aux indépendants. Mais qu'ils aient le choix, et les meilleurs gagneront.

A sa création le RSI comptait 6,6 millions d'assurés et subissait de nombreux dysfonctionnements (erreurs de calculs, retards...) Quels sont les pièges que le gouvernement devra éviter pour faire une réforme qui tienne réellement la route ?

Quand vous dites 6,6 millions d'assurés, cela compte également les familles de ces derniers. Sinon, le nombre tourne plutôt autour de 2,4 millions d'assurés. Ce qui es très important. Le piège est celui de la centralisation. C'est le piège de la course en avant. Au fond, je suis un peu inquiet de la tournure de ce gouvernement qui, pour régler un certain nombre de problèmes, veut créer des comités, une assemblée. Ce n'est pas comme ça qu'on va résoudre les problèmes. Dire que la sécurité sociale va s'occuper du RSI qui ne marche pas, je pense que ça risque surtout d'augmenter les coûts de gestion des deux organismes. C'est pour ça que je pense à des alternatives : la privatisation et la concurrence pour ceux qui le souhaitent. Et je pense que, parce qu'on est en France et qu'il ne faut pas brutaliser les gens, laisser le choix d'aller soit à la sécurité sociale, soit à des compagnies d'assurances. La concurrence améliorera peut-être même la sécurité sociale et le RSI qui, en concurrence, bénéficieront d'une vérité des prix qu'on n'a pas actuellement.

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