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Presse quotidienne : la déMondialisation façon CGT
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Zone franche

A force de nous priver du Monde, les ouvriers du Livre vont nous apprendre à nous en passer pour de bon.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Le Monde n’est plus en kiosque depuis déjà quatre jours et, à l’exception d’un dernier carré de fidèles frustrés, dont votre serviteur, personne ne semble vraiment s’en émouvoir…

Le « grand quotidien de référence » n’a pourtant pas décidé ― façon France-Soir ― d’abandonner le papier pour se concentrer sur le Web sans avertissement préalable : 320 000 exemplaires vendus chaque jour, c’est à peine le tiers de ce que diffuse le New York Times mais ça n’oblige pas encore à baisser le rideau.

Non, il est très classiquement victime d’un énième accès de fièvre des ouvriers du Livre, lesquels ont toujours pensé que scier la branche sur laquelle ils sont assis était le meilleur moyen d'assurer leur avenir.

Rien de bien original, donc, mais il fut un temps où une saison présidentielle sans livraison vespérale de commentaires et d’analyses made in Le Monde serait passée pour une assiette d’épinards sans beurre. Ce n’est plus le cas. Les « pages Débat », désormais, ce sont plusieurs dizaines de blogs ou de sites d’info accessibles sans bourse délier (Le Monde lui-même est intégralement et gratuitement disponible en ligne quand la CGT est en pétard).

Les raisons de la grogne du jour, dans un contexte pareil, finissent par paraître dérisoires : la relocalisation en province de la fabrication des exemplaires destinés aux abonnés, le recours à la sous-traitance pour certaines opérations de maintenance et de nettoyage de l’imprimerie que le journal possède en propre à Ivry-sur-Seine.

L’ordinaire d’un établissement sans aucun client, quoi, depuis que Les Échos sont allés se faire imprimer ailleurs... Les chances de leur trouver un remplaçant sont d'ailleurs quasi-nulles, d’où la perspective de pertes annuelles approchant les 10 millions d’euros.

Il faut dire que, par le passé, le jusqu’au-boutisme du Livre s’est toujours révélé payant : un journal empêché de paraître suffisamment longtemps donnait droit à toutes les exigences, même les plus grotesques, et compensait ses surcoûts en augmentant prix de vente, tarifs publicitaires et demandes d’aide à l’État.

Si la martingale ne fonctionne plus, ce n’est évidemment pas la faute de la seule CGT. Avec ou sans grèves à répétition, les lecteurs désertent naturellement le papier pour le Web. Ils le font juste un peu plus rapidement ici qu’ailleurs, perdre l’habitude d’acheter un journal à parution aléatoire étant sans doute plus facile que perdre celle d’acheter un titre authentiquement quotidien.

On se demandait, ces derniers jours, ce que pouvait bien recouvrir le concept montebourgien de « démondialisation ». Avec les gens du Livre, on commence à saisir…

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