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Revers de fortune ! Pourquoi les Démocrates sont désormais inquiets, même très inquiets !
©Reuters

Trans-amérique Express

Retournement de situation spectaculaire aux Etats-Unis. En quelques semaines l’atmosphère de la campagne présidentielle américaine a changé du tout au tout. Le parti républicain, qu’on disait au bord de l’explosion, affiche une sérénité retrouvée. Au contraire, les Démocrates, hier confiants dans leur victoire annoncée, se déchirent. Le parti serait même au bord de la rupture…

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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Voici un an Hillary Clinton était archi-favorite pour remporter la nomination démocrate et entrer, dans la foulée,à la Maison Blanche et dans l’histoire. Donald Trump n’était lui qu’un "trublion" dont la candidature prêtait à rire (son entrée en lice date du 16 juin 2015, mais les spéculations allaient bon train bien avant), ou à désespérer de la politique américaine. Pour les média, surtout en France, elle servait à décrédibiliser l’ensemble des candidats républicains qui, décidément, n’étaient pas à la hauteur de l’inévitable Hillary !

A l’automne de cet hiver Trump a cessé de faire rire. Son succès a plutôt fait peur. Le séisme engendré par sa popularité, aussi durable qu’inattendue, a fait trembler les colonnes du temple républicain. Celui-ci était prêt de s’effondrer disait-on… Il fallait au parti un autre champion, Trump, le vulgaire, n’était pas digne de porter ses couleurs… Aujourd'hui, Donald Trump est assuré de la nomination républicaine. Il dispose désormais d’un nombre de délégués suffisant pour être désigné par le parti lors de la convention de Cleveland, qui se tiendra  du 18 au 21 juillet.Mais personne ne parle plus d’une tierce candidature. Trump travaille avec les Républicains du Congrès, dont le premier d’entre eux, le "speaker" Paul Ryan, pour préparer la campagne générale, et avec le président du Republican National Committee, Reince Priebus, pour garantir le bon ordonné des débats lors des quatre jours de la convention.

Hillary Clinton, au contraire, continue de batailler pour atteindre le seuil décisif. Loin de faire l’unanimité de son parti, elle peine à convaincre une majorité de démocrates. Loin de se projeter vers novembre et l’élection générale, elle se démène pour répondre aux attaques d’un Bernie Sanders qui refuse de s’avouer vaincu. Le sénateur du Vermont, d’abord apprécié comme un challenger de choix, à la fois valeureux et inoffensif, car la radicalité de ses positions rendait sa victoire finale très improbable, est devenu une épine dans le pied d’Hillary et du parti démocrate, qui lui est entièrement dévoué. Sanders et ses supporteurs sèment désormais la discorde sur leur passage. Ils menacent carrément l’unité du parti et le bon déroulement de la convention de Philadelphie fin juillet.

Tout a commencé le 14 mai lors de la convention démocrate du Nevada. Il s’agissait d’attribuer les délégués à chacun des candidats à la suite du "caucus" tenu plus tôt dans l’année. C’est une des particularités du système des primaires aux Etats-Unis. Le caucus remontait au 20 février. C’était, pour les démocrates, la troisième confrontation de la campagne. Elle avait été remportée de justesse par Hillary Clinton, avec 52% des voix contre 48% à Bernie Sanders. Mais l’attribution effective des délégués ne se ferait que plusieurs mois plus tard, lors d’une convention d’Etat. Celle-ci s’est tenue le 14 mai. Entre temps, Bernie Sanders avait crié victoire dans le plus important conté de l’Etat et comptait bien que ses délégués se fassent entendre  pour renverser le résultat du 20 février en sa faveur. Le problème est que ses délégués se sont vus refuser le droit de siéger. S’en suivit une profusion  de noms d’oiseaux à l’égard des représentants du parti, une bousculade, des bris de chaises et pour finir une convention écourtée et l’intervention de la police. Les images du désordre ont fait le tour d’Internet, ainsi que les menaces de mort proférées par certains supporteurs de Bernie Sanders (ou se faisant passer pour tel… ?) à l’endroit de Roberta Lange, la présidente du parti démocrate du Nevada…

La hiérarchie nationale du parti a évidemment réagi aux incidents. Debbie Wasserman Schultz, la présidente du DNC, le comité national démocrate, a sommé Sanders de condamner  les violences, et lui a demandé de faire le ménage au sein de ses troupes afin que ses supporteurs retrouvent leur calme et respectent les procédures...

Mais loin de suivre ces injonctions Sanders a renchéri en dénonçant un système "truqué" où les dés sont pipés, où ses supporteurs sont écartés, et réduits au silence. Au nom de ses millions d’électeurs il a demandé un "minimum de respect" de la part des pontes du parti ! Bref le scénario que les Républicains craignaient de la part de Donald Trump et ses supporteurs est en train de devenir réalité, mais au sein du parti démocrate de la part de Bernie Sanders et de ses révolutionnaires en herbe.

Sanders a d’ailleurs annoncé que la convention de juillet pourrait s’avérer "messy". En clair,il annonce du grabuge. La dernière fois que c’est arrivé, c’était en 1968. La convention se déroulait alors à Chicago. Les temps étaient mouvementés. Le pays s’enfonçait dans la guerre du Vietnam et affrontait à la fois la révolte de la jeunesse blanche, tournée vers la révolution sociale et sexuelle, et le soulèvement de sa minorité noire qui délaissait la non-violence de Martin Luther King pour les émeutes et la lutte armée. Robert Kennedy, candidat à la nomination démocrate, fut assassinée en pleine campagne des primaires, alors qu’il venait de remporter le scrutin de Californie… Cette année- là, la Convention démocrate fut entachée par des manifestations de rue, des brutalités policières et  une foire d’empoigne entre délégués… Le tout débouchant sur une défaite du candidat démocrate, Hubert Humphrey, face au Républicain Richard Nixon en novembre. Un bien mauvais souvenir pour le parti de l’âne.

Du coup les dirigeants s’inquiètent du "risque Sanders". Pour éviter que la mésaventure de 1968 ne se reproduise en 2016 – compte tenu de la colère évidente d’une partie de l’électorat – certaines voix se sont élevées pour demander la démission de Mme Wasserman Schultz, jugée trop ouvertement partiale envers Hillary Clinton. Il faut dire qu’en 2008, la même Wasserman Schultz, par ailleurs représentante de Floride, était co-présidente de la première campagne présidentielle  d’Hillary…

Bref le cocktail démocrate est en train de tourner au vinaigre. Et comme si cela ne suffisait pas, l’ancienne première dame vient de se voir rappelée à l’ordre pour son utilisation d’un compte email privé alors qu’elle était secrétaire d’Etat. Un rapport interne du Département d’Etat indique qu’Hillary Clinton a contrevenu aux règles par ses agissements, qu’elle a agi sans autorisation, ni même une demande d’autorisation et,eût-elle fait une telle demande, celle-ci aurait été rejetée… La question de son utilisation d’un compte privé et de l’installation d’un serveur privé à son domicile fait désormais l’objet de deux enquêtes, l’une menée par le FBI, l’autre par le Congrès. Des enquêtes qui vont se poursuivre dans les semaines et mois à venir et qui vont inévitablement peser sur sa campagne. Les Républicains, en profitent bien sûr, certains allant jusqu'à demander sa mise en examen !

En attendant la "trumpmania" prend un peu plus d’ampleur chaque jour. Le candidat républicain suscite une fascination et un intérêt qui dépassent de loin le cadre  politique. Trump est en train de devenir un "icone" de "l'infotainment" (mélange d’information et de spectacle typique du traitement de l’actualité par les chaînes de télévision). Certes il faut plus que le statut d’icone  pour mériter d’être président des Etats-Unis et bien plus qu’un fan club pour espérer le devenir. Mais c’est exactement ce que disaient les experts, voici un an, persuadés que Donald Trump serait une simple distraction estivale… 

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