Radioscopie du naufrage de l’hôpital public post Covid<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Des membres du personnel soignant dans un hôpital lors de la pandémie de Covid-19.
Des membres du personnel soignant dans un hôpital lors de la pandémie de Covid-19.
©MARTIN BUREAU / AFP

Malaise hospitalier

On a appris cette semaine que, face à la pénurie d’urgentistes, des bénévoles seraient désormais pour partie en charge de l’accueil des patients au CHR de Bordeaux. Comment expliquer un tel état de l’hôpital public alors que les moyens qui y sont alloués en France n’ont cessé d’augmenter et dépassent la moyenne des pays de l’OCDE.

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze est chirurgien à Perpignan.

Passionné par les avancées extraordinaires de sa spécialité depuis un demi siècle, il est resté très attentif aux conditions d'exercice et à l'évolution du système qui conditionnent la qualité des soins.

Voir la bio »

Les dysfonctionnements de l’hôpital public continuent à déclencher des déclarations et des propositions alors que des facteurs supplémentaires vont singulièrement compliquer la tâche des administrateurs d' hôpitaux. Dans un premier article nous avons réfuté l’hypothèse selon laquelle l’hôpital public irait de crise en crise de plus en plus rapprochées. Dans une deuxième analyse nous avons apporté les preuves que l’hôpital public est doté de moyens financiers au moins égaux voire supérieurs à la moyenne des hôpitaux publics européens, et singulièrement dans l’UE, pays dotés de la même monnaie.

LES FACTEURS D'AGGRAVATION DE LA SITUATION APRES LA PANDEMIE DE LA COVID-19

Absence de réorganisation systémique de la santé publique

Le premier facteur et non des moindres est l’absence de réorganisation du système de soins en cas d’urgence de santé publique. Disons le franchement, si une nouvelle pandémie survient nous serons à peu près dans la même position qu’en Janvier 2020. Le système de santé publique n’a pas été transformé. La seule création prévue celle des brigades sanitaires n’a même pas connu le début d’un commencement. Le ministère, Santé Publique France et les ARS qui ont massivement échoué jusqu’au 12 juillet 2021 sont toujours là avec les mêmes missions avec les mêmes outils et en ayant écarté soigneusement les régions c’est à dire toute subsidiarité. Je ne sous estime pas les difficultés qu’un tel projet soulève mais reconnaissons que les régions sont très loin d’être semblables. C’est pourquoi il est illusoire dans l’urgence de confier à des ARS la mise en œuvre des mesures au contact des populations. Il faut un grand savoir-faire pour aider les populations précaires du 93 à s’isoler quand la pandémie décime les séniors qui vivent au milieu de leur famille. Par ailleurs l’exécutif régional bénéficie d’un continuum administratif jusqu’aux mairies qui est un outil puissant de déploiement des politiques de santé publiques. Il peut aussi constituer les équipes mobiles de santé publique (appelées brigades sanitaires) avec différents acteurs de la société civile. Le résultat de cette prise en charge optimisée est de décharger suffisamment l’hôpital et de lui permettre de se focaliser sur sa mission, celle des cas graves.

À Lire Aussi

Covid-19 : ces traitements pour personnes à risque qui nous permettraient de limiter drastiquement la mortalité si on les déployait enfin

Les urgences, les urgentistes et la nécessité d’une innovation organisationnelle puissante

Le processus d’admission aux urgences est déficient. Pendant la Covid-19 les questions d’affluence ont été tempérées par la crainte de se contaminer en venant attendre un soin aux urgences. Bien évidemment ceux qui ont fait ce choix ont bien évalué que le risque ne valait le service qu’il pouvait différer et/ou obtenir ailleurs. Depuis la fin de la phase pandémique les comportements anciens sont revenus au galop. Il faut donc effectuer un filtrage avant que les personnes ne se rendent aux urgences. 77% des Français ont un smartphone. 94% d'entre eux l'utilisent quotidiennement. Il est possible que des infirmières cliniciennes évaluent précisément l’état du patient qui compte se déplacer aux urgences et que des solutions alternatives soient trouvées puisque environ 80 % des patients ne relèvent pas de ce service. L’accueil sera ainsi préparé et le patient qui le nécessite est convoqué à une heure fixe avec un box ou un lit disponible. C’est aussi utile pour les urgences pédiatriques qu’adultes. Le nombre de passages diminuera mais cette manne aurait dû être régulée par le payeur qui accepte de rembourser des soins qui ne sont pas urgents dans le cadre de l’urgence.


La grande résignation/démission

Les fonctionnaires du front office quels que soient leur administration, leur rattachement sont fortement impactéspar la grande résignation. Médecins, infirmières, aides soignantes, pompiers, policiers, enseignants, sont partout moins nombreux à vouloir faire carrière dans la fonction publique en première ligne. Ce n’est pas une crise des vocations.Le mot crise est un mot valise qui sous-entend que c’est le contexte en l'occurrence l’économie de marché qui créerait ces situations. Non, c’est un évitement pour les primo-entrants ou une résignation pour certains de ceux qui y sont déjà. Rappelons que ces emplois requièrent une formation longue et que cela fait une bonne décennie que la pénurie de soignants est une réalité en France. Pourquoi? Essentiellement parce que tout métier a une attractivité liée aux conditions d’exercice. Or elles se sont détériorées sans que des solutions améliorant cette attractivité soient apportées. Il s’agit bien sûr des salaires nets mais c’est loin d’être suffisant. La SMICardisation a aussi fait son œuvre sous l’étendard de l’égalitarisme. L’absence de formation continue, la négligence vis à vis des conditions difficiles du travail de nuit ont poussé les soignants vers la sortie.

À Lire Aussi

L’hôpital public français, mal doté ? Radioscopie d’un… mythe

Enfin, il y a la conjoncture française, les vacances d’été. Depuis des décennies la question des pénuries de soignants (je rappelle que les soignants travaillent 24h/24h toute l’année) revient plus fort chaque été. Une perte de productivité énorme puisque, par exemple,les blocs opératoires ferment plus tôt avec un nombre de salles réduites.

Cette situation ne concerne pas les non soignants (métiers techniques, administration, services non médicaux). Si bien que l’écart est devenu trop grand du point de vue de la charge de travail et de responsabilité par rapport à la différence de salaire.

Le coût de l’emprunt se renchérit et impacte les finances hospitalières

On se souvient des emprunts toxiques des hôpitaux. Cette double question du financement des déficits et des investissements est liée au statut d’administration publique. Une entreprise publique doit redresser sa gestion. Il n’en est pas de même pour une administration. 13 milliards de dettes ont été payées par l'État. Il reste 20 milliards et le gouvernement ne communique pas sur l’état actuel des réformes entreprises et des résultats obtenus pour résorber cette dette qui concernerait environ 300 hopitaux sur les 1100 au total.

Les hôpitaux empruntent bien au-dessus du taux de base. L’OAT à dix ans est autour de 1,5%. Il est donc probable que des mesures complémentaires puissent devenir nécessaires si rien ne change dans le mode de fonctionnement de l’hôpital.

C’est aussi important pour l’investissement dont dépend la qualité des soins. Il faut avoir un budget d’investissement important pour suivre le progrès en imagerie, en biologie ou bien dans les disciplines interventionnelles. C’est impossible si les salaires de l’ensemble du personnel représentent plus de 60% du chiffre d'affaires.

À Lire Aussi

Covid 19 : petit état des lieux de la pandémie après le variant BA.2

La dé-globalisation a un coût élevé

L’État ne peut pas créer des entreprises.

Une fois les entreprises productrices de biens et services médicaux parties du territoire national pour des raisons essentiellement de coût de la production il se produit une perte très difficile à reconstituer. Perte de capital, perte des savoirs faire et surtout dislocation des filières entre la recherche et l’innovation. Pour les pays avec peu d’entreprises de biotechnologie de taille importante, reconstituer une filière est coûteux. Il faut consommer du capital venant des banques ou de la dette. C’est un processus de choix successifs qu’il est facile de stimuler au niveau des startups mais beaucoup plus long pour les entreprises de plus grande taille.

Dans ce secteur l’innovation joue un rôle considérable et innovation ne veut pas dire recherche.

Dans la recherche le rôle du tissu universitaire est fondamental. Dans l’innovation une réelle compétition est nécessaire et donc une autonomie totale des universités publiques. Dans le contexte actuel un certain nombre d’universités n’ont pas la taille critique pour produire de la recherche-développement qui déboucheraitsur des innovations. Elles consomment par contre des ressources précieuses. D’autres obstacles persistent en France et il faut étape par étape les supprimer pour que les collaborations soient productives.

IL Y A DES SOLUTIONS

Changer réellement car impossible de répondre aux besoins du pays sans changement

C’est le contraire du « en même temps ». Il faut changer le fonctionnement du système de soins pour créer les incitations à satisfaire les besoins de la population. Actuellement le système de soins, en particulier le système de soins public est tourné vers lui même, vers sa propre survie à emplois et rémunérations constants et ce depuis des années. C’est l'État qui l’a mis dans ce corner. Le bilan depuis la réforme Juppé est accablant: hyper-réglementation avec plus de 35000 règlements, contraintes d’une administration publique, statuts des personnels, 35 heures, retraites précoces, tutelles des ARS, immobilisme suicidaire des différents syndicats de personnels et irresponsabilité financière des directions. Les discours n’y font rien comme celui de Bordeaux de Nicolas Sarkozy à propos de cette responsabilité financière des établissements.


Nous vivons sur un mensonge.

La combinaison des 35 heures, de la retraite précoce et de la grande démission constitue une menace sérieuse sur les ressources humaines disponibles pour les hôpitaux publics. Alors l’affichage des convictions de gauche, c'est-à -dire le refus de remettre en question des décisions antérieures inadaptées s’accompagne d’un comportement inverse au quotidien. Principe de réalité. Les administrations et les cadres ont en général un carnet de téléphones précieux. Celui des jeunes retraités qui viennent à la rescousse pour assurer la continuité du service. On rappelle les retraités, ils sont contents, l’administration est soulagée qu’ils soient opérationnels tout de suite. Donc cette retraite précoce est contournée. Comme d’autres “réformes” insoutenables à l’hôpital. Et in fine on ferme des lits. Les hurlements de ceux qui demandent des embauches tombent à plat: il n'y a pas de candidats.

Il en a été de même pour les médecins. Depuis la stratégie du numerus clausus censée “réduire les dépenses de santé” les hôpitaux publics ont recruté des candidats européens et extra-européens qui ont été nommés à la place d’étudiants Français collés à 13-14/20 ou même plus de moyenne. Mais voilà, les candidats européens se tarissent et certains de ceux qui sont venus repartent chez eux. Dans plusieurs pays d’Europe les conditions de travail des médecins sont sensiblement meilleures. Pour les candidats extra-européens la situation est plus complexe mais dans certains pays extra-européens aussi les conditions économiques des médecins sont plus favorables ce qui explique des départs ou un nombre moindre de candidats. Si bien que la pénurie est là.

Les infirmières n’échappent pas à cette problématique d’un marché européen extrêmement concurrentiel pour des professions qui nécessitent une grande motivation et donc une rémunération adaptée. Dans les régions frontalières, c'est particulièrement marqué.

Dans l’évaluation de ces phénomènes il faut toujours rappeler que depuis des décennies le marché des emplois infirmiers est très tendu. Si bien que des départs ou des arrêts d’activité ont un effet disproportionné par rapport au nombre de personnes concernées.


Industrie biotechnologique et du médicament

Dans ce secteur il faut un bing bang réglementaire et fiscal car les autres solutions sont soit des illusions soit des solutions trop lentes à produire des résultats. Les autres pays agissent très fort dans ce domaine depuis le début de la pandémie. Deux pays ont joué un rôle important dans ces secteurs pendant la pandémie, les USA avec le BARDA (Biomedical Advanced Research and Development Authority) et l’Operation Warp Speed et le Royaume Uni, avec le consortium autour d’Oxford et les essais cliniques des médicaments de la Covid-19. Beaucoup de pays ont étudié les organisations en question pour comprendre leur mode de financement et de fonctionnement. Il est tragique que ce secteur soit sinistré et que nous ayons été incapables de coordonner des études cliniques de grande taille.

Du monopole de l’assurance maladie à l’économie sociale de marché

Chacun a compris qu’E. Macron a placé ses réformes sociales sous une orientation étatiste et une inspiration de gauche. C’est l’occasion de le prouver. Le centralisme et les monopoles ne sont pas adaptés à une société où l’innovation et l’investissement productif sont les clés des dysfonctionnements. Il est possible de créer des conditions de marché depuis l’assurance maladie jusqu’à la gestion des hôpitaux qui favorisent l’adaptation aux difficultés actuelles pour satisfaire les besoins des Français. Il n’est pas nécessaire d’introduire des acteurs commerciaux. La mise en concurrence des Caisses entre elles et avec des acteurs non commerciaux donnerait un coup de fouet aux innovations et aux réformes. Pour le dossier médical électronique et la révolution des données, deux sujets qui n’ont, en effet, pas progressé, c'est indispensable. Il n’y a pas d’avenir à des soins personnalisés sans les données.

Autre example la CNAM est assise sur deux trésors potentiels à condition de les supprimer ou à tout le moins de les réduire, la fraude et les dépenses inutiles. Avec une action décisive dans ce domaine des moyens pourraient être dégagés pour le cœur du système celui qui apporte un véritable gain de qualité de vie ou d’espérance de vie. Ces initiatives pourraient être mises en place par les initiatives libérées des caisses ou d’assureurs mutualistes qui en réalité n’attendent que cette opportunité pour faire valoir leur expertise.

D’une administration à une entreprise publique

Aucun hôpital ne pourra s'adapter aux contraintes de la médecine moderne sans un autre statut que celui d’administration. L’administration butte sur la production. Elle peine à produire des documents d’identité si bien qu’il est illusoire de croire qu’elle pourrait produire des soins de manière optimale. L’étatisme nuit à l’économie sociale et les monopoles bloquent toute évolution et en particulier l’innovation organisationnelle. Le statut d’entreprise publique doit devenir un choix possible des acteurs de l’hôpital, régions, département, mairies et état. Une entreprise publique hospitalière deviendrait un formidable établissement pour soigner les Français.

Traitement identique des établissements de soins

Tous les établissements de soins en France sont financés par les prélèvements obligatoires. Il est donc naturel que tous ces établissements contribuent aux urgences de santé publique. Pour les soins programmés ou ne relevant pas de la santé publique il faut améliorer la T2A. Il est nécessaire de la rendre plus précise, de l’actualiser chaque année pour que les moyens soient proportionnels à l’activité réelle des établissements. Il en est de même des GHM (Groupe Homogène de Malades). Tout retour à un financement de dotation globale affaibliera l’hôpital public.

Écoles de médecine

Ce pays est curieusement administré. Les Écoles de médecine n’échappent pas à cette maladie endémique qu’est la réforme permanente et l’incohérence grandissante. Les étudiants en médecine perdent confiance depuis des décennies. Pourquoi? Parce qu’une série de décisions incohérentes dans le domaine de la formation des médecins ont été prises qui pourraient s’intituler comment décourager les médecins?

-Refuser des étudiants à 13/20 de moyenne ou plus et

-Allonger les études alors que nous manquons de praticiens en face des patients.

-Allonger les études initiales alors que c'est la formation continue qui fait l'art médical et la qualité des soins dans une période où les connaissances sont rapidement obsolètes

-Imposer des débuts d’installation contraints par la géographie ou les tarifs

-Refuser l'exercice médical en remplacement à ceux qui ont fait l'essentiel de leur formation

-Ne pas s'impliquer dans la formation médicale continue

-Accepter la nomination à vie dans les trois fonctions (recherche, enseignement, soins) pour les hospitalo-universitaires, meilleur moyen de bloquer la recherche et de décourager les entrants, et fragiliser les praticiens de première ligne en médecine libérale.

Il est à parier que les écoles de médecine reviendront. Libres comme à leur naissance. Fortes de l'extraordinaire histoire de ce métier et de son art. Le plus tôt possible.

Les bureaucrates ne peuvent réduire la bureaucratie, ils la génèrent

Tous les administrateurs des hôpitaux le savent et le constatent, la bureaucratie auto-prescrit des emplois, multiplie les tâches et ralentit le fonctionnement général. Mais le diagnostic posé par les bureaucrates en haut de la pyramide est inexact: “des fermetures de lits faute de professionnels, un malaise qui touche médecins comme infirmiers, une désertification médicale qui s’accentue et un fossé qui se creuse entre l’hôpital et la médecine de ville.” selon M. Hirsh. Ce sont là des symptômes parmi d’autres pas des causes. C’est une forme de diagnostic très habile car il n’envisage ni les responsabilités ni les causes et en conséquence pas les solutions. Du ministère aux ARS et aux administrations hospitalières une chaîne de bureaucratie intense et contre productive a été installée par A. Juppé alors qu’à la même époque l’Allemagne ouvrait son système de soins et d’assurance maladie pour le dynamiser. Le résultat trente ans après (déjà) est frappant. Il faut supprimer les ARS et ouvrir une importante transformation du système vers la subsidiarité et les régions. L’exécutif régional est l’opérateur idéal de la santé publique car les particularités des mesures en la matière ne peuvent être décidées avenue de Ségur et les actions au contact des populations encore moins.

De ce point de vue les premières déclarations depuis le résultat de l’élection présidentielle ne vont pas du tout dans le sens de solutions mais plutôt vers de vieilles habitudes. Le Ségur n’a pas réussi à apporter des solutions organisationnelles alors que l’hôpital public est doté de moyens financiers élevés? La reprise de 13 milliards de dettes s’est perdue dans les dépenses insoutenables de l’hôpital en matière d’emplois non soignants? Faisons donc des états généraux.

Consacrer les ressources aux soins, réduire le backoffice, externaliser les fonctions non directement soignantes

Les salaires représentent en moyenne 68% du chiffre d’affaires des Hôpitaux. C’est très excessif car bien sûr ce qui compte dans la médecine moderne c’est la capacité d’investissement. Dans ces emplois il y a ceux qui soignent en gros le front office et ceux qui sont agrégés autour des soins pour des raisons multiples. Il peut s’agir de fonctions indispensables ou bien de fonctions héritées du passé de l'organisation hospitalière. Il peut aussi s’agir de fonctions générées par la bureaucratisation du système de soins depuis la réforme Juppé.

D’une part il y a trois secteurs où le backoffice est très important:

1/ les métiers techniques
2/ l'administration et les cadres de soins
3/ l’informatique hospitalière

Dans ces emplois de backoffice l’administration hospitalière est impuissante à réformer et se trouve donc incapable de mieux payer les soignants. L’hôpital est devenu de fait une entreprise de haute technologie et plus rien ne peut être produit sur place en dehors des soins. Rappelons nous que les hôpitaux dans le modèle préindustriel produisait des fruits et légumes, du vin, faisaient réaliser les portes, les plans de travail du bloc par leurs propres employés et j’en passe. Nous sommes maintenant dans le modèle numérique sans en avoir tiré les conclusions.

D’autre part il y a une externalisation massive à effectuer dans des fonctions non directement soignantes, il s’agit de fonctions support comme les ambulances, les restaurants et cafétéria, la formation et d’autres. Il est urgent pour la qualité du service d'externaliser ces fonctions ce qui permettra d’avoir des services de meilleure qualité à un coût moindre.

Ces transformations ont été opérées dans toute l’Europe avec d’excellents résultats. Pourquoi s’obstiner à conserver un modèle qui ne marche plus?


La ressource médicale a été traitée comme si elle était infinie. Or la vie réelle nous enseigne qu’elle est limitée.

La pénurie médicale n’est pas celle du nombre de médecins mais des heures disponibles pour soigner.
Dans une période de pénurie de médecins, il faut rappeler que les médecins réfugiés dans les tâches administratives n’ont jamais été aussi nombreux.
Ainsi les heures de travail consacrées aux soins ont diminué.
Qui a multiplié dans les hôpitaux les postes administratifs pour les médecins?
La réglementation.
De toutes parts y compris avec la soi-disant représentation de la réforme des pôles il a été exigé que des médecins gèrent des activités qui seraient parfaitement fonctionnelles en l’absence de médecin.

Ces médecins manquent au front.
En dehors de l'hôpital, c'est la même tendance qui ressemble à celle de l’agriculture
.
Les ARS emploient des médecins qui ne soignent jamais un malade.
Les Caisses dont le nombre est extravagant emploient des médecins de dossier.
Les EHPAD ont été bureaucratisées à la manière de l’administration, il faut réglementairement des médecins coordonnateurs dont l’utilité n’a jamais été évaluée mais qui manquent en première ligne.


On peut douter que la complexité de la situation soit prise à bras le corps par le futur gouvernement. Les nouveaux venus ou les novices préfèreront un nouveau sparadrap de milliards plutôt que se brûler les ailes. Alors les Français peuvent-ils espérer une amélioration de leur système de soins? À mon avis pas dans l’immédiat et au contraire la dégradation va se poursuivre. Les causes que j’ai exposées sont puissantes et durables. En particulier l’impossibilité de faire revenir les soignants qui démissionnent et de former ceux qui pourraient l’être. Ensuite parce que la taille de l’administration dans le système de soins fait qu’elle n’a plus besoin des patients pour fonctionner. C’est un paradoxe tragique. Enfin parce que les Français ont tort de croire que les mêmes mesures (plus d’argent public) pourraient cette fois donner des résultats différents. Il faut se préparer au courage. Celui de réformer et celui de se projeter dans l’avenir. Nous avons des moyens considérables mais nous ne parvenons pas à atteindre l’efficience c'est-à -dire des résultats satisfaisants. Il faut s’inspirer de l’entreprise, s’adapter aux besoins, retenir que la ressource est rare et accepter l’évaluation.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !