Pro russe ou pro Ukraine ? Ce que l’analyse des posts Facebook dans 108 pays révèle de la genèse des sentiments sur la guerre<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Comment les régimes politiques et les relations commerciales peuvent-ils prédire la façon dont les gens perçoivent la guerre ?
Comment les régimes politiques et les relations commerciales peuvent-ils prédire la façon dont les gens perçoivent la guerre ?
©Bertrand GUAY, Valery SHARIFULIN / AFP / SPUTNIK

Opinion publique

L'analyse d'un million de messages Facebook provenant d'une centaine de pays montre que les relations commerciales d'une nation avec la Russie jouent un rôle essentiel dans la formation des sentiments auprès de l'opinion publique sur la guerre en Ukraine.

Toan L.D. Huynh

Toan L.D. Huynh

Toan L.D. Huynh est Maître de conférences en gestion des risques à l’Université de Southampton.

Voir la bio »

Atlantico : En analysant le sentiment public concernant la guerre Russie-Ukraine avec près d'un million de messages Facebook provenant de 108 pays, vous montrez que la relation d'une nation avec la Russie joue un rôle essentiel dans la formation du sentiment public concernant la guerre en Ukraine. Quels sont les principaux enseignements de votre étude ?

Toan L.D. Huynh : Le principal enseignement est le rôle du soft power dans l'ordre mondial actuel. Les pays influencés économiquement et culturellement par des facteurs historiques avec la Russie seront plus enclins à soutenir la Russie dans la guerre. Simultanément, les pays ayant des éléments de confrontation avec la Russie, comme les États-Unis et les pays occidentaux, auront tendance à s'opposer à cette guerre.

Comment agréger des millions de données sans déformer ce que l'auteur du post a voulu dire ?

Nous utilisons des méthodes d'analyse du langage naturel et d'apprentissage automatique pour analyser les émotions de l'auteur dans chaque post, donnant ainsi l'attitude de chaque post à l'égard de la punition de la Russie dans la guerre contre l'Ukraine. Les recherches provenant de 108 pays différents sont très compliquées car nous devons utiliser un outil de traduction de la langue de chaque pays en anglais, puis utiliser des algorithmes d'analyse du langage naturel pour l'analyse. Pour limiter la distorsion du sens du post lors de l'analyse du sentiment, nous utilisons le score moyen de 4 méthodes d'apprentissage automatique différentes pour capturer autant d'autres aspects du post que possible. En outre, les pays ayant très peu d'interactions (< 50) avec les sanctions russes sont exclus de l'échantillon pour éviter toute interférence des données.

Quelle est la "cartographie" actuelle du sentiment public concernant la guerre Russie-Ukraine ?

À Lire Aussi

Bons et mauvais élèves de la vaccination dans le monde : radioscopie des facteurs clés 

La carte psychologique des pays concernant la guerre montre l'attitude générale des habitants de ces nations à l'égard de cette guerre. La plupart des pays sont généralement opposés à cette guerre et la condamnent, que leurs gouvernements soient ou non d'accord avec elle.

Comment les régimes politiques et les relations commerciales peuvent-ils prédire la façon dont les gens perçoivent la guerre ?

Les recherches montrent que dans les démocraties, les gens soutiendront la guerre plus que les autres. Si les pays ont une dépendance commerciale avec la Russie, les gens ont tendance à être plus pro-russes et contre les sanctions contre la Russie. Cela est également compréhensible lorsque les facteurs économiques déterminent la politique.

En outre, la similitude des institutions politiques poursuivies par un pays avec la Russie sera également l'un des facteurs déterminants du soutien de l'opinion publique aux sanctions contre la Russie. En particulier, le sentiment public dans les pays en pleine démocratie est plus élevé que dans les gouvernements autoritaires de 0,160 à 0,197 points.

Existe-t-il une hétérogénéité géographique entre les positions des gouvernements et le sentiment public ? Comment expliquer les fortes divergences entre ces deux éléments dans les pays asiatiques et africains ?

Les facteurs géopolitiques ont également un impact sur l'homogénéité. Les populations et les gouvernements des pays de l'OTAN et des pays géopolitiquement confrontés à la Russie sont souvent plus unis dans leur détermination à s'opposer à la guerre. Cependant, ce sont ces pays qui souffrent le plus économiquement de l'imposition de sanctions à la Russie.

La divergence observée en Asie et en Afrique est également due en partie à des facteurs géopolitiques, la Russie y exerçant davantage de soft power et entretenant de meilleures relations avec les gouvernements de ces pays. Dans le même temps, leurs populations suivent la tendance générale dans le monde à s'opposer à la guerre.

À Lire Aussi

L’Ukraine menacée par la fatigue… des Occidentaux ?

Dans quelle mesure le niveau d'éducation est-il déterminant ?

Nous n'avons pas trouvé de relation entre le niveau d'éducation et l'attitude face à la guerre dans les données de recherche.

La France présente-t-elle des caractéristiques particulières ?

La France est l'un des pays de l'alliance de l'OTAN, parmi la Grande-Bretagne et l'Allemagne, qui sont les principaux pays de l'OTAN, il y a donc une unité entre la décision du gouvernement et l'attitude de la population.

La France est l'un des 20 pays ayant le plus grand nombre d'interactions Facebook sur la question des sanctions contre la Russie, ce qui prouve que les Français sont très intéressés par cette question géopolitique. En outre, le score de sentiment de la France est de 0,777 (plus il est proche de 1, plus les Français sont favorables aux sanctions contre la Russie), ce qui en fait l'une des principales économies ayant le score de sentiment public le plus élevé avec les États-Unis (0,757) et le Canada (0,793), le Royaume-Uni (0,783), l'Allemagne (0,768), l'Inde (0,735) et l'Australie (0,789).

À Lire Aussi

Guerre en Ukraine : Vladimir Poutine en pleine fuite en avant… mais vers quoi ?

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !