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Ce n'est pas Facebook qui permet une révolution, c'est la rue !
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Printemps arabe

Après le "printemps arabe", la Libye pourrait à son tour changer de régime si la chute de Kadhafi venait à être confirmée. Et une fois de plus, la révolte est venue de la rue...

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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Si les réseaux sociaux et les sites des médias online et traditionnels relaient l’information et offrent une caisse de résonance souvent indispensable à l’émergence des mouvements populaires, la « vraie » révolution se fait dans la rue, et symboliquement sur les grandes places des capitales.

La Place verte de Tripoli connaissait hier l’effervescence des grandes occasions, qui étaient jusque là, et pendant 42 ans, celles du pouvoir du colonel Kadhafi. Symboliquement, comme le peuple irakien déboulonnait la statue géante de Saddam Hussein en avril 2003, il est important de reprendre possession des espaces publics accaparés par les pouvoirs dictatoriaux. Ce printemps arabe nous fait régulièrement découvrir ou redécouvrir les grandes places qui sont autant de points de départ et de convergence des mouvements de rébellion. La désormais célèbre Place Tahrir au Caire a été l’épicentre de la contestation égyptienne, la Place des Martyrs sera à son tour le centre névralgique du mouvement en Algérie. En Tunisie, la place du 7 novembre (1987 – prise du pouvoir de ben Ali) est rebaptisée en février place Mohamed Bouazizi dont l'immolation par le feu avait déclenché la «révolution du jasmin» qui a renversé le président Zine ben Ali le 14 janvier 2011.

Systématiquement, comme on cherche à interdire la liberté d’expression, les journalistes ou encore les sites web et les réseaux sociaux, les régimes dictatoriaux ont tenté d’empêcher les rassemblements en barricadant - eux aussi - les accès à ces places, comme ce fut le cas avec cette immense barrière de barbelés installée autour de la Place des Martyrs mi-mai 2011 à Alger. Une sorte de mur de Berlin de papier vite baptisé « mur de la honte » qui n’aura été qu’une tentative dérisoire face au mouvement en marche.

Les réseaux sociaux sont devenus les Places Tahrir du web.

Interdire les regroupements est une constante des régimes, parfois même démocratiques, pour tenter d’éviter les débordements contestataires. Il est courant dans le vocabulaire journalistique d’expliquer que les « manifestants ont été dispersés », comme nous avons l’habitude de l’expression « diviser pour mieux régner ». Mais il est bien difficile de canaliser éternellement des mouvements qui naturellement doivent s’exprimer un jour ou l’autre, surtout aujourd’hui avec des canaux internet totalement ouverts qui ne peuvent être maîtrisés comme on contrôle simplement une télévision d’Etat. Ces nouveaux médias et ces réseaux sociaux sont les places Tahrir du web, ils encouragent des mouvements, des générations, qui arrivent à maturité à force d’échanger et de se sentir devenir puissants. Mais in fine le digital ne suffit pas et cela se concrétise toujours par le rassemblement physique, car c’est là véritablement que le sentiment de justice et de force se ressent pleinement, que le pouvoir d’opposition se met en marche. La Chine populaire doit sûrement surveiller les conversations qui pourraient un jour appeler à se rassembler de nouveau Place Tian'anmen.

Ces mouvements sont l’expression ultime, ils ne peuvent être comprimés, surtout avec aujourd’hui une communauté internationale qui a à cœur de jouer son rôle de gendarme et de justicier, parfois d’accélérateur. Comme le soulignait Alain Juppé au 20h de TF1 lundi, « nous sommes dans un monde nouveau, on ne peut pas aller à l’encontre de l’aspiration des peuples ». Il ne faut pas oublier qu’en Libye aussi, le mouvement des rebelles a précédé l’intervention internationale qui l’a ensuite significativement soutenu.

En régime démocratique aussi, on manifeste, souvent aussi sur les places comme les indignés espagnols Place Puerta del Sol, mais pour empêcher une loi ou pour défendre des revendications, mais on ne renverse pas un Président élu. On peut chercher à infléchir une politique, on peut obtenir le retrait d’un texte, la démission d’un Ministre, mais pour changer de « régime gouvernemental », on attend sagement la prochaine échéance. Les mouvements révolutionnaires, par la force du collectif, du rassemblement, du mouvement de masse, aspirent à mettre en place des régimes démocratiques dans lesquels les électeurs pourront librement s’exprimer … seuls, dans l’isoloir, pour élire un leader qui aura su rassembler … autour de lui.

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