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Quand la gauche agonise car il est impossible d'être à la fois républicain et multiculturaliste
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Bonnes feuilles

Paul-François Paoli rappelle que la question de l'identité de la France, marquée par la tradition chrétienne et l'héritage gréco-romain, et celle de sa souveraineté sont liées. S'il existe un peuple français, celui-ci a des droits historiques sur la France, laquelle n'est pas qu'une idée mais une terre et un pays. C'est cette réalité que certaines élites occultent alors qu'elles reconnaissent ce principe pour d'autres pays. Extraits de "Quand la gauche agonise - La république des bons sentiments" de Paul-François Paoli, aux éditions du Rocher 1/2

Paul-François Paoli

Paul-François Paoli

Paul-François Paoli est l'auteur de nombreux essais, dont Malaise de l'Occident : vers une révolution conservatrice ? (Pierre-Guillaume de Roux, 2014), Pour en finir avec l'idéologie antiraciste (2012) et Quand la gauche agonise (2016). En 2023, il a publié Une histoire de la Corse française (Tallandier). 

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De quel droit, par exemple, le publiciste Guy Sorman, qui vit aux États Unis, prétend-il faire honte aux Européens de leur attitude par rapport à des réfugiés qu'il compare avec légèreté à des persécutés juifs des années 30 ? Il est vrai que les sans-abri qui jonchent aujourd'hui les rues de Paris, sont des invalides sociaux, des improductifs, tandis que les hommes qui arrivent d'Afrique et d'ailleurs sont, eux, des prolétaires en puissance qui peuvent relancer la croissance en enrichir "l'Europe métisse" que Guy Sorman appelle de ses vœux, ainsi qu'il l'écrit dans son article. Sans le savoir peut être, Guy Sorman a inventé un nouveau concept : celui de darwinisme compassionnel. Oublions les pauvres hères qui meurent de froid à nos portes, accueillons les vaillants réfugiés qui peuvent redonner un sang neuf à l'Europe en déclin. Même son de cloche chez Jacques Attali qui, sur son blog du 7 septembre, illustre cet étrange chantage compassionnel non dénué d'intérêt. Tout en proposant d'exclure la Hongrie pour son infraction envers les "valeurs européennes", il blâme ceux qui n'alignent pas leur position sur celle de l'Allemagne, qui a décidé d'ouvrir plus grand ses portes aux réfugiés pour des raisons autant démographiques qu'économiques.

"De fait la confrontation aux exigences de l'hospitalité renvoie à l'essentiel de notre caractère. Certains qu'on croyait aimables, se révèlent égoïstes, d'autres qu'on croyait sans cœur, se révèlent altruistes".

Qui ne voit l'indigence d'un tel raisonnement ? Comment croire que cela soit si simple et que, comme dans les westerns, le monde se divise entre bons et méchants ? Dans Le Point du 1er octobre, lors d'un débat avec l'économiste Jacques Sapir, Jacques Attali n'hésite d'ailleurs pas à affirmer que l'afflux de réfugiés est d'abord notre intérêt économique, puisque ces hommes jeunes et vaillants viennent au secours de notre croissance.

Aujourd’hui ce chantage du cœur se retourne contre ceux qui le tiennent depuis trop longtemps, comme en témoignent des sondages d'opinion qui montrent que les Français sont devenus réticents à accueillir toute la misère du monde. Mais cette crise va beaucoup plus profond : elle témoigne du fait que les Français n'ont plus confiance en leur système d'intégration. Les malheureux qui échouent à nos frontières et que nous n'avons guère envie d'accueillir, paient les conséquences d'un échec historique : celui de l'assimilation républicaine qui a peu, ou mal, fonctionné avec des populations en provenance du Maghreb qui, comme l'a récemment écrit l'historien Georges Bensoussan dans un article alarmiste, non seulement ne s'assimilent pas, comme ce fut le cas des générations précédentes, mais se "désassimilent", en revendiquant l'identité de leurs parents. Cette crise des réfugiés, plutôt que de nous confiner dans la torpeur du mea culpa, devrait nous fait réfléchir sur les limites de l'universalisme français et la nécessité de concevoir la France aussi en termes d'identité historique et culturelle. Car les valeurs républicaines ne suffisent pas à penser la France, contrairement à ce que prétendent Jean Christophe Cambadélis et Jacques Attali. La gauche est, en effet, complètement désarmée face au débat lancinant qui a trait aujourd'hui à l'identité de la France. Étrangère à cette problématique, elle est incapable de penser une notion d'identité qui lui paraît suspecte et qu'elle prétend réduire aux valeurs de la citoyenneté. Pour pallier cette aporie elle a recours au discours pieux sur le "vivre ensemble", slogan qui ne répond nullement à la question de savoir si nous voulons vivre les uns avec les autres, parce que nous le désirons ou parce que nous y sommes contraints. Le discours sur le "vivre ensemble" est emblématique de la nov langue pseudo-citoyenne : cette paraculture des bons sentiments dont s'abreuvent les médias et les hommes politiques mais qui masque une réalité plus sombre : le non-désir de vivre ensemble dans un monde où, bien souvent, nous n'avons pas grand-chose à partager.

Comment assurer l'unité culturelle du peuple français, unité qui suppose des représentations communes, dans un pays qui abrite à la fois le plus grand nombre de musulmans d'Europe et le plus grand nombre d'athées ? Sur ce sujet crucial, nous nous heurtons à un tabou. Pourquoi ? Parce que la gauche dans son courant dominant est prise dans une mortelle contradiction entre sa volonté d'incarner des valeurs qui se veulent universelles, depuis la laïcité à la parité des sexes et une sensibilité multiculturelle qu'elle promeut par ailleurs et qui est fondée sur le droit à la différence.

Or il est impossible d'être à la fois républicain et multiculturaliste, tout simplement parce que le multiculturalisme institue la parité des cultures quand le principe républicain suppose la supériorité de la laïcité en termes de civilisation. Entre Jean Pierre Chevènement et les options multiculturalistes de Christiane Taubira, il faut choisir or justement la gauche ne choisit pas de manière explicite. Ainsi son propos est-il devenu illisible à ceux qu’elle prétendait autrefois représenter : ces classes populaires méfiantes envers l'islam qui ne votent plus pour elle.

Extraits de "Quand la gauche agonise - La république des bons sentiments" de Paul-François Paoli, publié aux éditions du Rocher, 2016. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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